Pierre Moscovici a prononcé un important discours, hier,
suite à l’annonce de la révision des objectifs en matière de déficit public. Comme
il a beaucoup tapé sur la gestion de ses prédécesseurs, j’ai trouvé amusant de
diffuser une partie de ses propos, dans mon blog. Evidemment, quelques
commentateurs de droite sont intervenus, sur le thème : ah oui, c’est
facile, nananère, mais on peut aussi revenir sur les machins des gouvernements
précédents, comme les 35 heures.
Soit ! Mais la droite est au Gouvernement depuis 10 ans
et l’économie du pays part en couille depuis 40 ans, dont 15 ans de gestion par
la gauche et 25 par la droite. Les 35 heures faisant en sorte que la France a
la productivité horaire la plus forte, le fait que le déficit commercial de
notre pays, contrairement à celui des Allemands soit plongé dans le rouge
depuis 10 ans et s’y enfonce progressivement aurait tendance à me faire penser que la droite devrait être
plus prudente dans ses analyses…
François Fillon, par exemple, publie un billet incendiaire
sur
son
blog. L'homme de la France en faillite déclare : «
Depuis mai 2012, je n'ai eu de cesse de mettre en garde le
gouvernement contre les déséquilibres de sa politique économique et le risque
de déclin. En septembre, lors de la présentation du Projet de loi de finances
pour l’année 2013, je dénonçais déjà un budget de récession n’assurant ni la
rigueur, ni la croissance. » Il peut dénoncer mais pendant les cinq
ans qu'il a passés à Matignon, la dette est montée de 600 milliards.
Il évoque un risque de déclin mais d’où
vient le déclin ? Qui n’est plus un risque, d’ailleurs, depuis son
passage à Matignon.
En arrivant au pouvoir, en 2007, avec Nicolas Sarkozy,
ils ont commencé par s'asseoir outrageusement sur les règles
européennes en matière de déficit, avec la loi TEPA qui était pourtant
annoncée comme étant une
catastrophe,
et pas seulement par des blogs de gauche. Tiens ! «
Selon EcoWeek, hebdomadaire d'analyse de BNP Paribas, le
paquet fiscal est un « pari risqué » et « Malgré la cohérence apparente de la
stratégie d'ensemble, le budget 2008 représente un pari sur la croissance,
assez risqué dans une économie ouverte à la compétitivité détériorée, notamment
vis-à-vis de l'Allemagne - qui récolte aujourd'hui les fruits de son avance
dans les réformes. [...] sans effet positif sur la croissance, le train fiscal
(entre 12 et 15 milliards d'euros en année pleine) conduirait le gouvernement
soit à une dégradation des ratios de déficit et dette publics - contrairement
aux engagements européens de la France - soit à préserver les finances
publiques au prix d'une politique plus restrictive par ailleurs, ce qui
réduirait sa marge de manœuvre pour mener à bien les réformes structurelles. » »
De fait, quand la crise est arrivée, la France n'avait plus de marge de
manœuvre. La dette est passée de 60 à 90% du PIB. C’est bien son Gouvernement sous l’ordre de Nicolas Sarkozy qui a
volontairement explosé le seuil de 3%.
Cette loi aurait du permettre l'augmentation du pouvoir d'achat et donc de la
consommation sans garantie d'une augmentation de la consommation de produits
Français, donc sans impact positif pour l'économie. Quand la droite s'adonne à
la politique de la demande... Je critiquais cette loi pour des raisons
politiques (la défiscalisation des heures supplémentaires serait une
catastrophe pour l'emploi et je suis un farouche défenseur des droits de
succession) mais la plupart des économistes étaient contre. Même Gilles Carrez,
député UMP, craignait les impacts sur le déficit extérieur.
Ainsi, de 2007 à 2012, on a eu la pure politique budgétaire de l'histoire de la
Cinquième à cause d'une loi emblématique mais débile juste avant une sérieuse
crise économique. On a même eu droit à une des plus stupides réforme de
l'histoire, celle des retraites, qui aurait du nous permettre de sauver le
système. On s'aperçoit maintenant que tout est à refaire...
