En salle

02 juin 2022

Les trois gauches et la reconstruction ?


 

On ne va pas dire que la gauche aura connu un tsunami à l’issue de la séquence électorale en cours vu que ça lui pend au nez depuis dix ou vingt ans mais elle est quand même torpillée, notamment à cause des divisions qui l’habitent mais l’heure de chercher l’œuf ou la poule est bien passée, maintenant, même si de nombreux ânes continuent à charger la mauvaise mule dans les réseaux sociaux. Elle est torpillée, certes, mais « le camp de gauche » reste sans doute majoritaire en voix tant les autres sont aussi dans de sales draps. Il n’empêche qu’une majorité ne peut pas se faire, dans notre pays, sur une tendance radicale. « Les élections se gagnent au centre » disais le vieux sage avant de commander une nouvelle tournée de pastis.

A une semaine du premier tour (et on ne peut pas dire ce qu’elle sera dans un mois), on peut distinguer trois grosses tendances, du moins, tel que je le vois dans mon esprit. Il y a tout d’abord la gauche « Nupes » et, ensuite, la fraction autour de « la fédération de la gauche républicaine » et, ensuite, les socialistes néofrondeurs, c’est-à-dire refusant l’accord avec LFI.

 

Brochette de maires socialistes

Je ne vais pas revenir sur Nupes en particulier vu que ça fait quelques semaines qu’ils sont au cœur de ce blog. Néanmoins, les socialistes qui y font partie de cet « accord » m’intéresse. L’Obs publiait avant-hier un article (que je n’ai pas lu vu qu’il est réservé aux abonnées) avec pour titre : « Les maires socialistes se méfient encore de Mélenchon ». Un lascar l’a partagé dans Twitter en disant, en gros : c’est normal, idéologiquement, ils sont plus proches de Macron que de Mélenchon.

C’est exactement mon cas même si regrette que Macron ne soit pas de gauche et va jusqu’à confier les grands ministères (finances, intérieur…) à des gugusses bien à droite mais je ne veux pas de la politique prônée par le chef des zinzinsoumis. Je n’ai pas honte. Je suis même presque fier de préférer un libéral à des gens qui mettent à mal mes valeurs, sont incapables de se faire élire et prônent une politique qui serait trop onéreuse pour ne pas être désastreuse pour les Français les plus faibles. Ils sont peut-être à gauche mais, dans ce contexte (l’incapacité à se faire élire et la ruine du pays), on peut déclarer que l’on n’est pas avec eux sans avoir peur de passer pour étant de droite… Il faut arrêter cette peur, ce phénomène qui fait qu’une grande partie de la gauche socialiste est tétanisée.

Il faut que les maires de gauche et les différentes sections socialistes sortent de cette paralysie et voient les chiffres autrement (le PS reste la deuxième formation politique en termes de nombre d’élus en France suite aux dernières élections locales : LFI n’a rien de majoritaire) et affirment un « oui mais on en reparlera ».

 

Gauche, droite ! Gauche, droite !

Je suis sans doute assez loin, idéologiquement, de la fédération de la gauche républicaine qui regroupe (selon Wikipedia qui n’est pas à jour) : Gauche républicaine et socialiste, Mouvement républicain et citoyen, Les Radicaux de gauche, L'Engagement, Nouvelle Gauche socialiste, Les Socialistes et L'Écologie populaire. En revanche, je suis assez proche de leur vision de la République et j’aurais pu cosigner leur dernière publication (notamment partagée par mon ami Jeff dans Facebook) qui dit que « la gauche unie, ce n’est pas la gauche unique », que « la gauche doit pouvoir s’exprimer dans sa diversité », qu’une partie des électeurs « populaires » se sont barrés (vers le FN) et qui défend la priorité absolue à l’éducation, la sortie du pétrole (et donc le nucléaire, hein !, même si ce n’est pas écrit), la réindustrialisation et la « défense exigeante de la laïcité ».

