Avec « les zémeutes », on parle beaucoup des plans
banlieues, dont celui de Jean-Louis Borloo, enterré en grande pompe (du 45) par
Emmanuel Macon au début de son premier quinquennat mais je me suis demandé qui
pourrait me regarder droit dans les yeux et me dire que s’il avait été appliqué,
on n’aurait pas eu cette révolte de pingouins ? J’ai passé une partie de
la soirée d’hier à y réfléchir pour en faire un billet aujourd’hui et j’étais
extrêmement « négatif », tournant en rond dans mes conclusions.
Il faut quand même bien admettre que c’est l’existence même
de ces banlieues pourries, de ces « territoires séparés de la République »
qui est en cause, pas l’absence d’éducateurs sportifs ou de ligne de bus opérationnelle.
J’ai donc étudié le rapport Borloo, ce matin (pdf).
Il y a des choses très bien mais qui ne font certainement pas la rue Michel. Je
suis alors tombé sur ce
récent article de LFI qui m’a conforté dans mes positions…
La fainéantise ne m’étant pas étrangère, je vais recopier le
début ici : « Environ 8% de la population
française, soit cinq millions de
personnes, habite les quartiers dits périphériques. Ce sont des quartiers
devenus prioritaires de la politique de la ville, qu’on identifie surtout par
leur niveau élevé de pauvreté. Le revenu disponible médian est de 14 000 euros
par an en banlieue, contre 22 000 euros au niveau national.
Plus de la moitié des enfants,
six sur dix, sont confrontés à la grande pauvreté, alors que la moyenne
nationale est plutôt de deux enfants sur dix dans cette situation de détresse.
Ces inégalités criantes se confirment dans les chiffres du chômage ou dans ceux
du RSA, l'allocation attribuée à ceux dépourvus d'autres sources de revenus.
Les multiples « plans banlieue »
déployés depuis quarante ans par les gouvernements successifs n’ont pas permis
de résorber ces fractures. L’argent injecté a servi à rendre ces quartiers plus
vivables, en construisant des routes, des transports en commun, des équipements
sportifs ou culturels, en améliorant surtout le logement. Quarante-huit
milliards d’euros ont été investis dans la politique de la ville depuis 2003,
date de création de l’Agence nationale de rénovation urbaine imaginée par
Jean-Louis Borloo, le ministre de la Ville de l’époque, pour améliorer la
mixité sociale. »
Quarante-huit milliards en un peu moins de vingt ans. En
gros, 2,5 par an. C’est dérisoire (voir la démonstration dans l’article). Cinq cents
euros par an et par habitant… Pour réhabiliter un habitat pourri ! Et il
faudrait rénover les logements, installer des services publics, doubler les
écoles, les équipements…
Je me doute bien, quand même, qu’on ne peut pas pondre facilement
le pognon, ma poule (même si l’article rappelle bien qu’on arrive à en trouver
pour d’autres urgences). Je me doute aussi qu’on ne peut pas tout faire en
claquant des doigts (le fameux métro du grand Paris, par exemple, indispensable
pour rapprocher les banlieues entre elles ou de la capitale, coûte la peau des
fesses et prend un temps fou à être construit.
Je vais donc m’abstenir de donner des leçons à nos braves
gestionnaires et autres élus et je suis bien incapable, évidemment, de sortir
un plan de ma poche, d’autant que, on l’a vu, il serait voué à l’échec…
J’ai tout de même une piste : la priorité doit être
mise à la mixité sociale, ce qui n’est pas un gros mot. Il faut faire des quartiers
avec des logements « en accession à la propriété », d’autres en « location
normal » et d’autres en « habitation à loyer modéré », que ces
quartiers soient ces immondes machins plein de bâtiments horribles (qu’il
faudra bien finir par raser plutôt que de crier au génie de Le Corbusier) qui
nous rappellent l’union soviétique… ou qu’ils soient les centres de nos villes
actuelles.
Je ne sors pas cela d’un chapeau pour faire plaisir à ma
clientèle gauchiste ou pour faire hurler mes lecteurs réactionnaires mais j’habite
une commune qui est la
championne de la mixité sociale. Et c’est le bonheur ! Il faut faire
en sorte que les pue-la-sueur et les fils de bourges vivent dans les mêmes
coins. On n’arrivera peut-être pas à un équilibre avant une quarantaine d’années
mais cela doit être prioritaire par rapport aux nombreux bouche-trous que l’on
peut imaginer au fil des crises.