Le Quinquennat précédent n'avait pas été piqué des vers, non plus. Jacques
Chirac avait commencé par appliquer son programme, avec une baisse des impôts
sur le revenu pour les plus aisés. Toujours la politique de la demande vue par
la droite... Notons qu'on avait eu aussi, à cette époque, une réforme des
retraites, emmenée par François Fillon... A ce niveau d'incompétence, on
devrait faire preuve d'un peu plus de discrétion.
Ainsi, nous avons le
deuxième Gouvernement de suite qui s’assoit sur les règles déficitaires fixées
par l’Europe, je peux estimer qu’une certaine prudence dans leurs propos s’impose.
Un peu de respect se mériterait quand un Gouvernement de gauche, fidèle à ses
engagements électoraux mais contrairement à l’avis de son propre camp, s’efforce
de faire cette action qui est de remettre de l’ordre dans nos comptes.
Pendant toute cette période, on a vu le commerce extérieur passer dans le
rouge, notre industrie laminée, les entreprises fermer et les plans de
licenciements n'en finissent plus. Parallèlement à ça, la politique
Européenne a été une catastrophe, nous arrimant à Angela Merkel, soutenu par
des anglais dont les agences de notation viennent de sanctionner la mauvaise
gestion...
Au fait ! Dernière connerie en date de l'Europe, pas plus tard qu'hier,
ils ont menacé la France de l'envoyer en justice pour une sombre histoire de
TVA sur le disque numérique. Comme si elle n'avait que ça à foutre ! Tiens ! Si
elle pouvait s'occuper de la fiscalisation des entreprises extra européennes
qui font chez nous du commerce par internet. Un de ces jours, mes livres
numériques, je les achèterai chez Google ! Adieu la TVA ?
Il me paraît donc parfaitement légitime
de taper sur la gueule de cette droite française qui nous a foutu dans une
merde noire.
En, revanche, qu'est-ce trouve la droite à mettre sur le dos
de la gauche ? Les 35 heures... Pour le reste, elle ne trouve rien. Elle peut
chercher, les comptes publics et sociaux étaient à peut près à l'équilibre en
2002. Le chômage avait baissé. Certes ! Nous n’étions pas encore sortis de
cette crise qui date du début des années 70 et, surtout, on ne peut pas se
réjouir uniquement parce que le chômage était passé quelques temps au dessous
des 8%... Une nouvelle crise commençait : l’éclatement de la bulle
Internet. Encore, comme celle de 2008 qui continue à nous les briser, un pur
produit du libéralisme ! L’indice boursier significatif correspondant, le
Nasdaq, avait été multiplié par trois entre fin 98 et début 2000 pour revenir à
son niveau normal un an plus tard. Un immense bordel. On avait cru que « rien »
valait « beaucoup ». Que « le numérique », le « virtuel »,
donc, allait remplacer l’économie réelle.
Les 35 heures !
Elles sont restées pendant des années la seule arme de la droite contre la
gauche. Pourtant, quel est le meilleur atout de la France, aujourd’hui ?
Son taux de productivité horaire… Une heure de main d’œuvre en France rapporte 45,4€,
contre 41,5 aux USA et 37 dans l’Union Européenne.
Et qu’est-ce qu’on nous dit ? Que notre industrie n’est
pas assez compétitive. Répétez après moi : notre industrie n’est pas assez
compétitive… La droite française a
réussi le tour de force à imposer ce paradoxe : les entreprises françaises
ne sont pas assez compétitives mais les employés français sont les plus productifs !
Très fort !
Tiens ! Vous connaissez l’AFII ? L’Agence
Française pour les Investissements Internationaux, un machin créé… sous Jospin.
Bref… Son site web est
ici.
Vous pourrez y télécharger
ce
tableau de bord de l’attractivité de la France. Vous pouvez le lire (en
diagonale), on y trouve plein d’informations intéressantes. Je vous les livre
en annexe, suite à ce billet.
La France est la première destination des investissements
étrangers dans l’industrie (
sur
le site du Ministère du Commerce Extérieur). La France est deuxième, toutes
branches confondues, pour les projets d’investissements étrangers, première
pour les indications fiscales, pour le nombre de marques déposées, pour le prix
de l’électricité. La France est troisième pour le transport ferroviaire des
marchandises, le personnel de Recherche et Développement, quatrième pour la
création de nouvelles entreprises (loin des idées reçues, hein !),
La France est un des
pays les plus attractifs au Monde pour les entreprises étrangères et a une des
meilleures productivités horaires mais on nous présente en permanence comme
avec un déficit de compétitivité.
