Dans
Facebook, j’ai diffusé un article
du Monde ayant pour titre : « Les robots sont des faux coupables idéals ». Il est
réservé aux abonnés et je ne l’ai pas lu, je voulais diffuser son résumé par un
ami (au sens Facebook du terme), Gilles Clavreul : « Excellent papier,
malheureusement pour les abonnés seulement, sur le serpent de mer qu'est la
"taxe robot". En s'appuyant sur des études empiriques solides (dont
une conduite par Philippe Aghion et l'OFCE, que je mets en copie), les auteurs
démontrent de façon convaincante que l'effet global de l'automation est positif
pour l'économie dans son ensemble (gains de pouvoir d'achat pour le consommateur,
amélioration de la création de valeur ajoutée pour le producteur) mais qu'il
est aussi favorable à l'emploi, y compris l'emploi peu qualifié. En effet, les
entreprises qui y ont recours font des bénéfices, se développent, et
embauchent.
Cette confirmation
empirique tend une fois de plus à démontrer que le progrès technique n'est pas
l'ennemi de l'emploi, bien au contraire. Dans les débats actuels, surtout à
gauche, grande est la tentation d'oublier qu'il n'y a pas d'emploi sans
croissance, ni de croissance sans progrès technique, et donc gains de
productivité. En revanche, la question de la juste répartition des fruits de la
croissance, elle, reste entière...à condition d'en avoir. Ce à quoi aboutissent
les modèles "décroissants" ou anti-productivistes que certains
veulent désormais suivent, c'est moins de richesse, moins d'emploi et donc plus
d'inégalités. Autant le savoir. »
Je
suis parfaitement d’accord ! J’ajoute que c’est inéluctable et que c’est
très bien ainsi : les robots remplacent généralement des métiers pénibles
ou sans intérêt. Je suis aussi contre la taxe robot (et j’en ai beaucoup voulu
à Hamon pendant sa campagne alors que c’était le seul à avoir une vraie réflexion
sur l’avenir du travail) parce qu’on ne sait pas ce qu’est un robot. A partir
du moment où une machine aide au travail, c’est un pas vers la robotisation. On
prend souvent en exemple les caisses automatiques qui remplacent les caissières
dans les magasins (et je vais parler de l’emploi plus bas – ou plus haut si
votre écran est à l’envers) et vous ne me ferez pas croire que c’est un travail
épanouissant (je n’ai pas dit inutile socialement : la caissière est la
seule personne à qui peuvent parler certains mais c’est un autre problème). Il
n’empêche que ces caissières utilisent des machines avec un lecteur de code
barre. Cela va beaucoup plus vite qu’avant donc le nombre de caissière a
diminué (en proportion du chiffre d’affaire) et il n’y a plus de magasiniers
qui passaient leurs journées à mettre des étiquettes de prix sur les produits.
Et
vous verrez que dans dix ou vingt ans, les caisses automatiques telles que nous
les connaissons n’existeront plus. Les produits auront des espèces de puce RFID
qui seront reconnues automatiquement par le caddie (dans le Auchan près de chez
moi, on peut prendre une espèce de boitier pour lire les codes barre ce qui évite
d’avoir à passer à la caisse automatique !). Et les braves gens qui gèrent
des ilots de caisses automatiques pour vérifier que tout va bien vont disparaitre.
C’est
pour cette disparition putative du travail que certains pensent taxer les
robots mais comme on ne sait pas ce que c’est, je trouve cela crétin. Je ne
suis pas fiscaliste mais j’imagine que l’on pourrait remplacer l’impôt sur les
bénéfices par une sorte d’impôt sur la valeur ajoutée hors travail. Actuellement
l’impôt sur le bénéfice est de l’ordre de 25% (un peu plus mais il va baisser…
Il est moins élevé pour les petites boîtes qui font peu de bénéfice). Une boîte
qui fait 100 de chiffre d’affaire et a 80 de dépenses va faire un bénéfice de
20 et payer 5 d’impôts. Avec mon système, on déduirait des 80 la masse salariale,
disons 50. L’assiette de l’imposition serait donc de 100 moins (80 moins 50)
donc 70 au lieu de 20, vous le taxer à 12,5% (la moitié des 25) soit 8,75 !
