En salle

01 février 2011

L'état du mal-logement en France

Je ne suis pas trop inspiré aujourd’hui, mais je tiens à relayer cette dépêche de la Fondation Abbé Pierre puisque j’ai moi-même souvent abordé la politique du logement dans mes blogs.

Leur rapport sur le mal logement vient de sortir (et disponible en téléchargement sur leur site web).

Morceaux choisis…

« L’insuffisance chronique de l’offre a encore été amplifiée par la chute de la construction observée depuis 2008 alors que le niveau des besoins est toujours aussi important, et que le décalage entre le niveau des prix immobiliers et les revenus des ménages s’amplifie, les premiers ayant repris leur marche en avant alors que les seconds stagnent. » 

« Sans parler du fait que les perspectives pour les ménages résidant dans des quartiers dépréciés sont toujours aussi sombres puisque le « Plan Marshall » annoncé en 2007 n’a toujours pas vu le jour. »

« Face à ce qui apparaît comme une extension de la crise du logement, la politique privilégie essentiellement l’accession à la propriété et en fait l’axe central et quasi exclusif de son intervention. Si les vertus que l’on prête à la propriété, notamment en terme de sécurisation face aux aléas de la vie, peuvent être réelles pour certains, elles ne le sont pas pour tous. »

« En la matière [la politique du logement], les mesures adoptées récemment apparaissent particulièrement injustes, peu protectrices et manquant singulièrement d’ambition. »


« L’intensification de la crise du logement s’exprime aussi avec le basculement dans la précarité de ménages qui en étaient jusque-là protégés. »

« Ce sont tous ceux dont les fins de mois se jouent à quelques dizaines d’euros près, parfois en plus, parfois en moins ; tous ceux qui sans être pauvres, vivent dans l’incertitude, sous le régime de l’insécurité permanente. Ils sont nombreux à être dans cette situation de sorte que le Médiateur de la République estimait à 15 millions le nombre de personnes dont les fins de mois se jouent à 50 ou 150 € près. »


« On assiste en effet à une réduction du champ d’action de la solidarité nationale envers les plus démunis. L’État s’est déchargé de la responsabilité des fonds de solidarité pour le logement sur les départements qui, contraints par leurs difficultés financières tendent, par diverses mesures, à limiter les possibilités d’accès à ces fonds. »

« L’État a fait de la refondation du secteur de l’hébergement un grand chantier national, mais les moyens qu’il y consacre ne permettent pas de faire face aux demandes nouvelles. Plus grave encore, il adopte des mesures concernant le logement qui renforcent l’insécurité des plus fragiles. »

« Les choix gouvernementaux en matière de logement ne permettent pas davantage d’aider ceux qui basculent dans la précarité. Leur situation est au contraire encore aggravée par des mesures adoptées récemment dans le cadre de la politique du logement. Le fonctionnement du marché immobilier comme parfois les mesures adoptées dans le cadre de la politique du logement, conduisent à accentuer leur vulnérabilité. Des ménages de salariés qui n’étant pas éligibles au logement social et ne bénéficiant pas d’aides au logement, peuvent ainsi être fragilisés. […] Des ménages, précédemment éligibles au logement social, peuvent se trouver obligés de recourir à un logement locatif privé beaucoup plus cher (en moyenne le double) et ne pas bénéficier d’aide personnelle au logement. Le resserrement de l’aide sur les ménages les plus modestes ne serait pas condamnable en soi, si cela ne mettait pas en difficulté ceux qui se trouvent ainsi exclus. »

« Les choix faits en matière de politique du logement ne sont également pas satisfaisants car ils conduisent à « une privatisation des difficultés de logement ». » « C’est également cette même logique qui s’exprime avec la promotion de l’accession à la propriété qui permet de renvoyer la charge financière du logement vers les ménages. »

« Cette évolution suscite ce détournement de l’interpellation de la Fondation Abbé Pierre en 2008, […] : quand on est en difficulté, on attend de l’intervention publique une aide, mais quand ce sont les politiques qui aggravent la situation… c’est la situation de millions de personnes qui se détériore. »

Une France de propriétaires, à tout prix ?

«  Pour les ménages les plus modestes, les responsables politiques inventent alors des leurres ou des substituts à l’accession sociale à la propriété qu’il s’agisse de la « maison à 15 euros par jour » ou de « l’appartement à 18 euros par jour » qui ont succédé en 2009 à la tentative des « maisons à 100 000 euros ». Leur écho médiatique a sans aucun doute été plus fort que leur impact sur la réalité. Un an après leur lancement en 2005, seules 80 maisons à 100 000 euros avaient été construites et 5 ans après, les services de l’État évoquent la réalisation de 800 maisons mais à des prix qui se situent entre 130 000 et 150 000 euros. L’insignifiance de ces résultats souligne la difficulté à faire bénéficier de l’accession à la propriété les ménages les plus modestes et révèle, s’il en est encore besoin, le caractère profondément inégalitaire de l’accession à la propriété. »

Bon… Je ne vais pas recopier le rapport. Il est accablant.

