Où c'est qu'est l'pognon ?

Après trois billets hier, je ne voulais pas évoquer Nicolas Sarkozy ce matin alors j’ai erré avant de trouver un billet (le bénéfice de Total, de 13 milliards). Du coup, l’indispensable @Careagit me gratifie d’un tweet « Un billet de @jegoun plein de profondeur et d’analyse sur Total. » pour se foutre de ma gueule, ce qui est toujours amusant. Un peu après, il m’envoie un lien vers un billet de blog qui défend Total.

Je résume : Total ne fait que 15% de ses affaires en France, n’a quasiment aucune marge sur l’essence et fait la majorité de sa marge avec le bitume et les lubrifiants ! Et en plus, ce n’est pas de sa faute mais à la grande distribution et y’a le méchant état qui fait rien qu’à prendre des taxes.

Il nous faudra en effet un maximum de lubrifiants pour faire passer tout ça et remettre les choses à leur place. Je me fous de Total. J’en fus même actionnaire à une autre époque et j’ai gagné des sous avec (des bricoles en valeur, quelques centaines d’euros, mais ça faisait beaucoup en pourcentage). Les andouilles de droite ont toujours l’impression que les blogueurs de gauche ne connaissent strictement rien au fonctionnement de l’économie.

Alors je vais lui expliquer.

Mais tout d’abord, qui est @careagit ? C’est (enfin c’était) un jeune blogueur libéral pas spécialement Sarkozyste mais bien à droite contrairement à ce qu’il disait. Les gens ont parfois honte de se déclarer à droite parce que ça les oblige à fréquenter des gens… pas fréquentable. « La droite, c’est le mal » pensent-ils, alors ils ont honte. Il a arrêté son blog quelques temps après l’élection de Nicolas Sarkozy, à peu près au moment du début de la crise… Il n’avait plus grand-chose à défendre au sujet du modèle économique qu’il semblait défendre.

Bon. Je résume.

Total représente juste un symbole. La plus grosse entreprise Française. Ce n’est pas mal de vendre de l’essence, la plupart des gens en mettent dans leur voiture pour aller au boulot. Pour ma part, je vais au boulot en métro, je ne consomme que de l’énergie nucléaire et je me demande si c’est bien mieux.

12 milliards (le bénéfice de Total) est également un symbole (plus difficile à trouver, je le conçois, mais c’est à peu près ce que le gouvernement annonce pouvoir gagner comme pognon à chaque plan d’austérité).

La capitalisation boursière de Total est de l’ordre de 96 milliards d’euros. Cette honorable société fait donc un bénéfice de l’ordre de 12% de sa valeur. C’est très bien, ça fait marcher l’économie et les livreurs de bière peuvent payer du gazole pour livrer la Comète.

Il n’aura néanmoins échappé à personne que 12 milliards est une somme colossale. Kolossal, même. Ainsi, quand je compare ces 12 milliards au budget de certaines missions de l’état ou aux 3,3 milliards d’économie demandés en urgence par l’Europe à la Grèce pour qu’elle puisse ne pas crever dans des douleurs abominables, et même si je le fais avec la légèreté qui me caractérise, c’est quand même un problème que j’aborde dans le fond. Sans profondeur, mais bien dans le fond.

« Où c’est qu’est le pognon ? » « Dans la poche des patrons ! » est un raccourci mais les entreprises du CAC 40 payent en moyenne 8% d’impôt sur les sociétés en France pendant que les PME dépassent la trentaine.

Je vais donc le refaire en Français : il faut arrêter de nous casser les testicules (je parle poliment depuis que mes billets sont repris par des grands médias) avec une crise économique alors que le fleuron de notre industrie réalisent des profits miraculeux, en l’occurrence le deuxième de son histoire, le premier datant de 2008, justement l’année qu’on nous présente comme étant celui du début de la crise…

Il y a donc bien un problème de partage des richesses (ce qui ne veut pas dire spoliation des riches) dans ce pays et de mensonge des politiciens et il n’y a pas besoin de faire des billets de blogs de trois pages pour le comprendre si on a un peu de matière entre les oreilles.

On est au bord du gouffre et on nous fait encore franchir un grand pas, par exemple en augmentant les taxes sur la consommation ou en torpillant le budget de l’Education Nationale, donc la formation de nos enfants.

Il est temps de remettre l’humain au centre de la société. Aussi comparer le bénéfice des sociétés réalisés grâce à l’argent des consommateurs (y compris pour le bitume, ce sont nos impôts qui payent les routes…) avec le pognon qui manque dans les caisses de la collectivité qui regroupe ces consommateurs qu’on accule est réellement un sujet de fond.

D’ailleurs pour acculer à fond, il faut du lubrifiant.

Mais évidemment, quand on est libéral, on ne peut pas le comprendre…