En salle

28 mars 2024

L'ignoble et inutile réforme du chômage


 

Le taux de chômage est propre de son plus bas niveau depuis vingt ans (s’il ne l’est pas, c’est parce qu’il a un peu augmenté en un an : putain de conjoncture), nous dit-on à juste titre. La vérité est qu’il est à peu près au même niveau qu’en 1984, il y a quarante donc, comme par hasard l’année de ma majorité (et l’année de naissance de la patronne du café de la gare mais ça a peu de rapport avec le sujet qui nous préoccupe). Il avait fortement augmenté depuis une dizaine d’années (depuis les chocs pétroliers, en fait, mais on a tendance à oublier que la crise ne date pas des six derniers mois).

Il a connu une première baisse importante à la fin des années 90, lors de « la bulle ». Plus tard, il est reparti à la hausse avec la crise des « subprimes ». Enfin, il connait sa période de baisse la plus longue depuis une dizaine d’années, avec quelques soubresauts liés, toujours, à la conjoncture (dont la crise sanitaire).

On pourrait mettre en parallèle l’évolution de la courbe avec la couleur politique du gouvernement. Par exemple, la plus forte hausse a été faite alors que la droite au pouvoir depuis longtemps, que la baisse la plus subite a eu lieu « sous Jospin » (vive les 35h !) et que la baisse la plus durable a été entamée « sous Hollande ». C’est la stricte vérité mais, pour le dire sans rougir comme une jeune mariée qui couche avec le témoin de son époux pendant le vin d’honneur, il faut oublier les impacts de la conjoncture mondiale et tout ça. J’aime bien rappeler, par exemple, que la baisse récente date des mesures prises par Hollande et décriées par les « frondeurs », comme le CICE, mais n’oublions pas que la baisse est à peu près commune à tous les pays d’Europe.

 


Je ne vais pas illustrer ce billet avec des jolies courbes : il vous suffit de prendre « Google Image » et de taper des mots clés bien sentis pour vérifier que ce que je dis est la réalité, à savoir que les mesures prises par les gouvernements successifs ont peu d’impact sur les chiffres du chômage. Cela fera mal au cul à ceux qui croient fortement à la politique au niveau national mais explique surtout pourquoi ces sujets m’intéressent de moins en moins.

Il n’empêche que, quand le premier ministre dit qu’il veut réformer l’assurance chômage pour parvenir au plein emploi, c’est une gigantesque fumisterie.

Je vais mettre des photos de papillons pour illustrer ce billet : au moins, c’est à peu près beau.

 

Je ne veux pas dire que les mesures prises soient inutiles. Je parlais des 35 heures. Elles ont été un beau progrès social (je ne vais pas cracher sur 10 jours de congés supplémentaire) et elles sont sans-doute permis la baisse rapide de 350 000 chômeurs. On peut toujours négocier. Les gens de droite disent que ce n’est pas vrai patati patata et je disais moi-même deux paragraphes au-dessus que les mesures « nationales » et « gouvernementales » n’avaient pas d’impact. La vérité est qu’on n’a aucune idée des répercussions à moyen ou long terme sur l’économie et le chômage mais que j’ai 10 jours de congés en plus. On me dira que j’ai plus de temps pour dépenser du pognon au bistro mais je n’ai pas plus de pognon à dépenser. L’autre vérité est malheureusement que cette réforme a été mal foutue pour beaucoup…

 


Alors revenons à la réforme promise par Gabriel A table ! : elle sera tout aussi inefficace que toutes les réformes précédentes. Tout au plus aura-t-on quelques variations des indices mais strictement rien de durable ! Il faut arrêter de croire que les gens se complaisent dans l’inactivité, soit au chômage, soit au RSA… C’est bien un truc de droite, ça ! Et je croyais qu’Attal était présumé venir de la gauche. Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas, cela étant. Les mecs voient leur revenus diminuer, ils vont peut-être mettre les bouchées doubles pour retrouver de l’oseille… sauf que tous les chômeurs que je connais cherchent effectivement des emplois et la plupart des allocataires du RSA de mon entourage (comme si j’en avais beaucoup…) sont inaptes au travail pour différentes raisons.

On sait à peu près ce qu’il faudrait faire pour résoudre ce problème du chômage : donner du pouvoir d’achat aux Français pour qu’ils puissent consommer et améliorer la productivité des entreprises françaises pour que les zozos achètent ce qui a été produit chez nous. J’ai dit que je savais ce qu’il faudrait faire mais je n’ai pas dit que l’on savait comment le faire… Nuance. Ca serait trop facile. Par exemple, vous augmentez les salaires pour donner du pouvoir d’achat (ce que ne peut pas décider le gouvernement, évidemment, à part via le SMIC) : cela créera des charges supplémentaires pour les entreprises et diminuera leur productivité. Ensuite, ce pouvoir d’achat miraculeux génèrera une inflation et on se mordra la queue.

Laissons plutôt les économistes mordre quelque chose, comme leurs roustons…

 


Les mesures du premier ministre auront comme principale conséquence de diminuer les revenus des sans emplois et donc de les foutre dans la merde. C’est lamentable.

