Mélenchon en 20 minutes

 

Dans un moment d’égarement, j’ai lu l’interview de Jean-Luc Mélenchon dans 20 minutes. Je ne me remets toujours pas du nombre de mensonges, d’erreurs, d’approximations… C’est presque à chaque phrase.

A la réflexion, cette personnalité s’adresse exclusivement aux militants et pas au grand public qui ne pourrait pas être convaincu par le moindre des « éléments de langage ». On dirait une machine à alimenter des réseaux sociaux internes.

Ca commence dès la première phrase ! « Les macronistes ont voulu par tous les moyens empêcher un vote sur la retraite à 64 ans. » Le grand public dont je parlais n’en a probable rien à carrer mais la vérité est pourtant bien que c’est LFI qui a empêché le débat sur le texte, et le vote, en pratiquant de l’obstruction parlementaire, il y a quelques mois.

Je vais revenir sur certaines de ces pépites mais n’allez pas croire que mon billet est orienté contre LFI, aujourd’hui, je souhaite leur montrer leurs erreurs. C’est de la faute à TikTok. Ils m’ont refilé, ce matin, une récente interview de Jordan Bardella (aux « quatre vérités » d’hier, je crois). Ce garçon, certes haïssable, est clair, net et précis, comme on dit. Aimable avec le journaliste, n’hésitant quand même pas à le renvoyer dans ses murs au besoin, répondant à chaque question dans un sens plaisant pour les auditeurs…

Après, on va s’étonner de la montée du RN… Dans les sondages de popularité, Bardella a cinq points d’avance sur Mélenchon (et cinq de retard sur sa cheffesse mais 15 d’avance sur Manuel Bompard, patron de LFI alors qu’il est celui du RN). Il ne faut pas s’étonner.

 

Revenons à l’interview de notre Jonluk.

Deuxième phrase (je n’invente rien, je pourrais tout citer) : « Autrement dit, le macronisme est aujourd’hui à l’Assemblée nationale une machine à bloquer, dans l’attente désespérée d’une alliance avec Les Républicains ou le RN. » La vérité – la stricte vérité – est que c’est LFI qui va voter avec le RN pour bloquer une loi qui vient d’être ratifiée. Je ne critique pas le fait de vouloir revenir sur cette loi. Je me contente de rétablir un détail qui n’échappera pas aux yeux du public. Comment faire croire aux braves gens que Jordan est l’arrière-petit-fils de Philippe (Pétain…) si on vote comme lui ?

Troisième phrase (si !) : « Le parti macroniste est devenu quasi antiparlementaire : il passe son temps à dénoncer les uns, les autres, les comportements, les tenues. » Dit Méluche en dénonçant les uns, les autres et les comportements…

Quatrième (moins délirante, tout de même) : « Maintenant, il empêche les députés de voter sur leur propre texte ! » Mis dans le bon sens, la Macronie empêche de voter un texte annulant un texte que LFI avait empêché de voter en pratiquant de l’obstruction parlementaire. Il faudra bien que ce délire total cesse !

 

Je vais accélérer. Passons à la question suivante (en gras, la question) : « Ils s’appuient sur l’article 40 de la Constitution, qui précise que les parlementaires ne peuvent aggraver les dépenses publiques…

Dans ce domaine, il y avait un usage constant. Nous pouvons citer des dizaines de textes gagés par des taxes sur le tabac ou l’alcool […]. Pourquoi ? Parce que l’article 40 a toujours été contourné dans les initiatives parlementaires. Sinon comment faire des propositions qui ne coûtent absolument rien ? […] Éric Coquerel [président de la Commission des finances] s’est donc appuyé sur la jurisprudence, son argumentation est bien plus assise que celle de la présidente de l’Assemblée nationale, qui a une interprétation purement politicienne de l’article 40. » Jean-Luc (pour ma part, cette fois, c’est plutôt les mouches que Jean-Luc) nous explique que Coquerelle s’appuie sur un article pour faire passer un texte délirant par rapport à notre Constitution, avec une pratique haïssable, mais que ce sont les autres qui ont une interprétation purement politicienne.

 

Pour l’instant, j’ai tout cité. Je passe quelques lignes, sinon on y sera encore à l’heure de l’apéro. A propos de Macon : « Dans le premier quinquennat, son idéologie libérale a mis un terme à une certaine forme de démocratie sociale. » Il faudrait arrêter de jouer avec le mot « libéral ». Comment peut-on qualifier de libéral une politique qui a consisté à dépenser plus de pognon de l’Etat pour surmonter la crise sanitaire ? Sans compter, pour faire un clin d’œil à mes copains, qu’obliger les gens à se vacciner n’est pas franchement libéral…

En outre, le texte de Macron pour les retraites est là pour préserver le système ! On sera d’accord sur le fait que c’est de la connerie. Il n’empêche qu’il n’a pas introduit de capitalisation, de mécanismes par point… et que nos retraites restent les plus « justes » au monde ! Il n’a rien de libéral.

« Avec Monsieur Macron, nous ne sommes plus vraiment en République, c’est certain. » Certain ? Il sait ce qu’est la République ? Ou il confond avec la République populaire démocratique de Corée ? Il va falloir envisager de fumer autre chose… Ou alors je me trompe. C’est quoi ce bordel, au fond ! Un gouvernement qui s’appuie sur notre « loi fondamentale » pour faire passer ses textes ? Sur des articles prévus par « les pères fondateurs » pour permettre au régime de subsister, notamment aux populismes divers ?