Lisez le.

9 commentaires:

  1. Je constate que les déjà fortement euphémistes “quartiers défavorisés” viennent de muter en “quartiers dépréciés”. C'est bien aussi.

    Sinon, pour le reste, que de circonvolutions verbales pour ne surtout pas dire ce qu'on ne veut pas dire : c'en devient admirable, à force.

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  2. Il en dit quoi Benoist Apparu ?
    Je ne vois rien sur son site http://www.benoistapparu.com !
    :-)

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  3. Didier,

    Vous voyez le mal où il n'est pas. Ce sont bien les quartiers qui sont dépréciés (qui ont perdu de la valeur) alors que lorsqu'on parle de quartier défavorisés, on le voit d'une manière globale, habitants, services publics, ... inclus. Mais c'est un détail.

    Ce qu'il y a d'amusant c'est que vous parlez souvent de "ce qu'on ne veut pas dire" sans dire de quoi il s'agit. C'en devient admirable, à force.

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  4. Ah désolé, mais déprécier a deux sens, le second étant : ne pas estimer à sa juste valeur, dénigrer. Et je maintiens que c'est bien ce qu'on veut nous faire entendre aussi.

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  5. Pourquoi "aussi" ?

    Ce n'est pas un discours politique d'un parti ou un tract d'un syndicat, c'est extrait d'un long résumé d'un rapport détaillé de la Fondation Abbé Pierre.

    Pourquoi revenez vous sur un terme ?

    Le seul truc qui importe est l'échec d'une politique (mais au fond on s'en fout, j'ai un blog politique d'opposition, je constate l'échec c'est mon "job") mais surtout l'erreur d'une politique de l'aide à l'accession à la propriété qui, au lieu d'aider les gens, renforce ce qu'on appelle bêtement les "inégalités" mais qui revient, au fond, à parler du nombre de gens dans la merde.

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  6. [SPAM] il est super votre site ! [/] j'avais souvent des trolls de ce genre sur mon ancien blog dotclear. Sinon, j'aurai bien aimé lui serrer la main à Mr l'Abbé Pierre. J'espère qu'il est bien loger où il est

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  7. Comment ça " l'échec d' une politique? Ça vous vient pas à l'idée que c'est fait exprès vu que les pauvres, on en a rien à foutre? Et qu'ils peuvent bien crever dehors on va pas se mettre à construire des bâtiments pour qu'ils puissent avoir un chez soi... Les pauvres ne méritent d'avoir un chez eux, hein?! Moi c'est comme ça que je la vois , la politique du logement en France : payez un loyer qui rembourse en 10 ans le montant de la valeur de ce que vous habitez mais n'ayez droit à RIEN ? Politique du logement ? Mes c*** les dirait Georges ... Geargies.

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  8. Dominique,

    Il doit regarder la terre et soupirer...

    Geargies,

    C'est en voyant la réponse que Suzanne vous fait, chez Didier, que je me rappelle que je vous dois une réponse ici.

    Vous ne poussez pas le raisonnement assez loin. Les pauvres sont invités à dépenser massivement leur pognon pour se loger, le pognon allant aux riches, spéculateurs, promoteurs ou même simples artisans qui eux aussi seront amenés à dépenser pour des conneries. Alors on leur accorde des facilités de crédit, le "PTZ+" atteignant un sommet puisque les pouvoirs publics, donc les impôts des pauvres et moyens, sont utilisés pour les aider à dépenser plus, à vivre étranglés jusqu'à la fin de leurs jours, ... Et tout ce que vous dites.

    Mais il peut y avoir une politique du logement : le logement social locatif, où les braves gens, pour un montant modeste, peuvent louer un appartement qui aura été construit par l'état avec comme seul enrichissement celui qui aura travaillé pour le construire.

    Il faut que cela se passe dans un climat social apaisé et rassurant, avec l'assurance d'avoir assez de revenus, toute sa vie pour payer le logement. Et c'est justement ça que les politiques de droite cassent progressivement...

    J'aime mes copains gauchistes quand ils parlent de revenus universels et tous ces trucs : ils ont parfaitement raison. On devrait avoir un revenu minimum à vie (ou, pourquoi pas, un logement gratuit). Ce n'est malheureusement qu'une utopie, dans notre pays. Pas une utopie économique (leurs études chiffrées sont très sérieuses), une utopie électorale.

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