Hier, j’ai pris mon dernier repas à la Comète version « Bruno et Jérome ». Pendant ma sieste, ils ont fermé définitivement les lourdes. Ils sont probablement là, aujourd’hui, à faire l’inventaire. Demain, d’autres patrons ouvriront.
Je ne soute pas qu’ils soient très sympathiques mais le cirque va recommencer. Tout ce jeu dont j’ai horreur entre le nouveau patron et les anciens clients. Sachant que c’est vraiment très con : on finit toujours par copiner ou, au contraire, à constater une incompatibilité d’humeur. Alors le cirque reprend de plus belle. Le patron augmente les tarifs parce qu'il ne pourra plus le faire avant deux ans, ferme le comptoir pour des motifs débiles. Officiellement, il s’agit de débarrasser des braillards ivrognes pour qu’ils n’emmerdent pas les gens qui souhaiteraient dîner. Enfin, il s’agit plus de repérer ces braillards pour les virer, c’est pourquoi, d’ici la fin de l’été, Djibril, Tonnégrande et moi seront au comptoir. Seuls. Et Nadia, mais pour des raisons esthétiques que ne niera pas Yann.
Le deuxième reportage d’Envoyé Spécial, sur France 2, jeudi soir, était consacré aux bistros qui ferment en France (la Belgique est concernée par le problème, aussi, malgré la présence de Poireau). Des milliards de bistros ferment, chaque année, entrainés soit par la perte de pognon soit par des projets immobiliers grotesques.
C’est vers 20 heures que je me suis dit que j’allais voir ce reportage à l’Aéro plutôt qu’à la maison et forcer le patron et les clients à le regarder pour observer leurs réactions… Le patron a commencé à fermer les rideaux de fer. « T’es con » lui ai-je dit ! « Tu sais très bien que je vais rester là, avec toi, jusqu’à plus de dix heures et que tu ne feras pas le ménage puisque tu regarderas la télé, reste donc ouvert ! Il y a bien quelques clients qui vont rentrer, ça te fera toujours ça en plus ! » Il a ouvert.
J’imagine la tête d’un patron de bistro qui me lit, maintenant : « Ah ! Le con, il croit que c’est si facile de gagner de l’oseille ! » Il n’a pas entièrement tort. De toute manière, au cours du reportage, les clients comme les interviewés avaient tous des bonnes idées pour gagner de l’oseille… Tout le monde a toujours son mot à dire et pense connaître le boulot mieux que ceux qui le pratiquent !
Pourtant, le patron de l’Aéro a suivi mon conseil. Il a gagné du pognon en regardant dubitativement un reportage avec des gugusses qui faisaient des constats et donnaient des conseils.
J’avais trop l’œil critique en regardant le reportage sur les bistros. Je commentais, j’enregistrais les réactions des autres, je mémorisais des détails pour faire un billet de blog. Du coup, quatre jours après, je n’en ai plus qu’une vague idée. Le reportage était de qualité mais comme j’ai mauvais fond, je vais signaler les points négatifs.
Notamment, il n’insistait pas assez sur le volet financier du problème. Tiens ! C’est pour ça que je vous ai sorti l’anecdote sur le chiffre d’affaire qu’à fait l’Aéro, ce soir là « grâce à moi ». Beaucoup de bistros de ma connaissance ne pensent qu’à augmenter le chiffre d’affaire ce qui aura pour conséquence d’augmenter la valeur du fond de commerce. Le patron de l’Aéro, hier, a tout simplement foutu 30 euros dans sa poche en bossant une heure de plus.
Dans le reportage, hier, des spécialistes allaient donner des conseils aux patrons de bistro. Le principal conseil est : diversifier l’activité. Hier, ils présentaient un bistro Parisien qui organisait des grosses soirées. Son patron était content. Plein d’oseille rentrait, le chiffre d’affaire était bon. Je me pose juste une question. Après avoir payé le personnel supplémentaire (cuisiniers, serveurs, …), ce patron a-t-il seulement gagné, pour lui-même, 30 euros supplémentaires par rapport à une soirée normale ? Et quand il aura passé les trois premiers mois, avec l’effet de mode passé, qu’il se sera planté une fois en organisant des trucs pendant un mach important, … Que lui restera-t-il ? Rien. Pour peu qu’il soit locataire du fond de commerce et des murs, le CA ayant augmenté, les loyers vont suivre...
Vous allez dire, à nouveau, qu’il serait préférable que je m’occupe de mes fesses et que je n’y connais rien en bistro. Pas du tout. Je suis en colère, ce qui me donne soif alors que les bistros ferment.
Il y a environ deux ans (vers mi-juin 2008), la Comète a changé de proprio. Les nouveaux ont tout refait (ce qui était nécessaire) et cassé la terrasse (une terrasse ouverte est toujours plus tentante… et l’hiver, ça se chauffe). Ils ont changé le mode de fonctionnement : ouverture 7j/7, nourriture plus haut de gamme, plus branchée (et plus chère), musique (de fond) plus « moderne », repas le soir… Fermeture du comptoir le soir.
Tous les spécialistes des bistros de Bicêtre ont donné leurs avis sur le devenir de la boutique. Un peu comme les consultants experts, jeudi dernier, à la télé.
