La construction Européenne a été bien lancée au lendemain de
la guerre mais est partie en sucette ensuite. Elle ressemble parfois à n’importe
quoi et semble souffrir d’un manque de démocratie qui pourrait aboutir à ce qu’elle
nous pète à la gueule prochainement, ce qui serait dommage pour les musaraignes
et les pizzas à l’andouille.
Tout allait bien jusqu’à 1973 mais cette année a été marquée
par deux événements : une crise économique et l’entrée d’autres pays
dans l’union dont le Royaume-Uni. Les Etats ont mené des politiques bien
différentes, notamment quand Tata Thatcher et Tonton Mitterrand étaient au
pouvoir dans leurs pays réciproques.
Et est arrivé Maastricht. Ah ! C’était bien ! On
va avoir une monnaie communique, on est tous frères, l’Europe avance, ça s’arrose.
Mais on a oublié de regarder les petites lignes, voire entre les lignes. D’une
part, le fait d’avoir une monnaie unique nécessitait des critères de
convergences (notamment le fameux 3% du déficit). Ils ont été fixés
arbitrairement car il n’y avait pas d’autres solutions… D’autre part, les
institutions sont devenues bien trop illisibles : j’en ai fait des
billets.
Après Maastricht, il y a eu le traité l’Amsterdam puis celui
de Nice pour améliorer un peu le fonctionnement et enfin celui de Lisbonne qui
a remplacé la constitution qui avait été refusée par referendum. Le traité, du
fait qu’il s’appelait « constitution », contenait un tas de textes
antérieurs qui devenaient gravés dans le marbre. Il introduisait un contenu
politique alors qu’une constitution doit se limiter ou presque au
fonctionnement des institutions. « Lisbonne », s’il améliore le
fonctionnement des institutions, il reste totalement illisible et est une usine
à gaz et il lui sera toujours reproché d’avoir été imposé par la force contre
la volonté des peuples.
Il y a eu, enfin, le traité sur la stabilité, la
coordination et la gouvernance (le TSCG), le fameux machin signé par Nicolas
Sarkozy, que François Hollande avait promis de négocier mais n’a pas eu
satisfaction et qui a fini par être ratifié par le Parlement avec une foireuse
promesse de pacte de croissance. Il a beaucoup été critiqué mais, à mon avis, à
côté de la plaque : il a rendu obligatoire ce qui l’était déjà avec le
traité de Maastricht, suite à la crise de la zone euro.
Les deux derniers traités ont renforcé le sentiment (je ne
juge pas du fond) de la construction d’une Europe par des élites, contre le
peuple, et donc totalement antidémocratique.
Mais le principal fautif est bien Maastricht. Les « pères »
pensaient que de cette union monétaire suivraient une union fiscale et une
union sociale. C’est raté. Et le fait que Maastricht soit coupable, cela rend
illisible les critiques de ses successeurs.
Un déficit de démocratie ?
Je ne sais pas s’il est réel mais, c’est comme pour la
sécurité, le sentiment d’insécurité et le sentiment d’absence de démocratie
sont bien réels !
La conséquence est le populisme dont je parlais et le fait
qu’on fasse dire n’importe quoi à l’Europe quand ça arrange mais de l’oublier
totalement quand elle va dans le bon sens. Par exemple, l’opposition de
gauche à l’Aéroport de Notre-Dame-des-Landes ne dit pas que c’est à cause de
textes européens qu’elle va finalement probablement avoir gain de cause…
L’Europe doit donc combler ce déficit. Ou ce sentiment… On
ne doit plus pouvoir dire : la Commission impose aux Etats de respecter la
règle d’or alors qu’en adhérant aux différents traités les Etats se sont
engagés à ne pas dépasser un taux de déficit et un taux de dette. On ne doit
plus pouvoir dire : la troïka impose des conditions inadmissibles quand on
prête du pognon aux Etats pour les sauver alors qu’ils n’ont pas respecté des
engagements. Ce qui n’empêche nullement de critiquer les mesures prises ou la
politique menée.
Sinon, l’Europe va exploser ce qui pourrait passer pour pas
trop grave si les conséquences étaient vraiment évoquées. Je reste persuadé que
l’union fait la force. Par exemple, on parle beaucoup du traité transatlantique
en cours de négociation mais il me semble que face à la mondialisation, les
pays occidentaux doivent aussi se protéger des économies émergentes…
Ce que je propose ?
Mes propositions ne serviront à rien, ce qui fait l’intérêt
de pouvoir raconter n’importe quoi dans un billet de blog.
Premier volet : que l’Europe s’occupe de ses fesses !
Je n’ai pas pris l’exemple de Notre-Dame-des-Landes au
hasard. Pourquoi des directives européennes vont-elles nous empêcher de
construire un aéroport parce qu’on met vaguement en danger une musaraigne qui
est de toute manière en voie de disparition pour un tas de raisons liées aux
activités humaines ? Je sais : on pourra trouver un tas de raisons
valables et démocratiques. De même qu’on pourra en trouver à l’Allemagne pour faire
tourner des centrales à charbon ayant un impact sur la santé des Français quand
les méchantes particules volent vers nous…
A contrario, il faut qu’elle ait des compétences bien plus
fortes dans certains domaines. Par exemple, je veux être pour la libre
circulation des biens et des personnes, c’est un peu son but, mais, dans ce
cas, il me semble évident :
-
que l’immigration doit être du ressort exclusif
de l’Europe,
-
que la fiscalité et les conditions
légales de la vente de biens soient unifiées.