Le seuil de logements sociaux dans la loi (SRU) est sans
doute trop faible et, en plus, il y a près de la moitié des communes qui ne la
respectent pas ! Comment voulez-vous qu’on s’en sorte si les gamins de
pauvres sont parqués dans des écoles pourries, loin de tout ?
Enfin, on fait un amalgame entre les quartiers en difficulté
et l’origine ethnique des habitants ce qui permet, d’un côté, à une partie de
la droite de multiplier les propos racistes mais, aussi, à une partie de la
gauche, tendance Diallo, à traiter tout le monde de raciste. Dont moi, hier
soir, pourtant heureux d’habitant d’un bled « socialement mixte ».
On ne va pas nier que ces quartiers sont majoritairement
habités par des gugusses issus de l’immigration mais ils le sont surtout en
conséquence de leurs origines sociales (je ne vais pas pourtant balayer
certaines réalités comme des ghettoïsations provoquées par les habitants
eux-mêmes). Il faut arrêter de nier certaines réalités, comme le fait que les
flics font plus de contrôles sur les jeunes racisés mais c’est aussi parce qu’ils
habitent majoritairement dans des banlieues pourries où se développe le trafic
de drogues et je ne sais quelles conneries. Pourquoi iraient-ils me contrôler,
moi, quinquagénaire replet et blanchâtre ?
Il n’empêche qu’avant-hier et je ne sais plus quelle lecture
(sans doute un tweet de Diallo), je n’avais pas fait le rapprochement entre les
émeutes et la racisation des lascars…
Mon côté neuneu, sûrement, mais arrêtons les conneries :
ils ont foutu la merde parce qu’ils n’ont pas de pognon et se sentent oubliés
de la société patati patata, pas pour emmerder les autochtones de souche. Et
les lascars qui ronchonnent du montant de la cagnotte pour le flic cessent de
nous casser les burnes avec leurs faciles émotions dans les réseaux sociaux.
Et se demandent pourquoi les Français soutiennent plus les
flics que les délinquants.
Rien que poser la question provoque en moi une certaine
hilarité…
Le seuil de logements sociaux dans la loi (SRU) est sans doute trop faible
RépondreSupprimerLa loi SRU a permis l'extension des problèmes de banlieues à des villes qui ne les connaissaient pas.
Vous en voulez vraiment plus ?
Non mais dites-nous le si vous trouvez qu'il y a des coins de France qui n'ont pas assez brûlé !
RépondreSupprimerReste calme et prends tes cachets. Au fond, la solution serait que les émeutiers agissent surtout dans les quartiers riches...
SupprimerJe ne crois pas qu'il y ait, en France, le moindre problème de mixité "sociale" entre "pauvres" et "riches". Si beaucoup de maires freinent des quatre fers (massivement soutenus par leurs administrés…) pour construire dans leurs communes des logements dits "sociaux", c'est parce qu'ils savent fort bien qu'ils seront occupés non par des "pauvres" mais par des immigrés, généralement africains, réguliers ou non. Avec tout ce que cela entraîne de tensions diverses.
RépondreSupprimerOn peut trouver cela dommage, regrettable, nauséabond, etc., mais c'est un fait indubitable, et de plus en plus éclatant, même si on s'efforce de le planquer sous le tapis.
De plus, laisser entendre que la pauvreté entraîne naturellement délinquance, cassage, violences, etc. me semble profondément insultant pour tous les pauvres qui ne vivent pas dans nos cités "émotives".
Le problème n’est pas autour de la mixité sociale mais de l’entassement des pauvres ce qui crée différents problèmes. Il faut supprimer ces ghettos.
SupprimerComme je le répondais ci-dessus, il n’y a pas comme seule solution de construire des HLM chez les riches. On peut imaginer par exemple que quand on reconstruit un quartier (c’est arrivé il y a trente ou quarante ans à Bicêtre et c’est en cours à Nanterre), on mixte les logements sociaux et les autres.