A ce stade, comme personne n’a pris de note pour officialiser les prévisions, je pourrais dire que j’avais tout prévu. Je vais juste dire qu’en récoltant et en analysant les propos de Mouloud et de Michel, eux-mêmes patrons de bistro, je ne m’étais pas trop planté dans les prévisions finales. Tous les autres, sauf peut-être Tonnégrande qui s’en fout royalement, se sont plantés, des aspects affectifs prenant le pas sur la réalité économique. Pourtant, j’avais moi-même bien plus aspects affectifs à oublier pour tenter l’exercice…
Globalement, les nouveaux patrons avaient fait trois erreurs.
La première, nous l’avions faite aussi, Mouloud et moi. La terrasse ouverte n’est pas aussi bénéfique que nous l’avions imaginé, à cause du marché (en terrasse, trois jours par semaine, on se retrouve trop près du marché). Michel n’avait pas vu ça, non plus, mais avait bien dit que n’étant pas au soleil, elle ne fonctionnerait que les jours d’été.
La deuxième était de négliger le comptoir. Ce n’est qu’une semi-erreur dans la mesure où elle était voulue (j’en ai déjà parlé) mais en deux ans d’observation, on voit bien que le désert total s’y est installé ! Dimanche dernier, à midi, avant ce dernier repas, j’étais tout seul. Heureusement qu’il y a l’iPhone pour s’occuper !
La troisième était une confiance excessive dans les repas le soir, je n’y ai jamais réellement cru. Néanmoins, c’est très cher : il faut maintenir un serveur et un cuisinier… (la terrasse ouverte, d’ailleurs, nécessite un serveur à la fermeture pour rentrer les tables et chaises). Ca ne fonctionne pas car il n’y a pas d’hôtel dans le quartier, que les ceusses qui viennent en bus mettent cinq minutes de plus pour arriver à Paris, que la Mouffetard est à cinq ou six stations de métro… Il n’y a que des blogueurs fous qui viendraient dans le coin passer une soirée !
C’est en pensant à tout ça que j’écoutais le reportage d’Envoyé Spécial, jeudi. Dubitatif devant tous les conseils donnés, par des gens extérieurs au quartier. Mon conseil au patron de l’Aéro a écouté mon conseil : prendre l’oseille des clients, tant qu’à devoir rester présent.
Demain soir, première soirée à la Comète. Mercredi, debriefing avec Michel, voire avec Mouloud. Je ne vous en dirai pas plus. Je peux parler aujourd’hui, je ne connais pas les nouveaux patrons et les anciens sont partis… Le propriétaire du fond et celui des murs restent.
Je vais regretter l’ancienne équipe, comme je regrette les précédentes ! Je souhaite aux nouveaux patrons une belle réussite à laquelle j’espère participer dignement…
Et j’espère que les blogueurs y participeront, au moins, le 11 juin, pour le grand KdB, avec un tas de gens qu’on n’a jamais vus !
Bon, ben mercredi soir je vais où moi alors ? ^__^ (je t'appelle)
RépondreSupprimerIl faut que tu inventes une boîte de consultants en bistrots ! :) je veux bien y faire client mystère.
RépondreSupprimerFalconHill,
RépondreSupprimerCa dépend à quelle heure tu te pointes ! Si c'est avant 20 heures, c'est la Comète.
Balmeyer,
J'y pensais, justement. C'est délirant que les gens qui prennent des bistros (et qui donc dépensent une fortune) n'interrogent pas les observateurs de mon type et ne passent pas plus de temps à observer la clientèle.
Je dis "de mon type" pas pour me vanter mais je suis un peu la clientèle idéale pour ce genre de commerce : la quarantaine avec un peu de moyens, contrairement au vieux Jacques, par exemple, qui va juger d'un commerce en fonction de ce que, personnellement, il en attend. D'ailleurs, il ne venait plus à la Comète le soir à cause du prix (les verres ont doublé... de taille et de prix : donc aucun changement pour lui, juste la barrière psychologique alors que le pinard est bien meilleur qu'ailleurs !).
Observation très pointue de la conjoncture des bistros. Ah l'esthétisme de Nadia, c'est du grand art...
RépondreSupprimerJ'ai fréquenté un bistrot 8 ans de suite et quand les proprios se sont barrés, tous les habitués ont suivi, le nouveau proprio ayant cassé l'ambiance...M'en suis jamais remis
RépondreSupprimerCondoléances sincères.
RépondreSupprimerLe principe de la comète est bien de tirer des plan sur son dos.
rires !!
Allez, je lève mon verre de jus de fruit à la santé de la Nouvelle Comète et de ses anciens cométeux!
Tu es sûr que les nouveaux patrons vont marcher avec KdB de juin?
RépondreSupprimerVous pouvez d'ores et déjà rassurer les nouveaux tauliers : je ne suis pas libre le 11 juin.
RépondreSupprimerEt, sinon, je vous autorise à exciper de ma possible venue pour leur faire faire ce que vous voulez. Sur le mode : « Si t'es pas sage, y a le gros méchant nazi qui va venir te balancer son verre à la tronche... »
Balmeyer m'a piqué mon idée de commentaire, je m'en vais reprendre un café !
RépondreSupprimer:-)
[Bel article ! :-) ].
Yann,
RépondreSupprimerTiens ! J'ai oublié d'en prendre une photo, hier.
Vlad,
Il y a toujours d'autres bistros !
Christie,
Santé !
Le Coucou,
Pourquoi refuseraient-ils une trentaine de couverts ?
Didier,
D'accord !
Poireau,
Merci !