Deuxième volet découlant du premier : la
construction européenne doit se poursuivre dans les domaines sociaux et
fiscaux.
Je ne vais pas épiloguer.
Troisième volet : des institutions lisibles
Petit 1 : le Conseil de l’union européenne, qui
regroupe les ministres des différents Etats, doit disparaître en tant qu’institution.
Il n’a pas la légitimité démocratique. Ca n’empêche pas les ministres de se
réunir pour débattre et faire des propositions mais ce machin n’a pas vocation
à avoir un tel rôle dans les institutions.
Petit 2 : en conséquence du petit 1, le Conseil
européen, qui regroupe les chefs d’Etat, doit avoir son rôle renforcé, pour
reprendre totalement la représentation des Etats dans les processus de
décision. Le Conseil européen doit avoir les pleins pouvoirs en matière de
politique internationale et sur le volet « recettes » du budget.
Petit 3 : la Parlement doit avoir des élections nationales
(et non pas régionales, comme chez nous…) sur scrutins de listes présentées par
les partis européens, sur la base de programmes et de projets élaborés par les
partis européens. Le Parlement doit avoir les pleins pouvoirs sur le volet « dépenses »
du budget.
A ce propos, j’ai lu le programme de l’UMP, ce week-end (ben
oui, j’avais bien lu celui du Parti Socialiste Européen, mais je n’ai pas
trouvé le projet du PPE). C’est n’importe quoi.
Petit 4 : la Commission européenne doit ressembler plus
au Conseil des ministres en France (et dans d’autres pays). Globalement, après
les élections pour le Parlement, le Conseil européen doit choisir un président
de la Commission en fonction de leur résultat. Ce dernier devra proposer des
membres d’une Commission en fonction de la politique qu’il souhaite mener suite
à l’élection et la faire valider le Conseil puis par le Parlement, devant qui
elle sera responsable. Appelons-là « Gouvernement » plutôt que « Commission ».
Petit 5 : les statuts de la BCE doivent être du ressort
du Conseil et du Parlement et plus des traités (en gros, hein !).
Petit 6 : le traité décrivant les nouvelles
institutions ne doit pas faire plus de deux pages.
Petit 7 : le président de l'Europe doit être celui du Parlement, sinon, ça fait trop. Comme tout bon président, il ne doit avoir aucun pouvoir sauf celui de représentation. Le président de la Commission doit trouver un autre nom. Commissaire en chef ?
Quatrième volet : vers l’Europe fédérale et
confédérale, et hop !
Je ne dis pas qu’il faut y aller maintenant mais il faut
poursuivre la construction européenne en pensant à ces bricoles. Ce n’est pas
un gros mot, il s’agit de définir qui est compétent en quoi…
Pour résumer, la situation actuelle est grotesque : l’Europe
pond des directives qui doivent être retranscrites dans le droit des différents
Etats. Cela renforce le « c’est à cause de l’Europe ». Ca serait plus
simple si l’Europe pondait directement des lois…
Prenons notre exemple de musaraigne qui menace l’aéroport.
Les autorités françaises jugent que l’aéroport est conforme à la loi française
sur les musaraignes mais un recours est porté par les opposants auprès de la
Cour de justice de l’Europe parce qu’elle serait contraire à la directive
européenne sur les musaraignes. Si l’Europe a à légiférer sur les musaraignes,
pourquoi avoir fait une loi nationale ? Il n’empêche que l’Europe pourrait
dire (voir le premier volet) : je n’en ai rien à cirer de vos musaraignes
et laisser chaque Etat légiférer à propos de ses propres musaraignes.
Et les confédérations ?
Prenons l’exemple d’une confédération que nous pourrions
monter avec l’Italie à propos des pizzas à l’andouille. Compte tenu des
échanges internationaux, il est logique que l’Europe légifère sur la sécurité
sanitaire des aliments. Par contre, c’est bien aux Etats de légiférer sur leurs
propres spécialités (les pizzas pour l’Italie et les andouilles pour la France).
Cette confédération pourrait nous permettre de légiférer entre les deux pays
pour les pizzas à l’andouille. On pourrait l’étendre à toutes les gastronomies
française et italienne qui sont largement les meilleures d’Europe, avec celle
du Maroc, nos accords bilatéraux au sein de la confédération pourraient faire
en sorte que l’Italie soit spécialisée dans les escalopes de veau à la
milanaise et nous dans les escalopes de veau à la Normande, que, dans un monde
idéal, nous pourrions décentraliser au sein de la région concernée pour éviter
les trolls normands.
Ils sont bien, mes exemples, aujourd’hui, non ?
Ca ne vous donne pas envie, une Europe, comme ça ?
(billet inspiré par celui de mon confrère
Sarkofrance).