Le troisième groupe est donc composé de ces dirigeants socialistes qu’ils soient proches de Carole Delga, de François Hollande ou pas du tout, et qui refusent l’adhésion à Nupes et les contraintes qui vont avec, notamment la limitation du nombre de circonscriptions… A ma connaissance, ils sont encore au PS et pas fédérés au sein de machins comme je viens de citer, ce qui est peut-être dommage. S’ils le faisaient, ils acteraient la fin du PS (or un « centre gauche » a besoin des « maires socialistes » dont je parlais plus haut et, bien sûr, des militants qui tournent autour d’eux mais, sans le faire, ils rendent difficile un rapprochement avec la gauche de LREM. Je n’ai pas la solution et je vais fermer ma gueule. C’est probablement d’eux que je suis le plus proche mais comme ils ne sont pas structurés, disais-je, je peux difficilement adhérer à quoi que ce soit, d’autant qu’il n’y a aucun représentant dans les circonscriptions qui m’intéressent.

Je pense qu’il va falloir officialiser la possibilité d’appartenir à deux formations politiques sans que celles-ci menacent d’exclusion… (et cela me semble d’autant plus important que les enjeux locaux ne sont pas les mêmes que les enjeux nationaux ; je parlais avant-hier du candidat LREM dans la troisième circonscription des Côtes d’Armor qui, si j’ai bien compris, n’est plus au PS alors qu’il avait été élu en ce nom aux régionales : tout cela est bien grotesque).

 


Je parlais de trois grosses mouvances mais je ne veux pas être limitatif. Tout d’abord, il y a évidemment les formations d’extrême gauche qui ne rentrent pas dans ce périmètre. Contrairement à beaucoup, j’ai plein de respect pour elle. Et même si elles ne sont pas significatives en termes de voix, elles sont capables de péter les scores, comme en 2002 (près de 10%, tout de même). Si vous habitez dans le coin de Lannion, votez pour le POID, ça me ferait plaisir d'avoir une belle sœur députée (surtout qu'on évite la politique dans les repas de famille). Ensuite, il y a des acteurs comme les sympathisants communistes qui se retrouvent dans Nupes mais ont probablement des valeurs plus proches de celle de la Fédération de gauche républicaine. En complément, il y a des gens comme François Ruffin dont l’appartenance à LFI donc à Nupes ne fait aucun doute mais qui expriment parfois des voix franchement discordantes, comme dans ce récent texte où il affiche une position sur la sécurité loin de la ligne du parti. Enfin, il y a des écologistes « indépendants » loin d’EELV et surtout de Nupes et mettant sans doute en avant l’écologie avant la gauche qui se cherchent un peu et se retrouvent quasiment fédérés par Corinne Lepage. Ils m’intéressent uniquement car les aléas des investitures font que je vais voter pour l’un de leurs représentants… Je ne peux cesser ce paragraphe sans parler de Volt qui me parait intéressant mais dont je ne connais pas plus que l’existence… et la page Wikipedia. Surtout, en décrivant ce que je vois comme composantes da la gauche, il ne faudrait pas que j'oublie les socialistes passés à LREM dont le poids est très important.

Je ne sais pas si les gauches sont irréconciliables (j’espère que des accords permettront de retrouver le pouvoir) mais elles sont vraiment multiples (et mon recensement ne se veut pas du tout exhaustif mais uniquement représentatif de ce que je vois autour de moi).

 

En termes électoraux, je le disais, cette gauche est majoritaire en France mais pour conquérir le pouvoir, on ne peut pas se contenter de regrouper 30% à un premier tour… Ainsi, pour moi, on ne peut pas compter sur une gauche à moins de 40% capable d’attirer le centre droit au second tour. Peu importe.

Dans ces 30%, ce qui gravite autour de Nupes est réellement très majoritaire. On ignore le poids des autres. On ne peut donc pas estimer le poids de chaque composante à l’issue des législatives et, même quand on en saura plus sur les chiffres, on pourra difficilement avoir une idée de la répartition des votes vu que toutes les mouvances ne sont pas représentées dans chacune des circonscriptions et, surtout, que le but final n’est tout de même pas de mener des combats fratricides… En outre, Jean-Luc Mélenchon prendra sans doute sa retraite prochainement – le temps de lancer un poulain pour 2017 ? – et Nupes perdra une partie de son poids.

