Nous sommes au cent-deuxième jour depuis le confinement et
de télétravail joyeusement réunis et dans mon dernier billet à ce sujet, je
disais que je ne voulais pas de loi ou de négociation nationale pour encadrer
le télétravail mais ce n’était pas le cœur du billet. Un commentateur, puisqu’il
faut appeler ça comme ça, me disait qu’il fallait une loi, même vide, ne
serait-ce que pour encourager les négociations.
Je ne suis pas d’accord ! S’il faut une loi, c’est à la
marge, pour régler des bricoles. Par exemple, ça me fait une belle jambe d’être
remboursé d’un pass Navigo et d’avoir une prise en charge partielle de mon
repas quand je mange à la cantine. Je ne veux pas pour autant de tickets
restaurants et je n’ai pas envie d’acheter des tickets de transport à l’unité
quand je prendrai le métro plus régulièrement (et me faisant rembourser, je n’ai
pas interrompu mon pass Navigo). Une loi peut permettre de résoudre cela mais de manière plus globale,
par exemple, en obligeant les entreprises à donner 150 balles non fiscalisés en
plus sur la fiche de paye et à arrêter les subventionnements des repas et des
transports ! Ce n’est pas l’objet de mon billet et je sais que ce n’est
pas simple et qu’il faut gérer les cas particuliers, comme les serveurs de
bistro qui ont un avantage en nature quand ils mangent sur place ou se font
rembourser le taxi quand ils terminent après minuit.
Ce n’est pas lié au télétravail ! Cela touche tous ceux
qui ont des notes de frais, des primes de « panier ».
Ou alors, s’il faut une loi pour le télétravail, c’est pour
faciliter la consultation des salariés sans que les DRH doivent passer par les
représentants du personnel et, d’une manière générale, à ce que les salariés
soient obligatoirement consultés pour tout ce qui touche l’organisation globale
de l’entreprise.
Ce n’est pas lié au télétravail !
Il ne faut pas changer la législation. Je vais essayer de
faire une démonstration, peut-être un peu technique dans certains points, je te
présente mes excuses par avance.
La première raison que la loi a déjà évolué pour permettre
le télétravail. Je vais citer une partie de la page
du ministère : « La loi sur le
renforcement du dialogue social crée un droit au télétravail pour les salariés.
L’exercice de ce droit suppose que le travail du salarié puisse être exercé à
distance grâce aux technologies de l’information et de la communication. Tout
salarié qui souhaite télétravailler informe l’employeur de son intention, par
tout moyen (oral, courrier, courriel…). L’employeur donne son accord, également
par tout moyen (accord oral, courriel…). En cas de refus, l’employeur doit
motiver sa décision. Lorsqu’il existe une charte ou un accord, le télétravail
est mis en place dans les conditions prévus par ces documents. » La
faute à « prévus » vous est offerte par LREM.
Tout est dit dans cet extrait : le télétravail doit
être possible et doit être demandé par le salarié (il ne peut pas être imposé
sauf, visiblement, en cas de crise sanitaire). Par contre, s’il y a un « accord »,
il doit être respecté, ce qui est la moindre des choses, mais cet accord est
souvent restrictif et mauvais. S’il l’est, c’est notamment parce qu’il est
négocié par des gens qui ne connaissent pas le télétravail et n’en veulent pas…
Je ne vais pas trop parler de celui de ma boîte mais, par exemple, il prévoit
un jour (fixe) par semaine (avec des possibilités de dérogation, par exemple en
cas de grève des transports). Pourquoi un jour par semaine ? Pourquoi pas
deux jours toutes les deux semaines, ce qui m’arrangerait bien avec mes
week-ends en Bretagne ? Et pourquoi faire un accord si des dérogations
sont possibles ou si le télétravail peut être imposé par les entreprises (en
cas de crise sanitaire, toujours, cas bien prévu par la loi) ce qui ne me
choque d’ailleurs pas (mais la loi prévoit qu’une personne a le droit de
refuser de télétravailler ce qui est paradoxal) ? Le texte dans ma boîte
prévoit que le salarié doit faire son télétravail à son domicile (ce qui n’est
pas imposé par la loi) mais il m’a fallu une dérogation pour avoir le droit de
faire le mien de celui de ma mère et, en travaillant chez moi, pendant la crise
sanitaire, je ne respectais plus cette dérogation : je ne travaille pas
dans l’endroit où je suis assuré pour le faire…
Nous avons donc une série de contradictions idiotes… Vous
pouvez continuer avec ce
site qui détaille la loi mais je vais prendre des extraits sur légifrance.
« Le télétravail est mis en
place dans le cadre d'un accord collectif ou, à défaut, dans le cadre d'une
charte élaborée par l'employeur après avis du comité social et économique, s'il
existe. » En d’autres termes, l’employeur fait ce qu’il veut. Les
personnes habilités à « négocier » ne savent généralement pas ce qu’est
le télétravail. Je vais donner un exemple simple : le texte dans ma boîte
oblige les salariés à avoir un téléphone mobile professionnel ce qui est imposé
pour le droit à la déconnexion et cela vient des négociateurs. Or, je n’ai pas
besoin de téléphone portable vu que je peux être joint sur mon PC, par
téléphone. Le texte prévoit également qu’on doit être équipé d’un ordinateur
portable professionnel. Je ne vois pas pourquoi une boîte paierait un
ordinateur professionnel à un type qui en a déjà chez lui. Mais c’est imposé
par la boîte parce que les responsables sécurité veulent maîtriser les accès aux
serveurs ce qui les louable. Mais à l’heure du cloud, il ne serait peut-être
pas inutile de modifier les moyens techniques liés à la sécurité…
Ainsi, je ne vois pas ce que pourrait apporter une loi ou
une négociation nationale alors que la loi actuelle prévoit à peu près tout. Un
salarié peut demander le télétravail et un accord dans l’entreprise peut donner
un cadre général, cadre général qui est forcément restrictif mais sans doute
nécessaire pour éviter aux entreprises de gérer des tonnes de cas particuliers…
Je cite enfin le commentateur de mon billet de blog dont je
parlais : « Je reste persuadé qu'il faut
une loi absurde pour que les gens se rendent compte que ça ne va pas et se
mettent à réfléchir. Sinon, ils font comme la direction a décidé, après
pseudo-concertation ou pas. » Une loi absurde reste une loi. Une
concertation est forcément « pseudo » notamment parce que les
participants à la concertation ne connaissent pas le sujet. Les gens en
télétravail forcé et les entreprises ont eu six mois pour y réfléchir et le
gouvernement incite à poursuivre le télétravail.
Donc ne touchons à rien !
Suis bien d'accord !
RépondreSupprimerEA