23 novembre 2012

UMP : dix ans d'erreurs, cinq jours de guerre

Nous en sommes au cinquième jour après le vote à l’UMP. On ne connaît toujours pas le résultat. Alain Juppé va prendre la tête d’une commission « non statutaire » qui devra faire le tri dans tout ça. Evidemment, à gauche, on en rigole, tellement la situation est grotesque et tellement « notre » opposition se décrédibilise. Il n’empêche que c’est lamentable. Olivier Mazerolle est parti en live sur BFMTV, hier : « Faut arrêter de rigoler maintenant. Y a un problème politique majeur. Plus personne ne comprend plus rien à ce parti. Plus personne ne fait confiance à personne dans ce parti. Arrêtons parce que la politique française à la petite semaine, y en a ras le bol. […] J'en ai marre de commenter des inepties ».

Il est en effet tant que tout cela cesse. Je me suis engueulé avec un copain Twittos militant UMP, hier. J’ai twitté un truc du genre : « Tiens ! Pendant les primaires du PS, les lascars de l’UMP demandaient l’égalité du tant de parole. » Mon pote a pété une Durit en tentant de m’expliquer que ce n’est pas mieux chez nous, tentant de m’en faire la démonstration en 140 caractères, amenant des « preuves » totalement hors sujet.

Pourtant si, la situation est mieux chez nous. Il n’y a pas à tenter d’argumenter, c’est une évidence. Le bordel est à l’UMP mais les militants sont désespérés. Il est temps que cela cesse. Je m’engueule avec les gens mais je respecte les militants.

Il y a quelque chose de pourri, à l’UMP. Ce parti a été fait pour soutenir un leader, pour organiser des élections interne dont on connaît le chef à l’avance. Tiens ! J’ai cru rêver, hier, en découvrant qu’il existait une Commission Nationale de Réconciliation. Personne n’a vu en rédigeant les statuts de ce parti que l’abréviation donnerait forcément quelque chose du genre CONAR. C’est délirant.

Je pense qu’Alain Juppé devrait y aller franchement et déclarer : « Avec la commission, nous allons étudier tout ce qui s’est passé, mais je ne vois pas comment nous pourrions échapper à un nouveau vote. » Ou « Nous allons valider l’élection de celui qui nous parait avoir gagné mais en lui donnant une mission formelle, celle d’organiser avant six mois une refonte des statuts et de l’organisation des partis, avec un vote des militants, vote qui sera suivi par un autre, conforme aux nouveaux statuts, pour remettre en place une nouvelle équipe dirigeante. »

La fracture et les tensions sont trop fortes. Il faut que ça cesse, non pas pour assurer la survie du parti, dont je n’ai que faire, mais pour que nous puissions enfin avoir un débat politique serein.

L’UMP semble éclater maintenant mais le problème n’est pas nouveau. Dès la création, les conflits sont apparus :  la rivalité entre Dominique de Villepin et Nicolas Sarkozy n’est-elle pas un peu la même que celle entre Jean-François Copé et François Fillon ?

A mon copain, militant UMP, qui explique que « au PS, vous êtes pareil ». Je vais répondre « Non, on n’a pas eu 10 ans de guerre des chefs, on a eu un passage à vide de quelques mois à partir de fin 2008. » Le PS n’a pas eu 10 ans pendant lesquels les projets politiques étaient préparés par des cabinet de communication travaillant pour le candidat. Le PS a tenu de longs débats entre militants puis entre sympathisants, devant tous les Français. Mais, peu importe.

Le deuxième point qui caractérise le mauvais fonctionnement de l’UMP est l’erreur de casting de 2007. Je vais citer mon copain FalconHill, sympathisant de droite : « J'ai aussi honte de voir que cette UMP met en avant, dans les médias, pour défendre l'indéfendable, des Rachida Dati et des Nadine Morano. Bravo la "victoire" de Copé : elle met l'image de la droite républicaine dans des mains consternantes. » Je lui ai répondu qu’il n’avait pas à avoir honte, il n’est pas à l’UMP et il m’a dit qu’il s’était emporté… Je vais néanmoins compléter ma réponse : ce n’est pas Jean-François Copé qui a mis ces deux personnes en avant mais Nicolas Sarkozy en 2007 et il n’y avait pas qu’elles ! Rappelons-nous de Frédéric Lefebvre, par exemple, puisqu’il a su se racheter une conduite après… Et ces ministres d’ouverture ! Et Claude Guéant, Brice Hortefeux et Henri Guaino ?

