Ma chère Elisabeth, Mon cher Emmanuel,
Mme la première ministresse, M. le Président TC,
N’allons pas par quatre chemins : par la présente, je
vais vous suggérer de retirer votre réforme des retraites dans les meilleurs
délais et sans préambule. Nous allons commencer par couper court au débat et à
la question que nous avons sur nos lèvres desséchées : cette réforme
est-elle nécessaire ou indispensable ? Notez bien que j’ai un avis. La réponse
est deux points ouvrons les guillemets négative mais peu importe. De toute
manière, toute la gauche est persuadée qu’elle ne sert à rien, est injuste et j’en
passe. L’extrême droite, dont nous devrions conchier l’avis, devrait dire la même
chose mais elle est quand même capable de faire basculer une majorité au Parlement.
La droite dite républicaine ou de gouvernement devrait être partagée. Les centristes,
en revanche, voterons pour votre texte. On s’en fout.
La question reste ouverte mais, entre nous, nous parlons de quelques
milliards par an et on ne va pas se triturer les testicules vu que cela ne fait
quand même rien par rapport à nos différents budgets et, comme dirait les
opposants qui mélangent tout par rapport à toutes les aides, aux bénéfices des
grandes entreprises, aux dividendes versées par celles du cacarante.
Ne me dites que, après le « quoi qu’il en coûte »,
cela vous dérange beaucoup ?
La question est de savoir pourquoi recommandationnais-je ce
revirement immédiat mais sans frais. Tu te rappelles du CPE ? Et ça ne te
dérange pas si je te tutoie en parlant à vous deux, en tant que tête de l’exécutif ?
C’est l’histoire du petit Villepin qui fut première ministresse en son temps –
il était un peu précieux. Et l’histoire du grand Chichi qui présidait en fuyant
tout emmerdement pour finir son quinquennat bien aimé du peuple malgré la
reprise des essais nucléaires et son épouse du même métal.
Ils ont dit « bon ben les gars, on va faire le CPE. »
Il s’agissait de permettre aux entreprises d’embaucher des jeunes, y compris
des blancs, aux conditions du bon vieux temps de l’esclavage tout en leur
versant une indemnité digne de la moitié du montant minimum. Les jeunes n’étaient
pas contents et le dit peuple était un peu énervé. Alors personne n’était satisfait
et les manifestations continuaient dans la rue après le vote de loi instaurant
ce truc vu qu’on les prenait tout de même un peu pour des cons, ce qui se
voyait autant que la peau de mon ventre quand je n’ai plus de tee-shirt 6XL à
me mettre même si les raisons ne sont pas identiques.
C’était tellement le bordel que le grand Chichi a dit ah ben
c’est trop on va arrêter ce truc. La Constitution disait quand même qu’il
devait promulguer une loi votée alors il l’a promulgationnée tout en faisant
voter par le parlement une loi d’annulation ou un truc comme ça, les détails ne
m’intéressant pas trop, ils m’échappent.
L’exécutif fut alors couvert de ridicule.
Ben mes cochons, Elisanuel et Emmabeth, j’ai bien l’impression
que l’on fonce droit vers le même mur honteux. Le peuple est mécontent. Il y a eu
les gilets jaunes, le virus, la guerre en Ukraine, l’inflation et tout ce que j’ai
oublié et ça commence à bien faire. Les manifestations pourraient bien se
multiplier et nous frôlerions alors la révolution ce qui m’empêcherait d’aller
siroter mes demis sereinement dans un des bistros du quartier.
J’ai l’air de déconner mais pas du tout. La vérité est que
je le sens mal et les barouds d’honneur me les brisent.
En retirant ce projet de loi et en passant quelques trucs un
peu sociaux voire sociétaux comme l’obligation pour les clergimanes pédophiles
d’épouser leurs victimes vous « achèteriez la paix sociales » et ça m’arrangerait
assez.
Ensuite, vous pourriez faire passer n’importe quelle loi
comme celle sur l’immigration qu’il y a dans les papiers pour donner une heure
de gloire à M. Darmanin. Nous retrouverons une situation normale : les
gauchistes seront scandalisés et les fachistes trouveraient que vous n’en
faites pas assez. Mais le mécontentement ne serait que fictif dans la mesure où
personne n’a rien à cirer de l’immigration du moment que ce n’est pas chez eux.
