Battre le RN : oui mais pas n'importe comment !

 

L’heure est surement très grave. Ma copine CC a repris ses billets politiques… Je vais tout de même sadiquement la reprendre sur certains points, pour le principe. Tout d’abord, elle affirme que la décision de dissoudre est mauvaise. Je n’étais pas loin de penser la même chose mais il faut prendre du recul : LR avait annoncé qu’il voterait la censure sur le prochain budget. Le gouvernement allait tomber à la fin de l’année. La situation est inextricable.

C’est à la suite de son texte que je voulais en venir : « L’extrême droite prendra les rênes. En Italie, c'est fait. Aux Etats-Unis, Trump a été élu durant 5 ans et aujourd’hui les Américains s’apprêtent à voter à nouveau pour lui. On ne joue pas ainsi avec le feu, on ne brise pas, juste pour s’amuser, les fondements de la démocratie. Car l’extrême droite n’est pas un petit parti, n’est plus un nain de l’échiquier politique : il a des villes, des députés et quelques sénateurs. Les élus du RN ont acquis une expérience, des compétences. Ils prendront le pouvoir et utiliseront les rouages démocratiques pour le garder. Et ils trouveront des gens de bonne volonté pour les aider : une fois qu'un parti a le pouvoir... »

Je suis d’accord : la situation est grave. Et tout ça. Mais la démocratie est aussi le respect des électeurs et si ces ânes ont mis le RN en tête, c’est peut-être parce que les partis traditionnels ont échoué et ne respectent pas les attentes des électeurs.

Je continue un peu : « Ils mettront en oeuvre leurs idées mortifères. Pour avoir la majorité, ils feront alliance avec Marion Maréchal, avec Zemmour, avec Philippot ou Lalanne, peu importe. Ce sera l’alliance du pire et ils n’hésiteront plus à montrer leur vrai visage. » Il faut tout de même se dire qu’une partie des électeurs français se disent que la gauche « modérée » qui fait alliance avec LFI fait l’alliance du pire…

Encore ? Un peu plus loin : « Si l’on souffrait déjà sous Macron, ce sera pire avec le FN. Ne croyons pas qu’ils feront une politique sociale, ce sera tout le contraire. Jamais, durant leurs années à l’assemblée nationale ou européenne, ils n’ont voté pour autre chose que pour une politique néo libérale. » Ils ont voté et les électeurs ont voté pour eux. C’est la démocratie. Peut-être que les électeurs veulent cette politique, au fond !

« Et ils reviendront évidemment sur toutes les avancées sociétales : les droits des femmes, des LGBT reculeront, parce que c’est leur ADN. Plus de plannings familiaux, plus de mariage pour tous, le droit à l’avortement réduit. » Pardon ? Il y a quelques mois, la gauche se réjouissait d’avoir sanctuarisé l’IVG dans la Constitution, par exemple, et on se rend compte maintenant que c’est faux (ce que je disais et on n’était pas nombreux). Qui ment aux électeurs ? Le RN ou « nous » ? Les droits des LGBT ? Je suis pour… Mais peut-on raisonnablement penser que cela n’exaspère pas les électeurs de voir la gauche s’occuper plus des droits des minorités ?

 

Loin de moi de dire que ces sujets ne sont pas importants, que l’extrême droite n’est pas un danger pour le modèle de société que je souhaite mais peut-être nous trompons-nous dans les arguments que nous adressons aux électeurs…

Je saute une partie du texte (et change donc un peu de contexte) : « on supprime les bureaux de poste et le train ne s'arrêtent plus dans les gares de campagne ». Vous pensez vraiment que les bureaux de poste intéressent vraiment des gens qui n’envoient plus de courrier et que les gares passionnent des gens qui ne prennent jamais le train ? Vous pensez vraiment que le transport ferré est l’avenir pour le désengorgement des territoires ?

 

On pourra difficilement nier une certaine constance dans mes propos. Par exemple, j’ai lutté contre la Nupes à sa création. J’ai continué ensuite. Quand j’ai vu, hier, que les partis de gauche s’étaient mis d’accord pour la ressortir après un coup de plumeau, j’étais sidéré. Je vais le dire autrement : je ne veux pas voter pour un « conglomérat » politique qui aurait à sa tribune des gens qui ont fait, l’été dernier, un magnifique accueil à des antisémites, à des locdus qui ont refusé de traiter de terroristes les abrutis du Hamas après les attaques du 7 octobre et qui, maintenant, accusent Israël de pratiquer un génocide sans avoir le courage de vérifier la signification de ce mot dans le dictionnaire, qui ont pour seule politique internationale de manifester dans les rues, en France !

