Jerry Lee
Lewis, Mike Birch, Pierre Soulages. La semaine fut riche en morts divers
ce qui nous donne des sujets de discussion. Cela nous donne l’occasion de
raconter des bêtises et de crocodiler. Je vous préviens : je vais
commencer par utiliser toute la bêtise et la mauvaise foi dont je suis capable
pour introduire ce billet dont au sujet duquel je ne sais pas trop de quoi je
vais parler.
Prenez le premier. Jerry Lee Lewis. Il est surtout connu parce
qu’on rigolait bien, dans le temps, grâce à Jerry Lewis. Personne ou presque n’écoute
plus rien de lui et, quand son nom est apparu dans l’actualité, il m’a surtout rappelé
les mariages de la fin des années soixante-dix quand il fallait passer des musiques
permettant de réconcilier les générations : tout le monde peut danser sur
un vieux rock’n roll… Je suis un blogueur consciencieux : pour préparer ce
billet, je suis allé faire un tour sur Youtube pour réécouter ses succès. Le
premier sur lequel je suis tombé est « Rock over Beethoven ». Le bon
vieux Chuck doit bien rigoler.
Alors, j’ai fait pareil avec Soulages mais plus parce que j’avais
eu une idée idiote : voir ce que donnait une recherche de son nom dans
Google Images. Notre illustration. Le talent est indéniable. J’entends pas là
que n’importe quel abruti ne peut faire de tels tableaux, créer une luminosité
à partir du noir, y ajouter du relief, des reflets… Il n’empêche qu’il ne me viendrait
pas l’idée d’égayer mon salon avec un de ses tableaux. Et, franchement, ça m’amuse
beaucoup de voir des gauchistes lancer des hommages pour un génie dont la
moindre toile coûte maintenant plusieurs centaines de milliers d’euros et ne
sont plus, probablement, exposées que dans les couloirs de résidences de
quelques milliardaires, ayant ajouté des étiquettes avec le nom du bonhomme
pour bien montrer qu’ils ont bon goût.
T’as vu ça ? Je suis doué pour les hommages, hein !
Bon, je déconne, j’avais prévenu en introduction. Surtout que je ne voudrais me
mettre personne à dos.
Par contre, quand j’ai lu que Mike Birch était mort, j’ai
immédiatement eu en mémoire l’image de son trimaran, Olympus Photo, doublant le
Kriter V de Michel Malinovsky, presque sur la ligne d’arrivée de la route du
Rhum 1978. Eric Tabarly et Alain Colas ont beaucoup fait pour l’image de ce sport,
ne serait-ce qu’à l’occasion de la transat anglaise de 1976. Je vous dis ça sans
oublier que je suis né en Bretagne en 1966, ce qui permet de laisser de la
place à de beaux souvenirs. Les parents nous promenaient de ports en ports pour
nous permettre d’admirer ce qui deviendraient des « géants des mers »,
principalement à la Trinité sur Mer, où j’ai pu rencontrer Eric Tabarly.
J’étais un fan mais ce sont bien les images de Birch qui m’a
fait entrevoir ce que pourraient être les nouveaux héros des mers et leurs
futurs vaisseaux, le tout avec un sport dont le « centre de gravité »
était revenu en France…
Soyons francs : le jour de la mort d’Alain Colas, je
pourrai faire un beau billet bien émouvant. Surtout, si je puis me permettre une
plaisanterie éculée, depuis le jour où on l’a retrouvé à la Samaritaine vu qu’on
trouve tout à la Samaritaine.
Parmi mes souvenirs de marin précoce, j’ai beaucoup d’images
de Pen Duick III dans la rivière d’Auray, alors que Tabarly allait voir un de
ses potes vers Crach, à quelques kilomètres de Brech où s’est « éteint »
Birch. Je me rappelle alors avoir fait la couse avec lui, avec un copain qui
avait un 420. On avait perdu, le vieux marin avait peut-être voulu jouer avec
nous… On ne saura jamais.
Je ne compare par la notoriété de Birch avec celle de Colas
ou, surtout, de Tabarly mais ça m’amuse beaucoup de voir que des millions de gens
vont s’entasser sur les côtes Bretonnes, le week-end prochain, pour admirer le
départ d’une nouvelle édition de cette course mythique, mi-raisin. Comme on dit : « Dès sa première édition et la victoire aux 98 secondes
historiques du petit trimaran de Mike Birch face au long cigare de Michel
Malinovsky, la Route du Rhum braque ses projecteurs médiatiques sur les couples
formés par un bateau et un solitaire pour braver les mers et affoler les
compteurs. Il n’est donc pas étonnant que la transatlantique à destination de
la Guadeloupe devienne, à travers la participation d’une multitude de navires,
les plus en vogue sur la crête des vagues, le témoin des avancées
architecturales et technologiques de la voile de compétition. »
La course fut aussi marqué par la disparition d’Alain Colas,
à la barre de Manureva, l’ancien Pen Duick IV d’Eric Tabarly, lui-même empêché
de participation faute d’avoir trouvé les financements nécessaires. Tant pis !
« Au total, ce sont 38 marins, professionnels
comme amateurs, qui seront inscrits sur cette première édition. Parmi eux, on
retrouve des grands noms de la course au large et des jeunes prometteurs : Mike
Birch, Alain Colas, Florence Arthaud, Michel Malinovsky, Olivier de Kersauson,
Philippe Poupon, Marc Pajot, Bruno Peyron… »
Je dois avouer que je me suis désintéressé de ce sport assez
rapidement quand les moyens commencèrent à être démesuré, bien loin de l’amateurisme
de Birch et des exploits de Colas et Tabarly en 1976… mais aussi du même Mike Birch
(et le bateau d’Alain Colas, malheureusement mais justement dégradé, n’était
pas un exemple de sobrité…).
Et des copains, dans les prochains jours, vont commencer à
participer virtuellement à cette course grâce à quelques sites web leur
permettant de simuler des options de navigation. Invention bien géniale.
Ma publication suite à la mort de Birch, dans Facebook, a
obtenu deux likes et un commentaire. Je n’ai vu aucune autre publication à propos
de ce marin. Par contre, les hommages à Jerry Lee Lewis se sont multipliés et
je me demande si mes « amis gauchistes de Facebook » ne sont pas,
parfois, un tantinet ridicules. Ca ne les empêchera pas d’embarquer
virtuellement dimanche prochain.
Je n’aime pas les hommages dans les réseaux sociaux. Et
encore, Jean Teulé nous a quittés il y a plus d’une semaine : il échappe à
mes foudres. Je n’aime pas ces phénomènes de masse où faut célébrer, subitement,
un de nos très récents « chers disparus », avant le remettre dans des
oubliettes d’où il ne ressortira jamais.
Sauf dans le rêve de quinquagénaires de rappelant leur enfance
ou leur adolescence.