Dans son discours, hier, Manuel Valls a dit qu’il voulait
rapprocher les intercommunalités des bassins de vie. Plus précisément, il a
dit : « Une nouvelle carte intercommunale,
fondée sur les bassins de vie entrera en vigueur au 1er janvier 2018. »
Personne n’a posé la question de savoir ce qu’est un bassin de vie ?
Heureusement, Partageons mon avis est là pour vous rendre
service. Vous noterez d’ailleurs que c’est à peu près le seul média à
évoquer ce genre de trucs alors qu’il est essentiel. On dit souvent qu’il y a
trop de communes en France, 36000 !, contre un peu plus de 10000 en
Allemagne, 8000 en Espagne et en Italie, 300 au Royaume-Uni. Discrètement,
notre Manu national est entrain de nous mettre en place 1500 bassins de vie ou
intercommunalités pour les remplacer.
Qu’est-ce un bassin de vie ?
Pour résumer, c’est un territoire géographique d’où la
plupart des gens n’ont pas besoin de sortir quotidiennement pour le travail.
Par exemple, en région Parisienne, la petite couronne est un bassin de vie.
Il est composé d’environ 9 millions d’habitants. En province, les bassins de
vie sont plus petits. Par exemple, on peut considérer que le bassin de vie de
Loudéac, ma ville natale en Centre Bretagne, est composé de 50 000
personnes, sur un territoire allant de Merdrignac à Saint-Caradec.
Je reviendrai sur la définition géographique de ce
bassin de vie plus tard puisque, le connaissant, je l’utilise à titre d’exemple
pour ce billet.
Dans la pratique, selon Wikipedia, Bassin de
vie est un jargon administratif créé en 2003. C’est utilisé pour les
statistiques par l’Insée et pour l’aménagement du territoire par la Datar.
Concrètement, cela n’est pas une collectivité territoriale ou une subdivision
administrative de la France. Ce n’est qu’un territoire géographique utilisé
pour la commodité des administrations.
Il y a, par contre, une subdivision administrative, définie
par la loi, qui lui ressemble. C’est le pays.
Qu’est-ce qu’un pays ?
A l’origine, ce sont des subdivisions de la Bretagne. Je ne
suis pas chauvin mais pour les autres régions ou provinces, je ne sais pas. Je
précise que « provinces », surtout quand il est mis au pluriel, n’est
pas péjoratif : ce sont les anciennes divisions administratives du pays et
il y a un tas de pays (au sens « nations ») qui utilisent ce mot. Le
mot « pays » (au sens local) est un mot que j’utilise souvent mais
qui a plusieurs significations.
Toujours est-il qu’en Bretagne, nous avons trois types de
pays, les pays historiques, les pays
traditionnels (voir l’illustration) et… les pays définis par la loi. Ils
ont été créés par Charles Pasqua en 1995 mais c’est Dominique Voynet, si j’ai
bien compris, qui leur a donné un rôle administratif (avec la loi d'orientation
pour l'aménagement et le développement durable du territoire (LOADDT) du 25
juin 1999).
Le millefeuille !
La constitution prévoit trois échelons administratifs en
France : la région, le département et la commune, qui sont aussi des
collectivités locales, avec, en plus, les EPIC qu’on appelle aussi les
intercommunalités (agglomérations, métropoles, syndicats ou communautés de
commune) fixées par la loi. M. Pasqua puis Mme Voynet ont ajouté un
échelon : les pays (M. Borloo avait modifié ça, aussi, je crois).
Le millefeuille est donc composé non pas de quatre échelons,
comme je le pensais, mais de cinq, avec ces foutus pays.
A cela, il faut ajouter d’une part les subdivisions de la
commune, comme les quartiers (qui ont souvent des conseils de quartier) mais
surtout les arrondissements de Paris, Lyon et Marseille et les secteurs de
Marseille, et d’autre part :
-
les cantons,
-
les circonscriptions élections
législatives,
-
les sous-préfectures et leurs
arrondissements,
-
les circonscriptions pour les élections
européennes.
Je fais un aparté mais il serait intéressant que le
législateur poursuive le ménage. On peut supposer que les pays seront la base
des bassins de vie de la réforme de Manuel Valls, donc des futures
intercommunalités. Les cantons devraient disparaître avec cette réforme et les
circonscriptions européennes pourraient être calquées sur les nouvelles grosses
régions. Si vous avez lu mon billet de ce matin, vous en déduirez que
sous-préfectures pourraient évoluer en représentants de l’Etat de proximité.
Quant aux circonscriptions législatives, il faudrait trouver quelque chose…
Le pays, alors ?
Le pays est un territoire entre le canton et le département.
N’allez pas croire que je cite de mémoire, j’ai Wikipedia
dans la poche. Retenez votre respiration : « Le
pays est une catégorie administrative française d'aménagement à caractère
géographique désignant un territoire présentant une « cohésion géographique,
économique, culturelle ou sociale, à l'échelle d'un bassin de vie ou d'emploi »
afin d'exprimer « la communauté d'intérêts économiques, culturels et sociaux de
ses membres » et de permettre l'étude et la réalisation de projets de
développement. »
Relisez la définition. Il est bien basé sur le bassin de
vie, a priori.
