Avant une élection, le militant politique cherche à faire
appel à l’intelligence de l’électeur. Après l’élection, quand il n’a pas gagné,
le militant traite l’électeur de con. Et il ne s’en rend pas compte : il
recommence la même bévue à la prochaine élection. C’est rigolo.
Le militant politique est-il un con ? Non. Je finis par
me considérer comme un militant politique alors ne raconte pas de connerie, s’il-te-plait !
L’électeur est-il un con ? S’il vote pour le camp d’en
face, oui, certainement. Cela dit, dans l’absolu, non, ce n’est pas un con. C’est
juste qu’il n’a pas les mêmes préoccupations que le militant politique. Mais le
militant politique le sait mais pense savoir quelles sont les préoccupations du
militant politique.
Je ne dis pas ça par méchanceté mais, à un récent billet,
alors que je discutais avec un copain du Front de Gauche, un crétin est
intervenu pour dire que je prenais les électeurs pour des cons. C’est faux :
je ne les connais pas tous, juste quelques dizaines. Il y a des cons parmi eux,
mais je les aime bien.
Le principe du militant est de faire le bonheur des gens
malgré eux.
Prenons en un au hasard, un gros, même : moi. Je n’arrête
pas de me foutre de la gueule de mes collègues de travail qui ont choisi d’habiter
un pavillon en lointaine banlieue pour avoir un jardin pour les enfants. Du
coup, ils passent leurs journées en transports en commun et au boulot et leurs
week-ends à faire des courses. Les enfants ne sont donc jamais dans le jardin
puisque dès que les vacances arrivent, le samedi, à 7 heures du matin, ils se
précipitent dans leurs bagnoles pour « partir ».
Je ne raconte pas des bêtises : c’est la stricte
vérité. Je pourrais même être plus méchant. J’en connais qui passent leurs
week-ends chez Ikea et Leroy-Merlin pour rendre la maison plus jolie. Le
dimanche soir, ils sont vannés mais invitent quand même les voisins à un
barbecue pour admirer leurs travaux alors qu’ils passent leur temps à critiquer
les voisins qui n’ont pas choisi la bonne couleur pour les volets.
Ce me rappelle mes voisins : ils passent une
partie de leur temps à jardiner parce que c’est tellement meilleur et moins
cher les légumes et fruits du jardin. Du coup, tous les légumes et fruits
arrivent en même temps et ils en ont beaucoup trop, ils sont obligés de donner
leurs fruits et légumes et c’est moi qui me régale sans dépenser un radis après
avoir glandé toute la semaine dans mon appartement de banlieue.
C’est dommage que je n’aime pas spécialement les confitures.
Qu’est-ce que je vais aller m’embêter à définir ce qui fera
leur bonheur ? Ils sont déjà heureux pour des raisons qui m’échappent
complètement. A contrario, il y en a probablement des tonnes qui se demandent
comment je peux passer des heures derrière un comptoir ou un clavier…
Chacun sa vie.
Après la catastrophe au Japon, le nucléaire s’est invité
dans la campagne. Il y a eu surenchère de propositions pour sortir du nucléaire.
L’électeur se fout du nucléaire : il sait que c’est dangereux mais ne
croit pas à l’éolien. L’électeur a confiance en l’avenir. Je ne sais pas s’il a
raison.
On a vu des militants qui étaient persuadés que l’électeur
allait voter à partir de propositions de sortie du nucléaire. C’est une erreur.
A part 1 ou 2% d’illuminés, personne ne va voter en fonction du nucléaire. Les
écolos, d’ailleurs, devraient se battre sur d’autres fronts, comme les algues
vertes, qui parlent à tous les vacanciers heureux de mettre les pieds dans l’eau
et qui sont significatives d’un productivisme idiot.
Je connais un candidat qui a dit : on va travailler
pour arriver à 50% de l’énergie consommée issue du nucléaire en 2025. C’est
insuffisant me direz vous mais c’est une proposition raisonnée. L’électeur aime
les propositions raisonnées. Il va faire confiance au gugusse qui sort des
propositions raisonnées.
En matière d’écologie, le gugusse en question ne va pas
travailler pour convaincre l’électeur que son projet est le meilleur, juste
pour lui montrer qu’il a des propositions raisonnées. Et pour convaincre les
dirigeants du parti écolo à la soutenir au prochain tour.
La discussion avec mon copain du Front de Gauche que j’évoquais
en début de billet portait sur l’absence de François Hollande à la Fête de l’Humanité.
Il me disait que les militants allaient s’en souvenir au moment du passage dans
l’isoloir.
Heu ? Le militant Front de Gauche va voter Nicolas
Sarkozy au deuxième tour pour faire chier Hollande ? Ah bon…
Je ne sais pas qui prend l’électeur pour des cons mais il ne
faut pas prendre les militants pour des cons : les militants politiques du
Front de Gauche savent très bien que François Hollande ne pouvait pas aller à
la Fête de l’Huma car il s’y serait fait huer. Mais en l'occurrence, on se fout des militants. Ce sont les électeurs qui comptent. Ils se
foutent totalement de cette histoire et c’est leur faire injure que de penser
le contraire.
Ce n’est pas toujours celui à qui on pense qui prend les
autres pour des cons !