D’ailleurs, on y est. On a retrouvé dans nos rues, dimanche soir, des gens qui manifestaient sous le slogan « les jeunes emmerdent le Front National » (ce pour quoi ils n’ont pas tort) en accusant les anciens de faire monter l’extrême droite sans se rendre compte que ce sont des salariés qui ont majoritairement voté pour le Rassemblement National).

 

Le Front Populaire ! Il fallait bien trouver un nouveau nom mais n’oublions pas le passé. Sa création n’est pas un rapprochement fait dans l’urgence mais le fruit d’un travail de longue haleine. Il ne s’agit pas d’un partage des circonscriptions mais d’un accord électoral avec essentiellement un désistement au second tour. Et c’est bien l’aile plutôt à droite, « les radicaux », qui ont permis à la gauche de prendre le pouvoir, pouvoir qui a permis de belles avancées sociales mais qui a éclaté au bout de deux ans.

Alors quand je vois aujourd’hui quelques matamores hurler des slogans divers et prétendre qu’ils sont la voix du peuple, je me gausse. Je ne vais pas réécrire l’histoire (celle du Parti Radical est pourtant amusante). Après la mort du Front Populaire, la France sombrait dans la collaboration, au fond…

Sous la Cinquième République, jamais la gauche n’est arrivée au pouvoir avec un accord électoral sur la base d’unicité des candidatures… Jamais.

 

Elle est arrivée au pouvoir sans tenter de faire le bonheur des gens malgré eux… A elle de savoir, aujourd’hui, ce que veulent les gens et de les convaincre, sans oukase, que ce qu’elle propose est ce qu’il y a de meilleur. Elle ne pourra le faire que dans la diversité de ses composants.

 

« On pourra difficilement nier une certaine constance dans mes propos. » disais-je. Depuis la création de ce blog, j’ai toujours un peu considéré le rapport « gauche droite », en France, comme une histoire de géométrie. Comme je le disais hier, Le Rassemblement National, LR et Reconquête ont obtenu 44% des voix. Vous ajoutez tous les guignols comme Asselineau ou Lassale, vous arrivez à 50%. Voila où est la majorité, d’une part, et d’autres part où n’est pas la gauche.

Elle est ailleurs. Dans ce ailleurs, il y a les partis de la Nupes et la majorité présidentielle. Je ne prétends pas cette dernière soit à gauche, les mesures prises l’ont même montré. Il n’empêche que, pour gouverner, il faut une majorité. On sait qu’elle ne se fera pas. Elle pourrait se faire au bout de la droite. Nous voulons l’éviter.

Je suis fatigué de voir tous les petits partis politiques de gauche se revendiquer comme étant les seuls de la vraie gauche. Il y a LO, le NPA, les descendants du parti des travailleurs. Alors je me fous de tout ça. Je ne suis pas là pour offrir des brevets de gauchisme.

Mais une gauche qui veut diriger doit faire le ménage. Fabien Roussel, par exemple, a annoncé que le Front Populaire se ferait sans Jean-Luc Mélenchon et c’est très bien. Raphaël Glucksmann «  ne souhaite pas faire partie d’un « nouveau front populaire » aux conditions posées par La France insoumise. » Et c’est très bien. Il a déclaré : « «  Il n'y a pas et n'y aura pas d'accord avec LFI. Place publique a signé un texte comme quoi la totalité des partis de gauche ferait le maximum pour lutter contre l'extrême droite. Mais ce n'est pas aux dépens de nos principes fondamentaux. On a posé des conditions, s'ils ne sont pas d'accord, on ne fera pas partie de ce truc. »

 

Elodie Jauneau, aimable VP, a déclaré dans les réseaux sociaux : « 2017, on manifeste contre le RN. 2022, on fait barrage. 2024, il est en tête aux Européennes. Donc soit la gauche repart unie et y’a moyen. Soit elle repart désunie et on a un gouvernement de fachos dans un mois. Camarades, la balle est dans votre camp. Remballez vos egos. »

Je peux remballer mon égo. Pas mon honneur. Pas la meilleure solution pour éviter le RN.

Il faut une coalition capable de gagner pour pratiquer une autre politique que le RN, qui convainque les électeurs. 

Tout le monde ne peut pas en faire partie.

Tant pis pour nos brevets de gauche. Ils ont fait tout perdre.

A nous d'imposer une majorité au Président de la République. Autour de nos valeurs. Et des conclusions de billets plus courtes.