Le militant de gauche sera convaincu par la justesse de son propos mais le Français de base, comme je serais si je ne faisais pas 135 kg, n’a pas oublié son « la République, c’est moi ». Ses outrances. Le bordel foutu à l’Assemblée. Le blocage parlementaire. Les tenus non respectueuses des députés (il en parlait, plus haut)…

 

« Leur premier devoir est de respecter le peuple et ses représentants, ils ne le font plus. Députés frappés dans la rue […]. » Youhou ! Les Français ont vu les images. « C’est pourquoi nous allons saisir les instances internationales qui sont déjà en alerte : La Commission européenne des droits de l’homme et le Comité des droits de l’homme de l’ONU. » Ce dernier machin, ce n’est pas là où a été désigné un président iranien, récemment ? Vous pensez vraiment que les Français vont aimer que l’on fasse appel à ces organismes internationaux pour faire la paix chez nous, comme s’il y avait des massacres des populations ? « je vais l’dire à ma mère ».

« C’est important de montrer la dérive du personnage, son évolution idéologique. Il a d’abord souligné les talents de Pétain et de Maurras, deux traîtres et antisémites notoires. » Profil bas, s’il vous plait. La Macronie n’a pas fait appel à des antisémites notoires, comme Corbyn, pour l’appuyer pendant sa campagne.

 

Ah ! Et ça recommence : « Mais ce n’est pas un cas isolé en Europe. Nous nous dirigeons, et c’est nouveau en France, vers la formation d’un « bloc bourgeois », qui unifie de l’extrême droite à toute la droite traditionnelle, jusqu’au centre. » Je ne pense pas que traiter les électeurs d’extrême droite de bourgeois sera très efficace. Et je recommence aussi : après demain, il y a un texte présenté par un groupe politique contre le gouvernement et qui devrait être voter par LFI et le RN. Cela étant, si pour Méluche, plus de la moitié de la France est composée de Bourgeois, on peut laisser ceux qui s’imaginent représenter le peuple s’unir…

Il insiste (la question en gras) : « Il y a pourtant des différences de fond entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron… Nous, insoumis, ne partageons plus trop cette appréciation, parce que le nombre de votes communs entre le RN et la majorité Renaissance est considérable. » Quid du vote de jeudi ? C’est fou de balancer tant de contrevérités…

 

« Nous avons remporté une victoire idéologique : une majorité de Français est convaincue que la retraite à 60 ans est une bonne idée. Il y a une bascule. Son heure viendra. » Il y a une majorité de Français contre la retraite à 64 ans, ça ne veut pas dire qu’une majorité des Français est pour la retraite à 60 ans, surtout dans un pays où l’âge moyen du premier emploi est de 23 ans (ce qui veut dire que beaucoup commencent à bosser après).

Ah ! On est en plein dans l’analyse de « l’opinion des Français ». « Dans cette séquence des retraites, le RN s’est tenu à l’écart des manifestations. Pourtant, les sondages estiment qu’il est le parti qui en sort vainqueur… C’est faux. Dans les sondages, la Nupes arrive en tête des élections européennes ! » Ce n’est pas la question posée… Les sondages de popularité mettent en avant les personnalités du RN. Et les sondages sur les européennes montrent que la gauche ferait plus de voix en partant dispersée et aurait plus d’élus. Ils montrent que LFI risque de prendre une baffe monumentale lors de ce scrutin.

« La Macronie, qui est en train de « s’extrême-droitiser », est entièrement responsable de la montée en puissance du RN, qui ne nous a pas pris une voix dans la bataille. » Si la Macronerie « s’extrême-droitisait », elle devrait prendre des points à l’extrême droite. Or c’est cette dernière qui monte. Jonluk peut dire ce genre de bêtise, ça fait plaisir aux militants. « Le Pen gagne des voix chez Macron. Nous avons approfondi notre enracinement dans la lutte sociale. Nous sommes plus nombreux que nous ne l’avons jamais été. » Voila des affirmations…

« Nous avons distribué sur les piquets de grève plus d’un million d’euros par notre caisse de grève insoumise ! » Ca fait combien par gréviste et par jour de grève ?

 

« Certains partenaires de la Nupes ne sont pas favorables à une liste unique aux européennes en 2024. L’absence d’accord, c’est la fin de la Nupes ? C’est possible. La Nupes est en péril si elle n’est même plus un accord électoral. » Elle était un accord électoral pour sauver les meubles à des législatives. A part ça… On ne va pas discuter, j’ai toujours pensé que c’était de la connerie. « S’il n’y a pas d’union aux européennes, il n’y en aura pas non plus aux municipales. Pourquoi y en aurait-il une à la présidentielle ? » Quand une union a-t-elle fait gagner la gauche à une présidentielle ?

Il prône l’union mais on peut lire, juste après : « Madame Tondelier nous traite de « forceurs » ! Imaginez qu’on réplique sur ce ton ! » et « Dans Le manifeste du Parti communiste, il est écrit : « Les communistes n’ont pas d’intérêts différents de ceux des travailleurs. » Donc, s’ils n’ont pas d’intérêts différents, allons-y ensemble. Cela ne ferait pas de mal de rappeler à Fabien Roussel, s’il n’a pas lu Marx depuis longtemps, qu’il y a dedans d’autres leçons que la défense des barbecues. »

Oh ! Les coups bas…

 

« Je vis avec la jeune génération dans une ambiance d’amitié. Parmi les anciens, certains, pour l’instant, font des caprices et sont un peu fâchés, mais ça leur passera. Ça leur passe toujours. » Je traduits : « je suis dieu, ils reviennent toujours vers moi car j’ai toujours raison ».

 

Il n’y a que la toute fin de l’interview où je ne remets pas grand-chose en cause. Sauf qu’il oublie que Manuel Bompard et surtout Clémence Guetté sont totalement inconnus du public. Pour le reste, tant de délire est désespérant...