Mon ami Seb Musset dénonce dans
un
billet comment les « médias autorisés » ne parlent que de dette,
de déficit, de relance de la croissance, de retour dans les clous de Bruxelles,
d’un état qui dépense trop, … Et de
retour de compétitivité.
On cherche 10 milliards par ci, 20 par là, … Aucun de ces
spécialistes audiovisuels ne parle de taper dans les niches fiscales (120
milliards), l’évasion fiscale (50 milliards), … « Vu le niveau
élevé de la productivité française (45,4 euros / heure travaillée) et la baisse
continue de la part des salaires dans le PIB depuis 30 ans au profit du capital
(- 9.3 % en 20 ans, soit 100 milliards passés de la main du travailleur à celle
de l'actionnaire), si l'on voulait
inverser la dynamique, remplir les caisses de l'état tout en redistribuant du
pouvoir d'achat pour faire repartir la consommation, il s'agirait
prioritairement de taxer plus fortement le capital, d'augmenter les salaires et
de partager le temps de travail (les 35 heures sont un mythe, la moyenne
d'un temps plein en France est à 41.2 heures). Bref, les trois pistes que l'on
s'interdit "moralement", en persistant à prolonger la stratégie de
l'échec. » Seb évoque plein de choses, notamment la baisse de la
part du travail dans le PBI qui n’en finit pas de baisser, le chômage qui
permet d’exercer une pression salariale,… « Le
salariat implose, la flexibilité s’impose, le travail gratuit s’invite
progressivement dans les consciences. » Je ne vais pas trop le
citer, je pourrais perdre mon statut de blogueur de Gouvernement.
Je vais tenté de conclure.
J’ai parlé d’un rapport de l’Agence Française pour les
Investissements Internationaux. Les données sont bonnes. Les chiffres datent de
2011 et sont donc pour partie à mettre au crédit des Gouvernements de droite.
Parallèlement, ces derniers ont réussi à foutre une merde
notoire dans notre comptabilité publique, détruisant progressivement les
services publics et notre système de protection sociale, soit dit en passant ce
qui fait une part importante de notre attractivité. Ils ont réussi aussi à
faire en sorte que notre commerce extérieur tombe dans la déchéance… La France a
peut-être le plus fort taux de cotisations sur le travail mais le reste de la
fiscalité est totalement à l’avantage des entreprises, des investisseurs et des
plus riches.
Le Gouvernement français a la lourde responsabilité de
devoir mettre de l’ordre dans tout ce bordel mais il n’est pas erroné de dire
que c’est la gauche qui a fait les efforts budgétaires pour rentrer dans l’Europe
(à la faveur d’une conjoncture favorable alors que la droite s’est pris deux
crises dans la gueule) et, surtout, fait en sorte de développer l’attractivité
de la France par la création de l’AFII et en rendant la productivité horaire
bien meilleure… (c’est mon côté pas du tout objectif). Il n’est pas erroné, non
plus, de dire que c’est la droite qui a torpillé non seulement les comptes de
la nation mais aussi le commerce extérieur. Ce sont des faits…
La droite doit
assumer. Elle ne le fait pas.
Alors, je vais maintenant donner
des
nouvelles de l’UMP : «
Le président de
l'UMP Jean-François Copé a invité par courriel les cadres de son parti à une
"audio-conférence" mardi soir prochain. Soit au moment même où doit
avoir lieu le grand meeting de rentrée de son adversaire François Fillon... »
Je n’invente rien. Voilà l’opposition en France…
Jean-François Copé a diffusé
un
communiqué de presse. «
Les premiers
résultats de l’action économique de François Hollande, évalués aujourd’hui par
la Commission européenne, sont mauvais et inquiétants. Qu’attend-t-il pour
changer de politique ? » Ce ne sont pas les premiers résultats de l’action
économique de François Hollande. Ce sont les résultats de l’action économique
de l’UMP pendant 10 ans qui a réussi le tour de force a décaler une partie des
plans sociaux après l’élection. Qu’attend-il pour changer de politique ?
