En salle

31 mars 2024

La gauche et ses slogans "économiques"

 

Je suis persuadé que la gauche ne gagnera jamais avec des infographies idiotes et des slogans idiots : ils ne font que convaincre les gens de gauche de voter à gauche. Ou à l'extrême droite pour virer les libéraux... 

Prenez celle à gauche, ici. On voit l'aide publique aux entreprises privées augmenter beaucoup plus que les dépenses de prestation sociale. Je l'ai vu beaucoup circuler dans les réseaux sociaux depuis quelques jours. 

Elle masque deux vérités. La première est que les prestations de protection sociale sont cinq fois supérieures aux aides publiques aux entreprises privées. Le coup de la base 100 en 2005 est assez médiocre.



Ces aides publiques aux entreprises est quelque chose qui fait beaucoup parler, de nos jours. Voir l'illustration à droite, par exemple, avec la photo de notre ministre de la dette et du roman porno. 

C'est omettre que les aides en question sont là pour défendre des politiques publiques, comme des subventions à la SNCF pour "l'aménagement du territoire" ou à Orange pour réduire les zones de fracture numérique.  Le reste des aides concerne des prêts et autres crédits mais surtout des réduction des cotisations patronales pour améliorer la compétitivité des entreprises françaises. Serions-nous à un chômage de l'ordre de 7% si on ne l'avait pas fait.


Dans un moment d'euphorie, je vous livre un joli graphique (à gauche) qui montre un peu la même chose : à savoir une augmentation des prélèvements sur les ménages contre une baisse des prélèvements des entreprises. Là aussi, l'échelle est trompeuse : le prélèvement des particuliers a augmenté de trois points, celui des entreprises baissé de 0,5. Ils n'ont jamais été égaux...

La vérité est autre. Voir le graphiques un peu plus bas, à droite. Le prélèvement sur les entreprises, diminué des aides publiques qu'elles reçoivent, restent supérieures à celui chez nos voisins.


A noter que je ne cherche pas à démontrer quoi que ce soit pour la politique économique (à part ce dont je suis persuadé mais qui n'est pas mon sujet, aujourd'hui : nos entreprises ne pourront pas être compétitives face à ceux de nos voisins qui ont un tiers de taxation en moins) mais uniquement qu'il faut arrêter de pointer des chiffres et des slogans dans tous les sens si on veut montrer une petite dose de sérieux (mon sujet aujourd'hui pourrait être qu'il faut négocier au niveau européen une harmonisation de ces trucs mais je n'y crois pas vraiment).



Changeons un peu de registre, pour nous divertir, avec un schéma assez basique : une vulgaire courbe bleue. Que j'ai mise à gauche. Il s'agit de la part du "coût du travail pour les entreprises" en pourcentage de la valeur ajoutée. Il n'y a pas un truc qui vous parait évident ?

Cette part a surtout baissé au début du premier septennat de Mitterrand, avec toutes les "bonnes mesures" prises par la gauche. Faut-il en tirer une conclusion ?



Ainsi, il y a d'autres schémas qui mériteraient une analyse plus fine. Celui à droite, là, a son échelle "du bas" qui n'est pas linéaire. Il représente le taux d'imposition par "décile", soit en fonction du niveau de revenus de la population (à droite, par exemple), on voit le niveau des taxes et impôts pour les 10% avec les revenus les plus bas. Là, je vais virer gauchiste ! Attention.

Tout d'abord, le niveau de progressivité de nos impôts est dérisoire. Les plus pauvres contribuent, en proportion, un peu moins que les autres mais des 10 ou 20% aux 98%, le taux d'imposition reste coincé aux alentours de 47 ou 48%. Les impôts sur le revenu augmente, certes, mais la TVA payée, quant à elle, diminue (toujours en proportion). Il faudrait étudier dans le détail mais il me semble que la part des cotisation salariales et autres taxes sur le salaire (hors IR et CSG) baisse beaucoup. Je n'en tire pas de conclusion. Mais réhabiliter l'impôt progressif sur le revenu me semble nécessaire. 

A la toute droite du schéma, on voit que les 1% des gugusses avec les plus hauts revenus (en gros, cela représente des salaires net mensuels de plus de 10 000 euros) sont largement favorisés.


On arrive vers la fin des jolies illustrations à propos d'un slogan qu'on entend beaucoup à gauche (y compris par les cadres du PS) : "il faut taxer les superprofits".
Pour ma part, je vais oser dire que, comme notre ministre des trous noirs, je ne sais pas trop ce que c'est (c'est en mensonge de ma part, il y a une page Wikipédia à ce sujet, je veux dire que je ne sais pas ce que cela veut dire au niveau d'un slogan).

Il me semble qu'on a déjà un impôt sur les sociétés qui permet de taxer les profits (super ou non).


Cela nous donne l'occasion de mettre un joli nouveau graphique qui montre que l'imposition sur les sociétés non financière est déjà plus importante en France qu'ailleurs (ceci est à relativiser, je ne sais pas si les taux sont toujours d'actualité et si les entreprises n'arrivent pas à faire quelques optimisations). je me demande si une harmonisation ne serait pas nécessaire.

Toujours est-il que je ne veux rien démontrer au sujet des superprofits (il me semble logique d'augmenter fortement les impôts des entreprises qui profitent - même malgré elles - des crises divers pour avoir un bénéfice largement supérieur à l'habitude ; ce qui est notamment le cas dans le secteur de l'énergie).

Mais la gauche gagnerait largement en sérieux et en crédibilité en expliquant ce qu'elle compte faire plutôt qu'en hurlant des slogans...

5 commentaires:

  1. depuis Giscard on voit des graphiques tordus.

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    1. Oui mais disons le : c'est la suite des chocs pétroliers qui a fait qu'on est dans une crise durable ce qu'on a tendance à oublier...

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    2. D'ailleurs, à ce niveau de durée, ce n'est plus une crise...

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  2. De mon point de vue, nous devrions circonscrire les aides publiques aux entreprises au seul domaine de la transition écologique et énergétique (conversion en bio, EnR, rénovation thermique des bâtiments, décarbonation de l'économie, etc).

    Article très intéressant, en tout cas.

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    1. Putain ! Je viens de me rappeler que je te devais une réponse... Désolé pour le retard. Tout d'abord, merci pour ta conclusion !

      Ensuite, les aides à la rénovation des bâtiments doivent être réservées aux bâtiments publiques. Quel que soit le motif, on ne peut pas donner des sous à un acteur privé pour que la valeur de son bien augmente.
      Après, tout doit être analyser. Par exemple, les aides aux entreprises privées pour résorber les "trous numériques" me parait indispensable (de même que tout ce qui touche à l'aménagement du territoire). Il y a sans doute, d'ailleurs, un effet bénéfique sur l'environnement, par exemple en facilitant le télétravail ou en diminuant la nécessité de certains déplacements.
      Enfin, la majeure partie des aides est utilisée pour des exonérations de charges pour améliorer la compétitivité des entreprises français. A la limite, c'est aussi bon pour l'environnement (même si la question n'est pas là) vu que ça va diminuer les transports des produits consommés chez nous.

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