Il y a quelque chose que l’on peut faire comme améliorer les formations pour répondre mieux et rapidement aux besoins des entreprises ou travailler sur des machins comme Pôle Emploi ou France Travail pour que l’accompagnement des chômeurs dans leurs recherches soit plus efficace, notamment en facilitant les reconversions. Je ne sais pas, en fait, et je ne vais pas donner des conseils à ceux dont c’est le boulot. Et qui échouent depuis longtemps.

Il n’empêche qu’améliorer le marché de l’emploi pour qu’il colle mieux aux évolutions de notre société me semble un progrès, tout comme l’ont été les 35 heures qui ont permis de travailler moins.

Diminuer les revenus de ceux qui n’ont pas de salaire, par contre, est une régression.

 

6 commentaires:

  1. J'aime bien votre phrase de conclusion. Elle peut être reprise avec le même enthousiasme par les rentiers de tout poil, les patrons d'entreprise qui n'ont pas de salaire mais un mandat, les chômeurs et autres allocataires. On voit que vous avez été militant (ou sympathisant ?) au PS ; vous avez l'art de la synthèse !

    La Dive

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    1. Je n'ai jamais été militant et, si je suis sympathisant, c'est plutôt par défaut. Ma phrase est parfaitement claire et "normale" compte tenu qu'elle conclut un billet au sujet des annonces d'Attal.

      Elle s'applique effectivement à tout le monde, cela étant, y compris les patrons : je n'ai pas l'esprit spoliateur.

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  2. je suis dans le bouzin (France travail...) et je dois avouer que j'ai un avis partagé... je n'ignore pas la recrudescence de motivations de certains à trouver un emploi à l'arrivée de la fin de droits. Et je suis convaincu que si on baisse le montant des droits une partie de mon portefeuille de demandeurs d'emplois disparaitra pour des raisons techniques (l’intérimaire ou le saisonnier qui "prend" des vacances ou refuse le CDI proposé ) on evitera peut être les reconversions plaisirs (les célèbres formations macramé de Sarkozy) Mais il faut l'avouer pour la grosse masse de mes "clients", le problème ce ne sont pas les allocations (dans les faits la moitié ne sont pas indemnisé alors si on baisse les allocations, cela leur en gratte une pendant que....)
    Aujourd'hui en tant que technicien mon problème c'est d'avoir un portefeuille de 250 demandeurs à accompagner (je suis dans la moyenne basse), des formations inadaptés (c'est beau de parler de reconversion mais aujourd'hui j'ai plus des problèmes de FLE, illettrisme, analphabétisme... reconvertir le soudeur en chauffeur livreur qui se reconvertit en maçon... pas de problème.. Mais essayer de reconvertir un ukrainien/afghan/paumé du coin alors qu'il ne sait pas lire / ecrire.. et qu'il n'y a pas de dispositifs existants ? France travail n'a pas vocation à remplacer l'éducation nationale) Sans parler des difficultés sociales (le biberon à 12°, les fumettes, problèmes psy, les mères célibataires sans permis sans diplome, etc...;) la réalité de mon bassin d'emploi à ce jour c'est que j'ai pléthore d'offres (donc baisser les allocations, au final, ce n'est pas un problème... il y a du boulot...) mais c'est la distance de plus en plus grande des demandeurs d'emplois vers l'emploi... Comme vous le dites, le chomage a baissé ces dernières années.. Et il a si bien baissé que l'on se retrouve (en tout cas par chez moi) à gratter les fonds de tiroir...

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    1. Oui, il y a beaucoup à faire. Je suis notamment assez sensible aux formations pas adaptées mais aussi à certains difficultés. Il y a une vingtaine d'années, j'avais un pote d'une cinquantaine d'années qui était imprimeur mais qui avait refusé de se convertir aux moyens numériques, préférant rester à l'offset (et autres machins, je n'y connais). Une espèce de blocage... Il considérait son métier comme art, la matière de mettre ou de mélanger les encres...

      Et je suppose qu'il y a des jeunes qui ont accepté de se former et de prendre sa place et qui, maintenant, pointent au chômage car il y a de moins en moins d'impressions... Mais je m'égare.

      C'est de la folie de ne pas voir tous ces aspects (ceux que vous citez et les exemples que je prends dans mon entourage) sans compter l'incapacité "psychique" à travailler avant de toucher les pauvres au portefeuille.

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  3. Bertrand Delanoë a un avis bien tranché :

    "Bertrand Delanoë, qui n'est plus encarté dans aucun parti mais est militant de la CFDT, "pense qu'il y a sûrement des réformes à faire" car "il faut chercher l'efficacité de la dépense publique". "Mais surtout pas en s'en prenant aux chômeurs", a-t-il fait valoir."
    Hélène

    https://www.bfmtv.com/politique/parti-socialiste/un-certain-nombre-de-defauts-se-sont-aggraves-delanoe-etrille-la-politique-sociale-de-macron_AD-202403300294.html#xtor=AL-68


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