En salle

21 mai 2013

La lassitude du blogueur politique

Mon confrère Sarkofrance s'inquiète de la lassitude que les blogueurs de gauche pourraient ressentir, notamment les plus proches du Gouvernement. Force est de constater que les blogs sont moins productifs !

Et pourtant...

Tout d'abord, il n'y pas pas que les éternels sujets "droite gauche", les histoires de Cahuzac, les méchants qui manifestent,... Par exemple, j'évoquais hier les corridas et la lutte contre l'extrême droite.

Il y a toujours des sujets. Tiens ! La suite de l'affaire Babyloup. Vous savez, cette femme musulmane qui avait été licenciée d'une crèche parce qu'elle travaillait voilée. La justice lui a donné raison et il y a eu d'autres rebondissements depuis. Figurez-vous que je suis tombé aujourd'hui sur un billet d'Alain Gresh dans le blog du Monde Diplomatique. Il s'inquiète de l'impossibilité pour les femmes voilées d'exercer une activité professionnelle. Les pauvres, elles sont condamnées à rester à la maison et tout ça.

C'est à nous, blogueurs de gauche, qu'il convient de débattre du sujet. C'est extrêmement compliqué. Il n'empêche que voir des gens de gauche défendre des religieux avec des positions extrémistes me fait mal. C'est à nous de défendre les femmes obligées pour des raisons religieuses de mettre un voile. C'est à nous défendre la laïcité.

Sinon, d'autres vont le faire à notre place. Je m'égare. Toujours est-il qu'un blog aussi éminent que celui-là estime que c'est la République qui empêche ces femmes de travailler alors que c'est de toute évidence la religion.

Je m'égare (bis). Je voulais simplement montrer que pour faire face à la lassitude, on peut aussi prendre d'autres sujets. C'est salutaire pour chacun et ça permet de peser sur le débat.

Quand nous étions dans l'opposition, il y a un point dans lequel nous étions excellents : la riposte. Nous sommes maintenant dans la majorité mais il fait continuer à lutter contre la droite, comme nous le faisions avant. Nous devons être l'opposition de l'opposition.

Le blogueur de gauche, lassé de chercher des angles pour défendre le gouvernement (il faut dire que... heu, non rien), peut toujours attaquer la droite. Je vous assure que c'est très facile. Vous cherchez "Copé" dans Google News. Un sujet assuré. Aujourd'hui, par exemple... Il semble vouloir récupérer la manif du 26 pour une opposition globale à la politique du Gouvernement. Comment la cohabitation avec ceux qui veulent continuer à lutter contre le mariage va-t-elle se passer ? Comment l'UMP n'arrive-t-elle pas à se mettre d'accord sur ce qui adviendra de la loi à leur potentiel retour au pouvoir ?

Il y a toujours des sujets...

Je vais tenter de répondre à l'argumentaire en cinq points de mon confrère.

1. Le débat politique est violent.

Il a raison mais il faut faire abstraction de tout ça. Tout d'abord, il faut laisser de côté Twitter et ses éternels roquets. Ensuite, il faut savoir fermer son navigateur et aller boire un coup avec les copains. Il faut aussi aller voir ailleurs dans la blogosphère. Surtout, il faut se dire qu'on a raison (sauf si on s'est manifestement plantés... On a le droit à l'erreur).

Souvent, on prend des baffes de la gauche. Il faut les remettre dans leur contexte : ils ont parfois raison sur le fond mais prônent une politique dont ne veulent pas les électeurs. C'est "nous" qui avons gagné les dernières élections.

2. Le débat politique est futile.

Ben oui, et ? Quoi de nouveau ?

Le blogueur blogue avant tout pour lui. Le blog l'aide à formaliser ses idées. Ce est pas futile.

3. Le débat politique est prévisible. 

Certes ! Ne jamais oublier et se foutre de sa propre gueule si on se fait avoir.

C'est un exercice intellectuel intéressant d'anticiper les réactions à tel ou tel propos.

4. Les résultats d'une politique ne sont jamais immédiats.

Certes.

J'ajouterai qu'on vit dans l'instant. La conférence de presse du Président n'a pas une semaine qu'elle est déjà oubliée.

