Comme d’habitude, dans Facebook, on trouve des lascars qui
commentent les sondages pour en conclure n’importe quoi. Il y a, tout d’abord,
ceux qui expliquent que les sondages ne sont pas fiables. C’est faux. Ils n’ont
pas toujours valeur de prédiction mais montrent un état de l’opinion au moment
du sondage. Surtout, pour les élections présidentielles et à deux mois du premier
tour, ils donnent généralement le bon résultat et il n’y a qu’un seul résultat
qui compte : le vainqueur. Le numéro deux, celui qui lui sera opposé au
second tour, n’a aucun intérêt.
Je donnais les informations dans Facebook et dans les commentaires
de mon dernier billet hier mais il convient d’être précis… d’autant que la mémoire joue parfois des
tours. On a tous en tête l’élection de 1995, quand Chirac a coiffé Balladur au
poteau. Dès début mars (il est vrai, moins de deux mois avant le premier tour),
le futur président était donné vainqueur. Surtout, dès le « début »,
le candidat de la droite était annoncé comme premier. Pauvre Jospin qui était
en tête au premier tour dans toutes les considérations. 1995 est presque la
seule élection (sans doute avec 1974 et peut-être 1969 mais ces scrutins
étaient après la mort ou la démission du président en exercice, avec, donc, une
campagne très courte).
En 2002, par contre, les prévisions étaient très difficiles,
Chirac et Jospin étaient au coude à coude. On se trompe aussi sur 2007 car l’élection
était réputée imperdable pour la gauche après 12 ans de droite à l’Elysée mais
dès début janvier, l’affaire était pliée. En février 1981, Mitterrand était donné
comme vainqueur mais l’indécision à fait suite…
Venons-en à 2022 ! Macron a une telle avance qu’il
devrait être au second tour et il le remporterait haut la main sauf s’il est face
à Pécresse au second tour mais, depuis cinq semaines, tous les sondages sont en
sa faveur. Je ne dis pas ça pour vous déprimer ou « sortir ma science »
mais pour vous éviter de perdre du temps dans des délires personnels pour vous
donner espoir. Tout ce qui pourrait arriver est un coup de théâtre, ce qui n’est
pas rare. Je parlais de 1995 où Chirac est arrivé au second tour (mais aucun
coup de théâtre pour le second…). On se rappelle évidemment de 2002 (mais ce n’est
pas en faveur de la gauche)… En 2017, on a eu les affaires de Fillon (qui n’ont,
en fin de compte pas changé grand-chose, Macron étant souvent donné vainqueur).
Cette année, je ne crois pas qu’il faille s’attendre au
miracle. Certains, en 2017, voyaient Mélenchon au second tour qu’il aurait gagné
s’il était opposé à Le Pen. Disons-le franchement : il faut bien que les
sondeurs créent du suspens… Aucun sondage de premier tour ne laissait entrevoir
un duel Le Pen Mélenchon. En 2022, la probabilité que ça arrive serait
dérisoire mais les sondages parient, dans ce cas, sur la victoire de Le Pen.
La deuxième erreur que font souvent les militants
facebookiens est de parler de la marge d’erreur. Ils ont de l’espoir car « on
est dans la marge d’erreur ». En fait, cela ne veut pas dire grand-chose à
part que, compte tenu de l’échantillon, la probabilité pour que le résultat
soit conforme plus ou moins la marge d’erreur est importante. Cette valeur ne
sert qu’à juger de la précision du sondage et l’analyse doit être réservée à des
spécialistes.
Je vais faire une démonstration par l’absurde (mais il faut
bien se faire plaisir). Imaginons qu’un sondage auprès de 2000 personnes donne
Roussel à 4%. Cela veut dire que 80 andouilles annoncent voter pour le candidat
issu du PCF et des pieds. Donc que 1920 imbéciles vont voter ailleurs.
Figurez-vous que le hasard peut faire que sur les 45 millions d’électeurs, ils
soient les seuls à voter autrement que Roussel et que ce dernier soit élu au
premier tour. Evidemment, la probabilité est nulle (et ma démonstration va à l’inverse
de la première partie de mon billet, au sujet de la pertinence des sondages).
Mais dire « on est dans la marge d’erreur » pour se persuader qu’on
peut gagner est à peu près aussi con que mon raisonnement. Bon, d’accord !
Un peu moins…
La troisième erreur que je voulais signaler (et une
publication lue ce matin motive ce billet) est qu’on ne peut pas ajouter les
pourcentages d’un sondage pour extrapoler d’autres hypothèse. Par exemple, les
cinq candidats les moins petits arrivent à environ 22%. Le seul enseignement qu’on
peut en tirer est que 22% des électeurs veulent mettre un bulletin de gauche
dans l’urne. C’est tout !