Nicolas Sarkozy s’est entouré de personnages proches de lui mais bien éloignés des militants et surtout des sympathisants même s’il a gardé des figures emblématiques de la Chiraquie, telles que Michèle Alliot-Marie puis Alain Juppé pour faire joli. Mais la plupart des personnalités mises en avant  n’avaient rien à voir avec ce qu’attendaient les sympathisants, les électeurs…

Le troisième point qui montre le décalage de l’UMP est ce fameux débat sur l’Islam (ou la laïcité). Je dis ça en toute objectivité (comme un blogueur politique peut l’être, hein !), ayant moi-même soutenu dans ce blog la loi interdisant le port de la Burqa et un tas de trucs bien nauséabonds chez les gauchistes. Je ne nie aucun problème. Mais l’UMP, avec Jean-François Copé à la tête, a fait de ce débat la principale cause Nationale… Comme si les Français n’avaient pas d’autres sources de préoccupation.

L’UMP, en dix ans, s’est montré incapable de bâtir un projet politique débattu devant les militants. Pour l’élection de dimanche dernier, les militants ont eu a voté séparément pour le président du parti, une forte personnalité, et un projet politique. Je suppose qu’aucun français, aucun sympathisant, n’a retenu quoi que ce soit des projets politiques en question qui, de toute manière, seront mis à la sauce du patron, sans nouvelle consultation…

Le Parti Socialiste, après sa défaite de 2007, a commencé par se concentrer sur les échéances électorales suivantes, les municipales. Il s’en est bien tiré. Après, il a travaillé à sa reconstruction. On ne va pas dire que ça n’a pas été tendu et il l’a bien payé aux échéances électorales suivantes. Ensuite, il a travaillé sur son projet politique et son mode de fonctionnement. Je ne suis pas membre du PS mais j’ai pu voir, de loin, le travail dirigé par la patronne du parti. Ensuite, il a débattu devant les Français avec six personnalités qui ont porté leur vision de ce projet. La patronne du parti était candidate « par hasard » (suite au retrait de DSK) mais s’est retiré de la tête du parti pendant qu’elle était candidate. Le Parti Socialiste a gagné les élections Présidentielles.

Bien sûr ! On trouvera des choses à critiquer. Tiens ! Les militants ont voté contre le cumul des mandats mais une partie de cadre à refuser de se l’appliquer. François Hollande a lancé sa campagne en déclarant la finance comme ennemi et on attend toujours de voir…

Il n’empêche que l’UMP procède tout à l’inverse. Elle voudrait que les militants désignent maintenant un leader charismatique qui sera nécessairement candidat aux primaires après avoir éventuellement eu la charge de préparer un projet alors que ce projet a été soumis au vote en même temps que l’élection du chef…

J’invite Alain Juppé à en tirer les conclusions. Ce qui a marché en 2002 par hasard et en 2007 parce que le parti avait un vrai leader ne fonctionnera pas. Si j’étais lui, j’organiserais une nouvelle élection, dans trois mois, en encourageant fortement Jean-François Copé et François Fillon à ne pas y participer. Si j’étais eux, j’accepterais volontiers. Martine Aubry et Ségolène Royal n’ont pas gagné les primaires.

Le bordel de cette semaine sera ainsi vite oublié, les rancœurs seront mises de côté. Je dis ça, je ne dis rien… Ca ne se fera pas. Jean-François Copé sera élu parce qu’il semble être celui le plus habile avec les militants. La fracture dans le parti restera en place. Jean-François Copé sera sous les feux de la rampe et les sympathisants, pour les primaires, seront excédés. François Fillon sera opposé à Xavier Bertrand pour le second tour des primaires et ce dernier gagnera car il aura eu toutes les voix de ceux qui se sont battus pour Jean-François Copé qui auront gardé cette rancœur… Xavier Bertrand sera opposé à François Hollande au second tour de la présidentielle, s’il y parvient.