5. La blogosphère politique est plus sensible encore à ces détériorations du débat.

Ouais. C'est peut-être cela qui est le plus lassant. Il faut réussir à l'intégrer dans la vie du blogueur et oublier.



Par rapport à ce que dit Juan, je vais ajouter un point qui me parait très important.

A part un ou deux billets qui ont de bons échos, le blogueur politique a peu de motifs de satisfaction. Les chiffres d'audience ne montent pas, la contestation reste violente, tout ce qu'a dit Juan reste vrai. La seule satisfaction éventuelle est le gain d'une élection. Et encore, on se demande toujours si les réseaux sociaux sont utiles. 

Alors, il faut continuer. Le blogueur doit bosser pour lui. Quand j'ai créé ce blog, fin 2005, je l'ai fait pour donner mon avis et le faire partager. J'ai tourné les mots dans ma tête et ça a donné le titre du blog. Souvent, j'ai de la contestation : ton blog porte bien son nom, tu n'es pas ouvert,... Je le conçois. J'ai un des blogs avec le plus de commentaires et d'avis contradictoires.

Je continue.

Références :

Le billet de Sarkofrance est à lire ici :
http://sarkofrance.blogspot.fr/2013/05/blog.html
Celui du Monde Diplomatique dont je parle au début là :
http://blog.mondediplo.net/2010-11-12-La-creche-Baby-Loup-la-laicite-et-les-femmes

30 commentaires:

  1. En tant que blogueur de gauche, j'avais écrit sur l'affaire Babyloup. http://labeilleetlarchitecte.wordpress.com/2013/04/02/on-ne-laisse-pas-babyloup-dans-un-coin-laicite/

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    1. Oui. Bon billet que j'avais lu. Ce qui me fait mal,en fait, c'est que je me demande si l'extrême gauche de flirte pas un peu avec l'extrême droite...

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    2. Je me sens proche de Catherine Kintzler qui est très loin d'être d’extrême gauche et encore moins d’extrême droite. Quand je doute, je trouve beaucoup de réponse ici http://www.mezetulle.net/article-28976423.html

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  2. Je vais faire un billet sur le sujet, tu verras, il est assez surprenant :-)

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  3. Bonjour,

    Excellent article qui montre, en effet, ce que nous, blogueurs de gôche, pouvons ressentir, certaines fois. les hoax et autres peoplisations vont bon train, alors que lorsque nous nous cassons pour un billet de fond, nous sommes heureux de dépasser les 2k de "likes" et c'est ben le soucis ; nous sommes en train de nous faire dépasser nous-mêmes par la vampiration de ces réseaux, où l'on arrive à avoir plus de "like" que de lecteurs effectifs du billet en question...

    Peut être monter une "chaîne" entre nous ?

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    1. Non. C'est une perte de temps. Je n'ai jamais compté les likes. Je compte vaguement les RT mais plus pour une appréciation personnelle.

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  4. La solution aux problèmes actuels des bloggeurs de gauche serait de passer à droite.

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    1. Ou de foutre les commentaires idiots dans les spams. Vas chier.

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    2. Jegou, je suis plus sérieux que j'en ai l'air.
      Les blogueurs ont toujours du mal à se renouveler. Puisque vous ne voulez pas changer le fond, changez donc de forme. Sur un blog, on en vient un jour ou l'autre à se répèter. Les sites collaboratifs permettent eux d'évoluer sensiblement, notamment par l'arrivée de nouveaux participants.
      Il me semble que les Français, de gauche comme de droite, ont un penchant à se la jouer perso, d'où l'attrait pour les blogs qu'on ne retrouve peut-être pas ailleurs à ce niveau.
      ca peut être une piste.

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    3. Dis moi, connard, tu es fou. Je suis blogueur. Ce site est un blog. Pas un truc participatif. Si tu n'es pas bien ici, tu vas ailleurs mais tu ne me dis pas ce que j'ai à faire.

      Dernier avis.

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  5. merci pour la réaction. Je ne me lasse pas même si parfois le chemin est rude. ;-)

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  6. Commentaire de DF effacé par erreur :

    Beau billet d'humeur, dont je vais retenir quelques phrases!

    Mais sans vouloir remettre en cause son bien-fondé, le sujet de la lassitude n'est-il pas devenu un marronnier, depuis quelque temps, dans la blogosphère politique?