 


Je ne sais pas de quoi partira la reconstruction des forces de gauche. Seul l’échelon national a la puissance nécessaire pour peser mais seules les sections locales ont la légitimité pour faire cet échelon national. Il me semble que le PS de Faure l’a bien oublié et que Mélenchon passe tout de même un tantinet pour un dictateur au sein de LFI. L’un est fort localement et faible nationalement et l’autre est faible localement et fort nationalement.

Maire de Brest à coiffure notable


François Cuillandre, le maire PS de Brest, a publié une tribune intéressante.

Tout d’abord, une phrase retient mon attention « La vie politique devient, à l’image de ce qui se pratique dans le foot, un mercato permanent dans lequel chacun se persuade que ce n’est pas la girouette qui tourne mais le vent qui change. » Tout est dans le mot « chacun » car il fait que lui et moi en font partie… Il n’empêche que je faisais récemment un billet à propos des changements de position politique de certains (et qui avait justement pour titre « les girouettes »).

Toujours est-il qu’il décrit un beau bordel, au niveau des circonscriptions et des candidats, où « chacun » s’estime plus légitime que les autres…

« Quelques apparatchiks parisiens, pratiquant le centralisme non démocratique, imposent leurs décisions aux « provinciaux » avec mépris. Désolé mais je ne pratique pas ce sport-là. Adhérent du même parti depuis 45 ans, je finis par dire : vive la dissidence ! »

Pas mieux ! Et je suis persuadé que le renouveau viendra des discussions locales : les erreurs du national poussent à la dissidence. 

 

 

 

6 commentaires:

  1. "Dans ces 30%, ce qui gravite autour de Nupes est réellement très majoritaire. On ignore le poids des autres."
    Pas tant que ça (ni le "très majoritaire", ni l'ignorance) : suffit de regarder les sondages de premier tour de la présidentielle de février, alors que toutes les nuances de gauche étaient représentées et que l'effet vote utile pour Mélenchon ne jouait pas encore.

    Mélenchon plafonnait à 12%, la gauche écolo-socialiste (représentée par Jadot, Hidalgo et Taubira) était à environ 10% et Roussel à 4%. Ce sont donc plus de la moitié des électeurs de gauche (sans compter ceux qui pensaient voter Macron, sans-doute pas loin de 10%) qui n'adhéraient pas au programme de LFI et/ou à la personnalité de Mélenchon.
    Et ce n'est pas parce que les dirigeants actuels du PS, du PC ou d'EELV ont choisi majoritairement de "graviter autour de Nupes" pour sauver leurs fesses électorales que c'est le cas de leurs électeurs. Beaucoup d'entre eux ne voteront pour un candidat NUPES au 1er tour des législatives que faute d'avoir un autre choix ou parce que, dans leur circonscription, cet autre choix pourrait conduire à éliminer la gauche du 2d tour.

    Dans les derniers sondages pour les législatives (ceux qui distinguent les intentions de vote pour la NUPES de celles pour les candidats de gauche "dissidents"), les dissidents de gauche obtiennent 3 à 4% des intentions de vote alors qu'ils sont loin d'être présents dans toutes les circos et (je suppose) que les sondés ne répondent pas qu'ils ont l'intention de voter pour un parti qui n'est pas représenté dans leur circo. Les 25% de NUPES incluent des sondés qui n'ont pas d'autre choix à gauche dans leur circo (ou un choix qui ne leur plaît pas plus) et d'autres qui se résignent à voter NUPES pour être sûrs d'avoir un candidat de gauche au 2d tour.

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    1. Ouais. A part avec quelques sondages, on ne sait pas ce que pense réellement l'électorat.

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  2. il serait temps effectivement que ce soit la base qui reprenne la main sur les orientations des partis et pas les thinktanks, officines averties ou leader parfois autoproclamé ou coopté par un aéropage. Bon billet as d'habitude

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    1. Les officines sont nécessaires pour finir l'élaboration des projets mais tu as raison : ça n'a aucun sens quand ce n'est pas la base qui définit les orientations.

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  3. Ma Doue benniget !
    Il faut avoir un master d’anthropologie politique pour entrer ce labyrinthe de gauche et savoir en sortir !
    Hélène

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