Par exemple.

10 ans, cinq jours. Je ne sais pas.

Pendant ce temps, continuons à rigoler. J’ai trouvé cette vidéo chez mon copain Pierre. Elle m’a bien amusé et est assez significative du fonctionnement de l’UMP.



32 commentaires:

  1. Excellente la vidéo :)

    Par contre je ne suis pas contre à ce que le bordel continue encore un peu à l'UMP, ça m'amuse beaucoup.

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    1. Oui, mais vu comment les militants partent en couilles dans twitter !

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  2. Cette vidéo est un must!
    (Déjà avec les sortie de l'iPhone)

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  3. Et comme chantaient les doors : "This is the end"

    Il y a plusieurs droites à l'intérieure de ce futur ex UMP, cela réclame sans doute plusieurs partis de droite.
    C'est con, après on rigolera moins.

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  4. Bon billet : Et la vidéo est géniale ! Qui c'est l'andouille archi-douée qui a fait ça ?

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  5. Merci pour cette excellente humeur matinale et merci à Pierre pour la vidéo revisitée sauce coco-hé

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  6. Pas mal trouvé, la vidéo. Un peu long peut-être…

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  7. Ce qui est étrange tout de même dans cette élection c'est que bon nombre de ceux qu'on nomme droite humaniste, centriste, sociale tel que Raffarin ont soutenus Copé et que bon nombre de l' aile droite de la droite tel que Cioti ont soutenue Fillon. Mais rien ne m'étonne à l'ump, ils sont interchangeables.

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  8. A l'époque, Sarkozy s'est "emparé" de l'appareil très vite, flinguant tout ce qui dépassait avec la douceur (terrorisante) qu'on lui connait. Seul pilote de l'appareil, il lui a fait prendre une ligne de conduite qui sortait de ses schémas traditionnels. IL a voulu "la rupture", le "Choc", et bien il l'a eu. Sauf que s'écrabouillant (élections), il a sauté en parachute et laissé cette baudruche vide, désormais, se démerder toute seule. C'est peut-être bien ce qu'on voit en ce moment, une sorte d'hydre qui n'a plus de tête mais qui rue n'importe comment et surtout dans les brancards. Comme toi, je crois que le mal est très profond, dans ce parti, et surtout parce qu'il s'est laissé entièrement possédé par un seul personnage.
    Presque l'impression qu'un Villepin pourrait ramener sa fraise, dans ce shéma-là...

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    1. Oui. Ils ont merdé en 2007. Mais un parti politique de majorité n'est pas facile à gérer.

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  9. Ah ben il y a bien longtemps que je n'avais pas autant ri en regardant une vidéo! excellent :-)

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  10. Vidéo excellente même si ce n'est pas facile de lire et d'entendre en même temps (car je comprends l'allemand).

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  11. J’invite Alain Juppé à en tirer les conclusions.

    Rien que ça...
    Reprends une bière plutôt.

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  12. Merci pour la vidéo...
    La droite c'est le culte du chef, le recours à l'homme providentiel. Incarné par Philippe Pétain ou de Charles de Gaulle, plus tard ce sera Chirac ou Sarkozy.
    Attention, je ne suis pas sûr que la gauche soit très différente : en 81, et surtout en 88, elle s'est bien abritée derrière François Mitterand, plus tard Jospin est apparu comme une sauveur en 1997. Je dis attention, parce qu'en ce moment, l'étripage à l'UMP masque un vrai débat, c'est celui de la rénovation politique, la future loi contre le cumul des mandats. Dommage.

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    1. Je résume le commentaire indispensable de l'anonyme : la droite c'est le culte du chef, mais d'un autre côté la gauche aussi.

      Très éclairant, vraiment.

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