15 avril 2014

Comment le CSA veut [ou pas] contrôler les vidéos sur le web ?

Le CSA a publié son rapport annuel. Il fait hurler les blogueurs réactionnaires qui crient à la censure socialiste et certains sites geeks, comme Numerama qui explique en titre : « Le CSA dresse la liste de ce qu'il veut contrôler sur Internet. » Vous pouvez lire, ça fait peur ! « Dans son rapport annuel, le CSA dresse la liste des domaines d'expressions dans lesquels il entend pouvoir exercer un droit de regard et de censure sur Internet. »

Rien que ça !

La vérité est tout autre. Nous avons actuellement des braves sociétés autorisées à émettre du contenu audiovisuel par le câble, le satellite, la TNT,… Ils ont un tas de contraintes : contribution à la production, délai de diffusion d’un film après la sortie, respect de règles de concurrence, obligation de distribuer certaines chaînes gratuites si l’émetteur en fait la demande et tout ça.

Avec l’arrivée d’internet, de nouveaux diffuseurs de contenu apparaissent et se multiplient sans qu’ils soient totalement sous le coup de la loi définition les attributions du CSA, notamment avec la diffusion à la demande.

Le CSA propose donc de mettre en œuvre une convention entre eux et lui, sans obligation. Cette convention contiendra des contraintes et des avantages. Globalement, les contraintes sont les mêmes que celles qui portent sur les autres diffuseurs, notamment par câble et par satellite, sur la promotion des services,... D’une manière générale, les engagements et avantages seront à la carte. Tu fais tel engagement, tu as tel avantage.

Les contraintes tournent autour du respect de la dignité humaine, de la protection de l’enfance,… Par exemple, ils pourront s’engager à ne pas diffuser de vidéo pornographique. Les avantages tournent autour de la facilité d’accès à la production, à la diffusion,… et la création d’un label « site de confiance » qui devra être utilisé par les services de contrôle parental.

En gros, vous pouvez donner la télécommande de votre télévision à votre gosse, il n’aura pas accès à un film de cul. Avec ce label et cette loi, cela sera pareil. Vous pourrez donner votre PC à votre môme, il ne risque pas de tomber sur un truc pas sain.

Et voila pourquoi certains geeks ou certains réacs crient au loup, à la censure, pire !, à la censure socialiste ! Ils s’imaginent que vos vidéos personnelles seront sous la coupe du CSA…

Cela n’a rien à voir sauf pour un détail : le CSA propose en plus d’avoir dans ses missions la vérification de la légalité de tout contenu vidéo sur le web, indépendamment de convention pour les diffuseurs numériques.

Je remercie Corto pour ses cris qui n’auront pas manqué d’agiter ses commentateurs habituels. Je ne vais pas l’accuser : il reprend l’article de Numérama qui est à la limite du mensonge quand il écrit : « Ce ne sont plus seulement les vidéos professionnelles qui seront soumises à la régulation du CSA, mais aussi vos vidéos personnelles. » C’est parfait pour faire hurler le lecteur mais le CSA n’a rien à cirer de la vidéo de votre belle mère qui se casse la gueule dans l’escalier. Ce ne sont pas les vidéos qui sont soumises à la régulation mais les sociétés qui auront signé une convention.

Ces sociétés respectent déjà les contraintes légales : droits d’auteurs,… En plus, des boites comme Youtube autorisent beaucoup moins de contenu que la loi française. Ces américains sont très pudibonds… Elles signeront avec plaisir (et avidité) la convention sans changer une ligne des contrats (les fameuses CGU) qu’elles ont avec leurs utilisateurs…

Mais auront un statut de diffuseur numérique, si elles le veulent, comme tous ceux qui diffusent du contenu en dehors d’internet.

La belle affaire !

Dans le détail

J’ai lu les propositions avant de faire mon billet. Je vais positiver et présenter ce qu’ils soumettent au Gouvernement (et pas ce que le Gouvernement propose). Tout d’abord, il s’agit de modifier une loi de septembre 1986 donc faite par la droite du temps de Charles Pasqua et tout ça.

Article 1

Il s’agit de définir de quoi on parle, la protection de l’enfance et tout ça. Actuellement, la fin est rédigée ainsi : « Les services audiovisuels comprennent les services de communication audiovisuelle telle que définie à l'article 2 ainsi que l'ensemble des services mettant à disposition du public ou d'une catégorie de public des œuvres audiovisuelles, cinématographiques ou sonores, quelles que soient les modalités techniques de cette mise à disposition. »  Le CSA propose de remplacer « quelles que soient les modalités techniques… » par « par voie numérique », en gros ! Tu parles d’une révolution !