Les pays « restent des
acteurs efficaces et reconnus du développement local sur le territoire
français, particulièrement en milieu rural. »
En gros, ce sont des groupements d’intercommunalités. Créés
par Pasqua en 1995 : « afin de créer et
promouvoir un développement global et durable du territoire concerné et de
favoriser les relations entre pôles urbains et arrière-pays rural. Ils
résultent d'une démarche ascendante et volontariste des acteurs locaux
souhaitant s'unir autour d'un périmètre pertinent (bassin de vie) afin de
dynamiser le territoire par de nombreux projets (emploi, santé, qualité de vie,
tourisme, habitat, patrimoine, aménagement du territoire, environnement…). »
Le pays de Centre Bretagne
Je suis désolé mais il me faut bien trouver une
illustration. C’est le groupement de quatre intercommunalités autour la
Cidéral, l’intercommunalité de Loudéac qui en est le chef lieu (j’ignore la
nomenclature officielle, disons le siège administratif) de même que celui du
pays.
Il y a même un site
web. Pour les Loudéaciens, je précise que le siège est bd de Penthièvre (la
route de Saint Brieuc), vers la piscine. Je le découvre aujourd’hui !
Je vous en ai fait une jolie carte, à droite, là, sur la base des communes
qui composent les intercommunalités actuelles. Un point rouge par commune, une patate pour Loudéac et un contour... Il faudra faire un peu le ménage
dans les découpages : nous sommes répartis sur trois arrondissements et
trois communes du sud du département ne sont pas dans les intercommunalités du
département. Tant pis pour elles.
Il n’empêche que pour ceux qui connaissent le coin, cela
ressemble à un ensemble cohérent. On aurait à l’ouest, un bassin de vie centré
sur Dinan (le « Pays de Dinan »
qui regroupe déjà plusieurs intercommunalités du coin), au nord, un centré sur
Saint Brieuc (le « Pays de
Saint Brieuc » qui regroupe déjà plusieurs interco dont celle Penthièvre où
siège David dont je parlais ce matin…) et ainsi de suite…
En résumé
« Un bassin de vie peut donc
être considéré comme l'espace délimité par l'aire d'influence d'une ville. »
T’as vu ça ? Loudéac est vachement influent.
J’imagine Gérard Huet ou Guy Le Helloco présidents de ce
truc. Mieux ! On pourrait récupérer une sous-préfecture. D’un autre côté,
si on compare à Paris, ça fait plaisir de voir Loudéac passer au rang de
métropole… Il faudra que nos législateurs trouvent un nom pour ces nouvelles
entités. Bassins de vie, intercommunalités, Etablissements publics de
coopération intercommunale, EPIC, pays,…
Pays me va bien. Par contre, il faudra être plus détaillé,
pays par pays. Pays de Loudéac pourrait vexer les habitants des autres bleds. Pays
de Centre Bretagne est bien joli mais il n’est pas bandant et nous ne sommes
pas Bayrou, c'est-à-dire le centre à nous tout seul, de même que nous ne
pouvons revendiquer « pays d’Argoat » (qui veut dire, en gros « Bretagne
Intérieure »). Le nom est important. Il est un marqueur. Pour Saint
Brieuc, Dinan,… c’est facile : ces villes sont largement les plus grandes
du coin. Loudéac est la plus grosse « du pays » mais pas « beaucoup
plus ». Affaire à suivre, comme toutes les autres villes de France…
Arrondissements m’irait assez bien aussi avec tout ce que
cela implique, donc la présence de l’Etat avec l’équivalent de sous-préfectures
pour compenser l’éloignement du département et les conséquences (voir mon
billet de ce matin).
Il y a 1666 bassins de vie en France dont 1287 qualifiés de
ruraux (ce qui veut dire qu’il faut des bottes pour y aller). On dirait un
nombre raisonnable de communes… Ces
nouveaux machins seront au centre de la réforme territoriale annoncée par
Manuel Valls.
Concrètement, ils seront montés par fusion des
intercommunalités existantes (ça va négocier durement et ruer dans les
brancards…) et seront amenés, dans le nouveau paysage de la France, à devenir
les interlocuteurs des autres échelons, soit administratifs de l’Etat, soit collectivités
territoriales, comme les futures grandes régions.
On n’est pas sortis de l’auberge.
Je n'ai évidemment rien lu, parce que je m'en branle, d'une part, et parce que je pense à mon chien que je vais faire tuer demain. Néanmoins, je vous ai piqué votre titre pour mes Modernœuds…
RépondreSupprimerAh merde. Désolé. Ça fait beaucoup.
SupprimerPour le titre (je ai pas lu votre billet), j'ai chercher des trucs genre : passez moi le bassin, m. Valls. Mais je n'ai rien trouvé de valable. Alors je l'ai laissé à votre imagination.
