Mesdames, Messieurs, devant vos yeux ébahis, je vais faire
une déclaration : si les électeurs ne votent pas en général, et ne votent
pas dans votre sens en particulier, ce n’est pas peut-être pas exclusivement de
leur faute… Je vais donner un exemple au hasard : moi. Je n’avais pas
envie de voter. Point barre. Tenez ! Si j’avais eu le vote électronique, j’aurais
probablement voté aux cantonales, par amitié pour mon maire. C’est tout. Et
encore, c’est parce qu’on était dans le même bistro pour le dernier match de l’équipe
de France…
Je crois que je me suis expliqué sur mon vote et les
résultats du premier tour la semaine dernière. Je ne vais pas recommencer. J’ai
l’impression de radoter (ce qui ne m’arrivait – d’avoir l’impression – quand je
faisais plusieurs billets par jour). On va simplifier : je voudrais qu’on
arrête de dire qu’il n’y a pas deux gauches irréconciliables et de catégoriser
à droite tous ceux qui se disent à gauche mais avec qui on n’est pas d’accord.
Cela m’énerve. Pas à titre personnel : mes lecteurs et mes copains me
connaissent et ce que pensent des andouilles inconnues m’importe peu. C’est
même assez rigolo : je pense qu’une partie des types qui se sentent à
gauche sont tétanisés par la nécessité de le démontrer en défendant des thèmes extrêmement
marqueurs à gauche mais qui n’ont pas grand-chose à y faire.
Prenez la récente réforme de l’AAH ! On n’y comprend
pas grande chose mais, avant de donner un avis à l’emporte-pièce, on peut s’interroger : comment des militants ou
sympathisants de gauche peuvent-ils défendre des sujets avec LR contre LREM ?
Rien que sur le fond, ça interroge : comment peut-on, à gauche, dire qu’on
ne peut pas prendre en compte le revenu familial pour l’octroi d’une aide ?
Comment peut-on ne pas se demander pourquoi un couple avec une personne avec l’AAH
dont les revenus sont moins importants qu’un autre soit défavorisé ?
Dans les analyses que l’on peut lire (à gauche), on voit des
magnifiques cartes de France avec du rose et du bleu et on nous dit « ah
ben vous voyez bien que le clivage droite – gauche existe toujours ». Je
crois que ça ne prouve bien. La plupart des candidats sont catalogués d’un côté
ou de l’autre, il faut bien une couleur en tête. De même, on nous parle de « prime
au sortant ». Cela veut dire qu’on ne peut tirer aucune conclusion. On
nous dit aussi qu’à la présidentielle, Le Pen pourrait ne pas être au second
tour alors que ce résultat montre simplement que l’implantation locale du RN ne
permet pas à ce dernier d’avoir des victoires.
A contrario, on nous dit que LREM a échoué car n’a rien
remporté. On oublie de dire qu’ils n’ont rien perdu non plus.
Allez ! Encore une théorie… Il y a trois ans, on a
gagné la coupe du Monde grâce à Mbappé. Cette fois, on se réjouit de l’arrivée
d’un nouveau grand joueur, Benzema, qui va nous faire gagner aussi. On ne gagne
pas, on est éjectés en huitième et on voit ce matin des locdus qui expliquent
que Mbappé nous a fait perdre. Pourtant, ce dernier n’a rien perdu puisqu’il n’avait
jamais fait de coupe d’Europe, contrairement à Benzema. C’est compliqué.
La politique, c’est compliqué.
Tout le monde a plein d’argument pour expliquer l’abstention
voire les résultats. Ils ne sont pas mauvais. J’en partage certains. Par
exemple, le mille-feuilles électoral fait qu’on ne comprend plus rien, à quoi
servent les différents échelons et tout ça. On peut faire des propositions. Par
exemple, dans la mesure où ils sont foireux, supprimons le suffrage universel
pour les intercommunalités et les départements (pour les interco, les bulletins
sont les mêmes que pour les municipalités et, pour les départementales, on a
des cantons qui ne correspondent plus rien). Alors, on laisse les municipalités
décider des élus aux intercommunalités et ces derniers au département. Et paf !
Le tour est joué. Les départements décident des sénateurs et la boucle est
bouclée.
Je ne parle pas de modifier la Constitution, de rendre le
vote obligatoire ou toutes ces singeries qui ne changeront rien. A la limite on
pourrait inclure le conseil régional dans le jeu... Le nombre d’élus reste le
même (on ne fait pas de démocratie en diminuant le nombre d’élus), on ne touche
pas à la décentralisation, on renforce le poids des métropoles. Youpla boum. Moins
d’élection = moins d’abstention. Pas con, hein ? On évite les débats
autour de sujets qui ne sont pas du ressort de l’élection.
Prenez les régionales. Que font les régions. Les lycées et
les transports. Je me fous des lycées et de la couleur politique de l’échelon
qui va en décider. Pour les transports, les débats tournent autour des lignes à
construire or il faut des dizaines d’années pour faire bouger quelque chose et
le budget ne vient pas des régions pour une grande partie. Prenez l’exemple du
programme des écolos en Ile-de-France ! Le Grand Paris, mis sur rail (façon
de parler) il y a une douzaine d’années et qu’on attend avec impatience est
remis en cause parce qu’une liste veut jouer au malin…
Ce sont sans doute les fans de Benzema qui expliquent qu’avec
ces élections de 2021, on ne peut plus réduire l’offre de 2022, pour le second
tour de la présidentiel, à un duel Macron – Le Pen. A vue de nez, il n’y a rien
de moins sûr.
Mais laissons l’espoir ! Aux régionales, la gauche est
en tête avec 35%, la droite en second avec 30, l’extrême droite est ensuite
avec 20, le centre avec 10. Comment voulez-vous tirer une leçon de cela… ?
Déjà, imaginer la gauche en tête, aujourd’hui, en France, à une élection
nationale ! Déjà que j’ai cru que j’étais saoul en lisant cela sur
Wikipedia… On se demande si l’abstention ne profite pas à la gauche, finalement…
Ah ! Si, bien sûr ! Si la configuration des
candidats font que les électeurs centromacronistes votent pour la gauche. Tout
est possible.
Mais n’en tirons pas les mauvaises conclusions. La gauche
hétéroclite ne doit pas remplacer la gauche plurielle. La gauche a perdu 10% en
Île-de-France entre 2015 et 2021. Elle n’a pas bougé au niveau national.
Voila de quoi tirer des conclusions mais on verra demain.