Article 15

En gros, il concerne les programmes télé et les contrôles que peut faire le CSA. Le CSA propose d’ajouter un nouvel article pour dire qu’il est autorisé à lancer une concertation pour définir le pendant pour contrôler les vidéos sur Internet. Tu parles d’une révolution.

En gros, ça veut dire que les contraintes de diffusions de vidéos sur internet seraient les mêmes qu’à la télé, en plus des obligations légales (ou plutôt des interdictions légales : pédophilie, haine raciale,…).

Article 3-1

C’est un peu dans le désordre, leur truc !

Au début, l’article définit ses missions. Le CSA propose d’y ajouter : « et la promotion des
services audiovisuels numériques ».

A la fin, il propose de mettre : « Le Conseil supérieur de l’audiovisuel, afin de garantir la promotion des services audiovisuels numériques, fixe des options établissant les engagements que les services audiovisuels numériques peuvent prendre et les avantages dont ils peuvent bénéficier en contrepartie de ces engagements. » Ensuite, ils décrivent ce que peuvent être ces engagements. »

Tout tient en deux mots : « peuvent prendre ». Aucune obligation nouvelle.

La suite décrit les avantages et les engagements en question.

Ensuite, et c’est là que ça devient intéressant… : « Le Conseil supérieur de l’audiovisuel peut délivrer, dans les conditions qu’il définit, à la demande des éditeurs de services audiovisuels numériques, un label dit « site de confiance » permettant aux usagers d’identifier les services qui s’engagent à respecter des obligations complémentaires aux règles fixées par le Conseil en matière de protection de l’enfance et de l’adolescence, notamment la signalétique. »

La loi proposerait ainsi que le CSA puisse délivrer un label « site de confiance ». Tu parles d’une révolution ! D’une censure !

Ensuite, ils décrivent ce que pourraient être les aspects légaux de cette convention.

Article 34-4

Il est un peu chiant mais il traite de la diffusion des programmes en clair (TNT, satellite, câble…). En gros, ces braves gens n’ont pas le droit de refuser de diffuser des trucs gratuits si on leur demande et s’ils sont autorisés. Le CSA l’adapte à internet. Tu parles d’une révolution !

Article 2-1

C’est vraiment dans le désordre. Actuellement, il définit ce qu’est un distributeur de services sous le coup de cette loi. Ils le font évoluer pour définir les distributeurs de services audiovisuels numériques. Tu parles d’une révolution !

Article 17-1

Il décrit le traitement des différends entre les acteurs (éditeurs, diffuseurs, prestataires,…). Ca serait étendu aux diffuseurs numériques… Tu parles d’une révolution.

Article 28

Il porte sur la convention entre la société qui diffuse (TNT, satellite, câble,…) et le CSA. Le CSA propose d’adapter cette convention aux diffuseurs numériques d’autant que ça porte sur l’obligation de mise à disposition du public... Tu parles d’une révolution.

Articles 28 et 33

Allons bon ! Le 28 est modifié deux fois. Ils ont bu ?

En gros, c’est relatif aux obligations de contribution à la production. On s’en fout.

Article 17-2

Il serait tout nouveau ! On a vu le 17-1 plus haut… On s’en fout : le CSA propose de veiller aux bonnes conditions du respect de la concurrence.

Autres modifications

Elles ne nous concernent pas vraiment ou à la marge, comme l’obligation de diffuser Arte…

7 commentaires:

  1. Numerama est remarquable mais il est d'un certain naif libertarien...

    RépondreSupprimer
  2. 2 commentaires... billet non convaincant peut etre...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. On s'en fout ! Je ne suis pas là pour faire démarrer une meute de fans au quart de tour. Ton billet est grotesque et digne d'un trou du cul qui n'analyse rien. Si ça te fait plaisir...

      Supprimer
    2. Corto, t'es vidéos de cuĺ n'intéressent pas le CSA, ni personne d'ailleurs!

      Supprimer
    3. Il ne se paluche plus avec des vidéos de cul mais avec des commentaires.

      Supprimer
  3. Petit rappel aux pseudos libéraux naïfs, la loi n'est pas une contrainte à la liberté mais la condition de la liberté.

    RépondreSupprimer

La modération des commentaires est activée. Je publie ceux que je veux. On ne va pas reprocher à un journal de ne pas publier tous les courriers des lecteurs...