Je vous conseille chaleureusement la lecture de cette
interview de Julien Dray avec laquelle je suis totalement d’accord (sauf
sur la dotation de 50 000 euros aux jeunes). Je ne vais pas vous le
résumer. Débrouillez-vous. Ce qui n’est pas facile, il évoque différents sujets.
J’m’vais commencer par revenir sur un paragraphe :
« Jean-Luc Mélenchon n’est
pas dans une logique de rassemblement, mais de sommation sur le reste de la
gauche. La France insoumise serait la pureté, et ceux qui ne les suivent pas
sont potentiellement des traîtres. Il a réussi la petite union de la gauche,
pas la grande, parce que, au fond de lui, il n’a pas envie de conquérir le
pouvoir. Une gauche unie avec seulement 26 %, cela lui convient parfaitement :
ce serait une forme de pureté mais qui resterait toujours minoritaire. »
J’ai moi-même une certaine pureté mais je n’avais jamais
abordé cet aspect : Mélenchon n’a pas envie du pouvoir. Il n’empêche que
Juju a parfaitement raison : la gauche française telle qu’est est architecturée,
à savoir une LFI majoritaire au sein d’une Nupes, ne peut pas dépasser 26%. Or,
pour gouverner, l’histoire a montré que la gauche devait avoir au moins 40% des
électeurs qui la suivent (au premier tour d’une élection nationale. C’est le
minimum : celui obtenu à la présidentielle de 2012, montant à 47% pour les
législatives).
En 10 ans, donc, la gauche non extrême est passée de 46,77 à
29,36 (dont 25,66 pour la Nupes). La question n’est plus de savoir pourquoi :
les divisions sont trop fortes, à gauche, pour que l’on puisse trouver un
compromis, certains continueront à critiquer la politique menée du temps d’Hollande
et les autres un trop fort radicalisme…
Si la question n’est pas de savoir pourquoi, il faut bien
reconnaître que la stratégie Nupes à la sauce Méluche est un échec (même si
elle a permis de sauver quelques meubles par rapport à 2017). Non seulement la
conquête du pouvoir ne s’est pas faite mais il faudrait augmenter de 30 ou de
50% le taux de votants pour la gauche.
Voire plus. Pour passer de 26 à 40, il faut bien monter de
plus de la moitié…
Parmi les données chiffrées pouvant participer à cet échec,
il faut citer l’arrivée d’un ovni, le centre, venu de nulle part et dépassant
les 26%. Le système électoral a fait le reste pour expliquer comment un parti centriste
peut gouverner avec 26% au premier tour alors qu’il en faut 40 à un parti de
gauche. Je me répète : tout cela est factuel.
Je considère que je fais partie de ces « 14% » qu’il
faudrait aller chercher mais il est absolument hors de question, pourtant que
je vote pour la Nupes. Ne me dites pas que je ne suis pas souple : je n’ai
pas voté aux législatives pour une raison simple, c’est qu’il était sûr que l’élu
de ma circonscription serait Nupes. Et chacune des personnes de gauche n’ayant
pas voté Nupes a ses raisons… Il faudra bien des concessions de la Nupes, donc
de LFI, pour sortir de ces 26%. C’est encore une fois purement factuel.
La première concession est d’admettre qu’on est mal barré.
La seconde sera de lire Julien Dray : « Le
défi pour la gauche n’est pas seulement de faire l’union ou un programme clefs
en main, mais d’avoir l’ambition conséquente d’un Conseil national de la résistance,
avec un projet limité, qui ne promette pas de tout changer mais qui fixe des
priorités vitales pour remettre le pays sur pied et corriger cette société qui
a continué à se déliter sous Emmanuel Macron. »
Rappelons que le CNR fut un groupe de lascars en désaccord
qui ont tout de même travailler ensemble pour nous sortir de la mouise.