On évitera ainsi de déduire que ce pourcentage restera si
quatre candidats (les quatre plus petits) renoncent à la course (au profit de
Mélenchon, donc). Si les électeurs concernés (environ 10 ou 12%) pensaient que
Mélenchon pouvait gagner et être, ensuite, un bon président, ils voteraient pour
lui sans se poser de question. Prenez les électeurs de Jadot, Hidalgo, Roussel
voire Taubira : la moitié sont des « socdem » et ne peuvent pas
envisager de voter pour Méluche pour différentes raisons (pour ce qui me
concerne, je les ai exprimées hier).
La quatrième erreur est liée à la troisième et j’en ai déjà
parlé. Elle n’est pas directement liée aux sondages mais le but du jeu n’est
pas d’arriver au second tour mais de gagner l’élection. Il faut arrêter de rêver.
Ainsi, pour la gauche, le premier tour servira exclusivement à établir une
espèce de rapport de force ou des rapports de force : entre les insoumis
et les autres, entre le PCF et le PS, entre le PS et les écolos ou Taubira…
Chaque électeur peut donc avoir ses raisons de ne pas aller
à la pêche. Pour ma part, par exemple, je tiens, d’une part, à faire payer au
PS ses erreurs (ou du moins ce que je considère comme tel), à montrer que la
gauche Woke peut être évitée, à affirmer mon soutien à la République, la laïcité
(même si Roussel n’est pas parfait) et au nucléaire et à rappeler que LFI n’est
qu’une force politique fantôme, sans vraie implantation locale (sans compter que
je ne peux pas saquer Méluche).
C’est ainsi que j’espère voire un bon score de la part de
Roussel sans compter une certaine « nostalgie ».
Utilisons les sondages pour rigoler des déconvenues de nos
ennemis mais ne poussons pas le bouchon à faire des erreurs d’analyse.
la marge d'erreur :) c'est comme "tant que l'arbitre n'a pas sifflé..." bon à 4% ou 5-0 dans ta face, la marge d'erreur ne vaut rien du coup. Mais les éléments de langage sont intemporels
RépondreSupprimer- on est dans la marge d'erreur : sous entendu, sur un malentendu, ca peut encore le faire
- c'est une image à temps T : sous entendu, on est dans la merde mais on peut pas le dire
- Ca donne une bonne tendance : sous entendu, on vient de passe de 0.5% à 1%, la dynamique est présente,
- les sondages sont trompeurs (voire influencent) : sous entendu, ca ne peut pas être de notre faute, trouvons quelqu'un sur qui mettre la responsabilité
EN fait, les commentaires sur les données du sondage sont en eux-même plus intéressants que les sondages
Ces commentaires sont rigolos : on voit d'où viennent les auteurs qui manquent généralement de recul.
SupprimerTout ce que vous dites est à assez juste. Les statistiques et les probalités étant etayés par de solides arguments mathématiques, il en résulte que c'est plié, que Macron va rempiler pour 5 ans, que ca nous casse les pieds ou pas.
RépondreSupprimerIl n'empèche que vos votes, mêmes ceux pour les petits candidats, vont permettre de définir des stratégies pour les législatives qui vont suivre, influer sur la force du prochain groupe LREM à l'assemblée et structurer son opposition.
Vous n'aimez pas Merluche car il a dépecé le PS mais vous pensez qu'il sera le plus capable de batailler contre Macron, soutenir les prochains combats qui vous tiennent à coeur, votez pour lui!
Vous considérez que Merluche mérite toute votre estime pour avoir trahi ces enfoirés d'éléphants du PS mais que c'est un homme fini et que ses compromissions avec les islamistes l'empècheront à tout jamais d'être crédible, votez Roussel.
Vous avez voté Delanoe puis Hidalgo toute votre vie car vous adorez la façon dont ces canailles enlaidissent Paris, mais vous considérez que le PS a été siphonné par LREM et qu'il faut passer à autre chose, votez Jabot!
Bref, votez, votez, votez même si on a un peu la sensation que les urnes sont déjà bourrées.
Moi même, qui ne communie pas au culte républicain, qui n'ai pas la chance d'être progressiste et qui d'après un certain chroniqueur à l'odorat délicat, pue des pieds, je ne sais pas encore pour qui je voterai entre Marine Le Pen, Eric Zemmour ou Dupont Aignan mais je suis sur de voter et de voter non pas pour le candidat qui fera le moins mauvais score au second tour, je m'en tape, mais de voter pour celui ou celle qui a le plus de chance de mobiliser le camp national après l'élection.
Désolé, votre commentaire était bloqué dans les tuyaux. On est d'accord, on vote pour des raisons précises, pas nécessairement pour gagner...
Supprimer