Le rapport du Sénat que j’évoque en commentaire dit la même chose que vous et moi (surtout en commentaire, mon billet se voulait plus, au départ, contre les plans banlieue).
Je n’ai répondu à votre dernier paragraphe (j’y viens) ni à un truc : oui les pauvres sont généralement d’origine sud marseillaise.
SupprimerLa pauvreté n’entraîne pas la délinquance. Elle favorise néanmoins quelques phénomènes comme les trafics de drogue, en grande partie à l’origine des émeutes récentes.
Et d’autres trucs, comme des difficultés d’éducation, d’accès à la culture et j’en passe.
@anonyme
SupprimerPensez-vous réellement que les problèmes sociaux soient la seule cause des maux de cette semaine. Ne voyez-vous aucune trace de communautarisme chez les émeutiers ? Comment expliquez-vous que ces insurrections, qui perturbent un peu le fond de violence ordinaire, surviennent toujours chez les populations sud-marseillaises et jamais chez les asiatiques ? La pauvreté et le manque de mixité sociale seraient ils moins pénibles lorsque l'on vient du Viet Nam ? Je crains bien que ces problèmes ne puissent être résolus par 1, 2 ou 3 plans Borlo successifs ou concomitants.
La Dive
J'ai rencontré une fois Borloo dan ma vie. Par rapport aux autres politiques, il m'a semblé très au-dessus du lot.
RépondreSupprimerJe veux bien le croire ! J’ai étudié son plan. Il est bon. Mais voué à l’échec pour différentes raisons (outre son rejet par Macron).
SupprimerPour la mixité sociale dans les habitations, on n'a rien fait de mieux que la baron Haussmann !
RépondreSupprimerOn est d’accord. Je ne sais pas quand c’est parti en vrille. Ou je fais semblant de ne pas savoir.
SupprimerNJ
Pour vous aider à répondre à votre question, prenons un exemple : Il y a à Marseille une cité où des migrants sont arrivés avec pas grand-chose, mis à part les insultes qu'ils recevaient de la population et de son maire de l'époque (voir l'interview de Gaston Deferre à Paris Presse du 26 juillet 1962), où toutes les erreurs d'urbanismes se concentrent (barres de 24 étages, pas de mixité sociale ...) et où pourtant la vie est restée paisible et sans problème de sécurité.
SupprimerLe journal le Monde en a fait un article : https://www.lemonde.fr/societe/article/2016/02/03/a-marseille-l-entre-soi-d-une-cite-sans-immigres_4858481_3224.html
D'après vous, qu'est-ce qui distingue ce quartier d'un quartier d'émeutiers ou d'un quartier livré aux trafiquants de drogues ? Si vous parvenez à répondre à cette question, votre question initiale sera résolue.
La Dive
Je ne ME pose pas de question (mais je suis ouvert aux remarques). Par contre, il y a des trucs que je n’écris pas…
SupprimerJe suis d'accord surtout sur le début de ton billet : personne ne peut affirmer que si le plan Borloo avait été mis en place, tout ce merdier aurait été évité. Je ne le crois pas, comme je ne crois pas que ce gugusse puisse apporter quoique ce soit de bon pour quiconque, à part sa petite personne. A voir son cv d'opportuniste long comme le bras, l'avocat de Tapie a pris sa carte dans une flopée de partis politiques pour finir chez Macron. Je ne comprends même pas comment ce type est admiré et désigné comme le sauveur des banlieues. D.G a raison d'affirmer que ce serait la pire des insultes à faire aux pauvres de dire qu'ils sont voués à la délinquance et au contrôle au faciès.
RépondreSupprimerSigné le vrai et l'unique Captainhaka que tu connais.
C'est rigolo de voir tous ces gauchistes prendre un ancien ministre de droite comme exemple...
Supprimer"D.G a raison d'affirmer que ce serait la pire des insultes à faire aux pauvres de dire qu'ils sont voués à la délinquance et au contrôle au faciès." Sûrement mais il y a des rebeus riches vous au contrôle au faciès. Et je ne pense pas que Didier aurait parlé de contrôles au faciès en fonction de la richesse.
Cela étant ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit. Je n'ai pas dit que les pauvres étaient voués à la délinquance...