Mes « 14% » n’en font pas moins que je devrai être
dans l’électorat du PS. « Je suis en colère
contre la direction actuelle du PS dont je ne connais toujours pas la position
réelle sur la montée des violences dans la société par exemple, sur la maîtrise
des flux migratoires par la défense de quotas, sur la montée de l’islamisme
radical antisémite, ou même sur la VIe République. Le PS brille surtout par ses
impensés. Si ce travail intellectuel avait été fait, le PS serait redevenu le
centre de gravité de la gauche et le débat avec Jean-Luc Mélenchon aurait été
bien différent. » Ce n’est, encore une fois, qu’un extrait de ce
que dis Julien Dray et je suis parfaitement d’accord, encore une fois. Que le
PS redevienne le centre de gravité de la gauche n’est pas mon propos aujourd’hui
(je le pense pourtant nécessaire au sens où la victoire ne peut être qu’au
centre).
Mais il y a bien un tas de sujets sur lesquels le PS doit
clarifier ses positions et sur lesquels il ne peut pas y avoir de concession. J’en
ajouterais bien quelques-uns à ceux de Dray (l’Europe, le nucléaire, l’évolution
du monde du travail…) mais pourrait-on avoir une liste satisfaisant tout le
monde ?
Mes copains de gauche défenseur de la Nupes sont concentrés sur
le programme. Quel doit être le niveau du SMIC ? Quel doit être l’âge de
départ en retraite ? Comment devons-nous avancer dans le développement des
énergies renouvelables ? J’en passe : il y avait 600 points, je
crois, au catalogue « l’Avenir en commun », programme de LFI et base
de la Nupes. Mais on s’en fout. L’ami Julien Dray met dans la balance une bourse
de 50 000 euros pour les jeunes et je ne suis pas d’accord. Peu importe.
D’ailleurs, j’ai mis d’emblée le nucléaire. Je veux bien
discuter de tout. Des 50000 balles à la manière avec laquelle on pulvérise nos
atomes. Par contre, je ne voterai pas pour un parti opposé au maintien de l’investissement
dans le nucléaire tant qu’on n’a pas un autre mode d’approvisionnement en
énergie. Mais je ne peux pas en vouloir à ceux qui ne sont pas sur la même longueur
d’onde car on ne peut pas être d’accord sur tout si on veut une majorité.
C’est pour cela qu’il faut que les partis politiques se
positionnent sur les grands sujets et qu’il faut arrêter d’avoir une hégémonie
de l’un d’entre eux. Et, en fonction de ces grands thèmes, les électeurs
pourront trancher, dans les urnes. Il ne faut pas le faire avant. Sinon, le
vote devient une sanction. Par contre, si le PS met à son projet les 50000 et
la défense du nucléaire, je peux voter pour lui…
Un catalogue de mesures électorales est inutile si des grands
choix ne peuvent pas être offert.
Non mais sans blague.
Que les partis se mettent au boulot et qu'on arrête ce bordel incessant ! Que diable.
On peut dire ce qu'on veut de Juju, mais il fait une parfaite analyse de la situation ! Merci d'avoir partagé son interview.
RépondreSupprimerPour les 50 000 € aux jeunes, ça fera le même effet que le revenu universel de Hamon. Donc, non. Ça ne sert à rien de lancer ce genre d'idée, sinon de casser la dynamique d'une gauche socialiste qui doit se reconstruire.
Signé: un des 14%
Si on est d'accord sur les 50 000 balles, on ne l'est pas nécessairement sur le revenu universel... Mais on se rejoindre sans doute sur le fait que c'est difficilement vendable (d'ailleurs Hamon en a fait largement les frais).
SupprimerJ'ai lu, c'est bien. Sur le nucléaire, je partage ton avis (et celui là, je ne suis pas pro du lobby nucléaire, mais si on ne me propose rien d'autre, comme c'est de très loin le mieux qu'on fonce... Enfin pas trop vite, après 40 ans de rien et quelques mandats à tuer la filière, aujourd'hui il faut réapprendre à marcher).
RépondreSupprimerAprès je ne suis pas forcément OK avec ton constat que Mélenchon ne veut pas le pouvoir. Je pense qu'il en rêve, mais pas par les urnes, qu'il lui arrive tout cuit. Par un coup de force.
Pour moi cet homme et ses affidés sont des Pinochouilles en puissance et des dangers véritables.
Pour le nucléaire, je me doute...
SupprimerPour Méluche, son défaut est le propre de gauchistes : beaucoup ne veulent pas le pouvoir mais uniquement cheffer dans leur propre camp.