Des spécialistes pourront affiner cela. Cela permettrait en outre de tordre le
cou à la sous-traitance. On pourrait même modifier mon calcul pour inclure dans
les déductions les amortissements, pour inciter les entreprises à investir, y
compris dans des robots. Mon système a une faille évidente : l’entreprise
qui ferait des bénéfices avec peu de salariés verrait son imposition passer de 25%
à 12,5%. Il faut donc une dégressivité dans ce taux d’imposition en fonction du
pourcentage des charges composée la masse salariale.
Mais,
les 3,5 que je viens de faire gagner à l’Etat ne permettront pas de compenser
la perte d’emploi et ne servent qu’à faire plaisir aux gens qui veulent taxer
les robots…
Revenant
au début, j’ai donc partagé un article du monde réservé aux abonnés (il est néanmoins
disponible ici)
et non pas le commentaire de l’ami Gilles. Deux réactions me frappent. Celle d’un
pote de droite qui dit « voilà, du pain et des jeux ». Il ne dit pas que ça.
Il concluait une discussion intéressante où il disait qu’on ne pourrait pas
trouver du travail pour tout le monde à la quelle je répondais que le tout est
une question de répartition des richesses produites. Celle d’un copain de
gauche qui dit « les fameux nouveaux emplois... »
Les
deux pensent ainsi que la robotisation va faire perdre beaucoup d’emplois, à un
point insurmontable. Je ne vais pas démontrer le contraire car je ne lis pas de
marc de café mais je répète que de toute manière l’augmentation de l’automatisation
(par la robotique ou l’intelligence artificielle, combinés ou pas) est
inéluctable donc la diminution du nombre d’emplois salariés pour une production
identique l’est aussi. D’ailleurs, l’article du monde (que j’ai lu après avoir
rédigé mon couplet sur la taxe) le dit : « Certes, les robots
détruisent des emplois, c’est même leur raison d’être. Ces destructions seront
vraisemblablement massives. Selon l’Organisation de coopération et de
développement économiques (OCDE), la robotisation pourrait faire disparaître
environ 16 % des emplois en France d’ici 20 ans. » Cela fait 4
millions en 16 ans alors qu’on a déjà perdu 1 million en trois mois avec la
crise. Il faut relativiser si on a envie.
L’automatisation
a été forte en trente ans, dans beaucoup de domaines, mais le chômage continue
à osciller entre 7 et 11% avec différentes phases de pertes et de gains en
fonction de la situation économique. L’article du Monde, après cette
introduction, va plus loin que moi vu qu’il démontre (études sérieuses à l’appui)
que l’effet de la robotisation est bénéfique y compris pour l’emploi « manufacturier » (et je crois que l’impact
de l’Intelligence Artificielle sera dramatique pour les autres emplois).
« A l’évidence, les
robots ne sont pas toujours les ennemis de l’emploi. Comment expliquer un tel
résultat alors que les robots se substituent à de nombreux salariés ? C’est que
l’introduction de robots s’accompagne aussi d’un effet sur la productivité : la
même quantité de biens ou services peut désormais être produite à un coût
beaucoup plus faible.
Comparés à ceux de
ses concurrents non robotisés, les prix de vente d’une entreprise robotisée
diminuent, souvent dans des proportions importantes, ce qui lui permet
d’accroître ses parts de marché, et donc d’embaucher pour répondre aux demandes
qui s’adressent à elle et s’adapter à sa nouvelle dimension. »
Et
la conclusion : « Blâmer les robots détourne l’attention du public des véritables
causes de nos résultats pour le moins médiocres en matière d’emploi.
Les robots sont des
faux coupables idéals.
Nos débats devraient
plutôt porter sur les réformes à mettre en œuvre pour améliorer le
fonctionnement du marché du travail et pallier la défaillance chronique du
dialogue social. »
Mais
juste avant : « En fin de compte, rien ne permet d’affirmer que la taxation des
robots aurait un effet positif sur l’emploi, ces études prouveraient même le
contraire. En revanche, elle aurait pour effet certain de réduire les gains de
productivité, et donc de nous appauvrir. »
Je
ne sais pas de quoi demain sera fait mais s’il pouvait être un monde sans
pauvres filles assises huit heures par jour à faire passer des codes barre
devant un lecteur, sans compter deux heures de transport en commun, une vie
dans un HLM de banlieue miteux, on ne s’en tirerait pas si mal.
Et si mes 3,5 pouvaient servir à payer du personnel dans les maisons de retraite, on n'en serait pas malheureux.
C'est bien toute la structure de la société qu'il faut faire bouger progressivement et pas taxer quelques bécanes qui n'ont rien demandé.
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