Tu es maintenant Le blogueur spécialiste du zonage d'étude. Bravo. http://www.insee.fr/fr/methodes/default.asp?page=zonages/bassin-vie-2012.htm
RépondreSupprimerÇa s'arrose. Cela étant j'ai passé quelques heures à étudier le truc pour tenter de vulgariser. Je n'ai pas besoin qu'on me colle des liens.
SupprimerNe le prends pas mal, c'est juste pour ceux qui veulent en savoir plus d'un point de vue méthodologique, rien à voir avec l'aspect politique et t faire de la pub à ce petit institut. Désolé.
SupprimerBah. Je ne prends rien mal. Je suis un trop ancien blogueur pour ça. Par contre ce qui me gonfle, ce sont les types qui pensent que je peux faire un tel billet en cinq minutes (je ne parle pas pour toi). Demain, je serai debout à quatre heures pour faire mon job parce que j'ai perdu du temps aujourd'hui sur le blog. Je finis donc chatouilleux.
SupprimerHé ben moi je ne suis pas comme certains, j'ai lu. et je trouve ça très intéressant. Notamment parce que je connais (un peu ) Loudéac.
RépondreSupprimerBeaucoup appellent déjà l'espace de vie dans lequel ils vivent et travaillent "Pays" d'ailleurs.
Ça ne va pas rajouter une tartine sur les autres en changeant rien du tout ?
(Tiens pour le bassin de Dinan,c'est à L'est, je veux dire par rapport à Loudéac)
Merci. Oups pour Dinan. Appelle aussi "pays" Loudéac couramment.
SupprimerEh, moi aussi j'ai lu, tiens ! Je dis le contraire juste pour frustrer le gros.
SupprimerQUI EST GROS ?
SupprimerPar contre, c'est quoi cette merde ? (Enfin la carte de l'article ci dessous, j'ai pas lu l'article, mais ça m'a fait bondir...)
RépondreSupprimerTu veux une révolution ou quoi ? (bon entre temps je lis et je reviens)
http://www.ouest-france.fr/fusion-des-regions-la-grande-region-ouest-de-jacques-auxiette-2114404
Oui. Je veux une révolution. Il faut arrêter de confondre la Bretagne en tant que région historique et une nouvelle région "grand ouest".
SupprimerC'est le feu aux poudres garanti, ce truc.
SupprimerBah.
SupprimerIl m'arrive d'évoquer le sujet: car la culture régionale est essentielle selon moi, nous sommes donc d'accord et non.
RépondreSupprimerUn exemple: la Bresse est à la fois Rhône-alpine, bourguignonne et franc-comtoise, néanmoins, elle existe et si elle devait choisir, elle serait de Rhône-Alpes.
Un autre exemple: le Charolais est à cheval sur l'Auvergne et la Bourgogne.
Le Bourbonnais est complétement différent de l'Auvergne.
Chez moi, on appellait ça le Val d'Amous ou Val d'Amour, faisant partie de l'ancien pays du Lyonnais.
Comment tu fais vivre tout ça, qui existe encore, dans la fusion des régions?
Autre remarque: mes billets qui traitent de ça sont souvent très peu lus, sauf si je couple les thèmes.
Les frontières ne sont jamais facile à définir.
SupprimerTous mes billets sérieux sont moins lus.
En fait, je remets une autre réflexion, il faudrait vraiment des interactions + fortes entre les régions. On risque de se recroqueviller sur nous-même sinon.
RépondreSupprimerMais il y en a déjà !
SupprimerSur les pays de vie : lors des débats pour les municipales à Grenoble, j'avais été frappée par le fait que beaucoup de points de discussion (embouteillages, développement industriel, ..) ne concernaient pas la municipalité, ni même la Métro, mais devaient être traités à un niveau supérieur (englobant plusieurs "pays" actuels, d'ailleurs, sans concerner l'ensemble du département).
RépondreSupprimerSur les circonscriptions européennes :
"et les circonscriptions européennes pourraient être calquées sur les nouvelles grosses régions."
N'étant pas comme le maître de ce blog très favorable à la décentralisation, je souhaiterais qu'on en revienne à une circonscription unique, qui donnerait une vraie dimension à ces élections. Les discussions sur l'orientation européenne, c'est à dire sur l'orientation de 90% de notre politique nationale, seraient plus claires : difficile de noyer le poisson quand il y a un débat national. Et, on ne sait jamais, on pourrait éviter d'envoyer des bras cassés à Bruxelles (je vise surtout les têtes de listes, certains députés européens effectuant un travail important qui est peu médiatisé).
Ah mais on est entièrement d'accord. À propos des européennes, j'ai été trop gentil (je voulais dire qu'au minimum il fallait calquer les régions mais le mieux est de les supprimer).
SupprimerPour les pays, il existe déjà un tas de coopération mais elles sont peu connues. Je m'était beaucoup intéressé à ma région : c'est impressionnant.