Mais il le fait progressivement. Il réoriente 10 ans de mauvaise politique qui
ont laissé une marge de manœuvre extrêmement faible.
« Ce que l’UMP reproche à
François Hollande, ce n’est pas seulement d’avoir menti aux Français pour
conquérir le pouvoir, c’est d’échouer. C’est ce que montre clairement la
Commission européenne. » Ce n’est pas François Hollande qui a
échoué. C’est la droite française. Ce n’est pas François Hollande qui a menti
pour conquérir le pouvoir mais la droite française, en 2002 et en 2007,
promettant et pratiquant des baisses d’impôts qui n’ont absolument pas relancé
la consommation mais sont parties dans les poches des plus aisés et des
importations d’iPhone et d’autres cochonneries qu’on ne sait plus produire.
« Contrairement à l’objectif
qu’il s’était fixé, la France ne respectera pas son engagement de réduction du
déficit en 2013, tout comme l’Espagne, la Grèce et le Portugal. » Ben
non ! Les dégâts provoqués par la droite étaient trop lourds.
« Au lieu de nous faire
perdre du temps avec le droit de vote des étrangers et les manipulations
électorales pour garder le pouvoir à tous prix, le gouvernement socialiste
ferait mieux de s’occuper de la formation, de la production et de la défense
des intérêts commerciaux de la France, avec l’emploi des Français comme
première préoccupation. » Qui nous a fait perdre du temps, 10 ans ?
Qui nous a plongés dans un immonde débat sur l’identité nationale pour cacher
la misère d’une politique dévastatrice ?
Que l’UMP reste
plongée dans sa propre misère interne et assume ses actes ! Et face preuve
d’un peu d’humilité quand elle s’adresse au Gouvernement et au peuple français.
Annexe – extraits du
rapport de l’AFII
« Avec 40,9 Md$ d’IDE [investissements
directs étrangers] entrants, la France est en 2011 la neuvième destination
mondiale, et troisième destination européenne, derrière la Belgique (89 Md$),
le Royaume-Uni (53,9 Md$), devant l’Allemagne (42,4 Md$) et l’Espagne (29,4
Md$) notamment. »
« Près d’un salarié sur sept
travaille dans une filiale de groupe étranger, et un salarié sur quatre dans l’industrie
manufacturière. Cette ouverture est proche de celle observée au Royaume-Uni,
mais supérieure à celle estimée en Allemagne ou en Espagne. »
« En France, la contribution
des filiales étrangères à l’emploi (13 % en 2009) et à la valeur ajoutée (20 %
en 2009) souligne l’internationalisation de l’ensemble de l’économie. Cette
contribution est plus marquée dans l’industrie manufacturière : les filiales
étrangères y assurent 25 % de l’emploi marchand, et 31 % de la valeur ajoutée
(2009). »
« En 2011, elle a été le 2e
pays d’accueil des activités de R&D après le Royaume-Uni. Accueillant 16,1
% de l’ensemble des projets étrangers de R&D recensés en Europe, la France
devance l’Irlande (14,4 %) l’Allemagne (13,8 %) et l’Espagne (10,9 %). »
« En 2011, avec un PIB de 2
776 milliards de dollars à prix courants, la France est le 5e marché mondial après
les Etats-Unis, la Chine, le Japon et l’Allemagne. »
« La position géographique
de la France et la taille de son marché en font une plateforme de rebond vers
les marchés européens. » « En 2011,
avec 3,3 % des exportations mondiales de marchandises, la France se place au 6e
rang mondial et au 3e rang européen. »
« L’un des atouts de la
France tient aux coûts d’implantation et d’exploitation avantageux qu’elle
offre aux entreprises étrangères. »
« Depuis la réforme du
crédit d’impôt recherche (CIR) en 2008, la France est devenue le pays offrant
le traitement fiscal de la R&D le plus avantageux pour les entreprises. »
« Le classement
international de la qualité de la vie proposé par « International Living »
positionne la France au 2e rang mondial. » « La France est, en 2010, le deuxième producteur européen d’énergie
primaire tirée des énergies renouvelables. »