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  7. L'erreur consiste sans doute à vous être d'emblée qualifiés de "blogueurs de gouvernement", ce qui a un côté "la voix de son maître" qui rebute, car elle enferme dans un discours prévisible: les arguments du gouvernement, tout le monde les connaît, les relire sur des blogs n'apporte rien.

    Il aurait été plus efficace, pour défendre Hollande, de sortir du manichéisme (mais, avec le passé de Juan sous Sarkozy, cela ne lui était pas possible),se présenter en blogueur indépendant (pas nécessairement condamné à n'écrire que sur la politique, d'ailleurs), distribuer les bons et les mauvais points dans tous les camps, et, en 2017, conclure qu'à tout prendre, mieux vaut quand même un PS qu'un UMP.

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    1. Mais non, Élie ! Ni Juan ni moi ne sommes las. Ce qui sont fatigués sont ceux qui sont beaucoup plus critiques que nous sur le gouvernement. Il y a la plupart de ceux qui ont soutenu Martine Aubry ou Martine Aubry à la primaire, les autres sont plus présents, surtout ceux qui soutenu Hollande.

      Blogueur de gouvernement est une casquette qu'on nous a donnée. On l'a prise par défi et ceux qui nous l'ont filée ont abandonné : ils n'ont pas de combat à mener.

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  8. Le jour où tu seras lassé et que tu arrêteras de bloguer sera la fin de la blogosphère mon ami.
    Le blogueur politique peut avoir un coup de mou, ça peut arriver, mais l'actualité politique évolue tellement vite qu'il y aura toujours l'envie et l'enthousiasme pour pondre un billet.

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  9. Je te l'accorde, blogueur de gouvernement est certainement un exercice difficile. Au second tour l'an dernier, beaucoup de ceux de gauche avaient des doutes sur le programme de FH, mais se sont dits que c'était malgré tout mieux que garder le sortant. Or, très vite ils se sont rendus compte que c'était inexact : le nouveau continuait sans en rien changer, en l'aggravant donc, la politique du précédent. Ce qui les a conduits à dénoncer cette dérive, alors que beaucoup d'entre eux avaient permis l'arrivée d'un "homme nouveau".

    Je plains les blogueurs de gouvernement : ils doivent se sentir liés à continuer de rechercher les points positifs de la nouvelle donne, et rien que ceux-ci. Je comprends que ce soit fatigant.

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    1. Tu n'as donc rien compris ni à mon billet ni à la politique... Hollande a été élu pour une méthode, pour la réduction des déficits et tout ça...

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  10. Non, il a été élu contre Sarkozy. Cela n'a rien à voir.

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    1. Faux ! S'il avait prôné une relance, les centristes n'auraient pas voté pour lui et Sarko aurait été élu avec 54%. Ne refais pas trop l'histoire... Il a aussi été élu parce qu'il a gagné des primaires.

      Sinon, tu peux dire qu'en 81, 2002 et 2007, le Président a été élu par rejet de l'autre : au second tour, on élimine. J'aurais pu citer 95, d'ailleurs mais la configuration était un peu différente. 74 aussi...

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    2. Ce que je pense - mais ce n'est que mon opinion - c'est que face à un autre que Sarkozy il n'aurait pas gagné parce que la gauche n'aurait pas voté pour lui au second tour. Moi le premier.

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    3. Face à qui ? Je suis partisan du vote utile au premier tour. Mais peu importe : au second tour, il faut voter pour le candidat le moins loin de ses idées. L'abstention ne résout rien.

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    4. je suis d'accord, une élection se joue sur le perdant. Jospin aurait fait perdre Sarkozy en 2007. En 2007, c'est Ségo, avec tout le respect que je lui dois, qui a perdu. En 2012, c'est Sarkozy. Nicolas a raison, il me semble. Enfin, tant que le vote blanc et nul n'est pas reconu, ne pas voter, même si on cela se comprend, est potentiellement dangereux et augmente artificiellement un parti comme le FN.

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    5. Ça changera quoi avec la reconnaissance du vote blanc ? Il faut bien des élus.

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    6. Ce qui est pervers, c'est le second tour.

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    7. Ouais. Il faut donc de la proportionnelle.

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