De toute manière, une loi ne servirait à rien : vous n’allez
pas bloquer les frontières où, alors, il faudrait faire venir des travailleurs
immigrés pour construire des murs qui pourraient les empêcher de repartir à l’issue
des travaux. Toutes les autres mesures seraient inutiles sauf si elles sont
vraiment inhumaines au point où, même dans les pays exotiques, on aurait du mal
à les supporter.
Je pourrais être critiqué, pour ces propos, par mes amis
réactionnaires mais le journal Le Monde nous en dit plus sur ce
projet : « Ce texte, intitulé « Pour
contrôler l’immigration, améliorer l’intégration » et que Le Monde a consulté,
se décline en vingt-cinq articles. Il y est question de conditionner l’octroi
de titres de séjour pluriannuels à la maîtrise d’un certain niveau de français
; de créer un titre de séjour « métiers en tension » accessible aux
travailleurs sans papiers ; de renforcer la « double peine » en levant
certaines protections à l’éloignement à l’encontre d’étrangers délinquants ; de
pouvoir retirer un titre de séjour à un étranger « en cas de rejet des
principes de la République » ; de réformer la procédure de demande d’asile pour
raccourcir les délais d’instruction ou encore de simplifier le contentieux des
étrangers. »
Admettez tout de même que les violons n’ont pas fini de
déborder. Mais on s’égare. Je lutterai contre ce texte dans mon blog quand le
moment sera venu et j’aurai du mal à trouver un angle d’attaque tant je m’en
contrepignole. Vos suggestions seront les bienvenues. Pour les manifestations à
venir, veuillez veiller à ne pas boucher les entrées des brasseries.
Il vous reste un double volet à régler : comment annoncer
l’annulation de la réforme des retraites aux Français tout en ménageant vos
supporters qui soutiennent cette réforme des retraites par pur principe. Tout d’abord,
je pense que c’est Manu qui doit s’y coller vu qu’il y a déjà eu une réforme avortée
lors du premier quinquennat et que c’est lui qui a promis des bêtises.
Vous pourriez commencer par inviter à déjeuner (le même
jour, pour limiter les frais) le président du Conseil de l’Europe et la petite
dame que personne ne connait mais qui préside la grosse commission pour leur
demander de préparer le terrain (encore plus) avec un discours qui consisterait
à dire « ah ah, il y a un malentendu
assourdissant : l’Europe n’a pas à donner des consignes sur la gestion des
comptes sociaux et le système des retraites n’est pas en danger même si le
déficit c’est mal, hein ! » Ensuite, vous pourriez envoyer vos
troupes détailler des éléments de langage du genre « ah ben ils font chier les socialopes, la réforme qu’ils ont
faite du temps d’Hollande avec Touraine, était bien pire que ce que l’on fait
là mais comme ils ont fait passer leur usine à gaz sur la pénibilité, le peuple
s’est endormi. »
Après, vous profitez des scandales des Ehpad pour lancer une
grande consultation (ça fait toujours bien) sur le thème « putain de bordel, comment ça se fait que les structures
publiques dépendant des municipalités ou des hôpitaux assurent un bon service
pour 1800 euros par mois alors que les structures privées arnaquent des gens
qui paient quand même 3 ou 4 000 balles avec un service qui pourrait
donner des érections à Mme Lucet ? ». Cela n’est qu’un exemple
mais aussi un excellent prétexte pour annoncer une grande réforme à venir (officiellement…)
autour du vieillissement de la population et donc remettre en cause les actuels
projets sur les retraites en faisant semblant de ne pas y toucher.
Enfin, Manu fera un grand discours solennel : « je vous hais, compris ? » Après, il
faudra broder, je ne peux pas tout faire. « Au
vu des mouvements sociaux, nous voyons bien que vous êtes beaucoup plus
préoccupés par les conditions de la retraite, la dépendance, la fin de vie que
par l’âge de la retraite » même si c’est tout le contraire « nous allons donc entamer de nouvelles concertations globales. »
Puis vous n’avez pas de raison de vous faire chier : « nous allons commencer par proposer en urgence une légère
augmentation des cotisations au-delà du plafond de la sécurité sociale pour
améliorer les petites retraites puis pour indexer les populations sur les
salaires » ou n’importe quoi d’absolument incompréhensible.
A vous de jouer, mes cher.e.s, et agréez donc en passant mes
salutations distinguées et tout ce que vous pourrez agréer.