Devinez de quoi je vais parler, ce matin ? Des
législatives… Et plus particulièrement des électeurs habituels des PS ou du
moins, certains, égaré dans cette campagne, ceux représentés par ceux qui ont
voté Hollande à la primaire de 2011. Désolé de remonter si loin mais on connait
les événements ultérieurs : nos héros ont succombé aux quelques erreurs de
pépère ou de sa bande (assister au retour de Cahuzac, la semaine dernière, fut
un moment grandiose) ou aux coups de boutoirs des frondeurs ou d’une gauche radicale
et de son leader, qui s’en sont donnés à cœur joie…
Nous allons les appeler les orphelins.
Je vais en exclure les « purs militants » qui
respectent à fond les consignes des partis. Ils ont reçu l’ordre de soutenir le
Nouveau Front Populaire : ils y vont. Je le disais dans mon billet d’hier
ou d’avant-hier, ils sont parfois exaspérants tant ils s’imaginent que les électeurs
(les « sympathisants ») vont les suivre. Ils sont persuadés qu’ils
vont les convaincre.
Qui sont-ils, ses orphelins ?
A la primaire, ceux qui ont voté pour François Hollande,
Manuel Valls et Ségolène Royal (et Baylet... ; j'y repense en cherchant une photo d'illustration) ont représenté un peu plus de 50% des électeurs.
Il ne semble pas idiot de considérer qu’ils représentent la moitié des
électeurs de François Hollande au premier tour, soit 14% des votants. François
Bayrou avait alors obtenu 9% des voix.
Rappelez-vous 2017. Emmanuel Macron a obtenu 24% des votes,
soit à peu près la somme des 14 et des 9%. Vous commencez à voir où je veux en
venir ? Notons une pique qui va agrémenter ma théorie (je fais bien une
théorie, je n’ouvre pas un débat sur le sujet) : la majeure partie de l’électorat
de Macron vient de celui d’Hollande et le reste du centre (j’ai toujours considéré
Bayrou comme un homme de droite). On nous dit parfois que les exhollandophiles
ont déserté la gauche. C’est incontestable. Mais on nous dit que s’ils sont
partis, c’est parce que la politique de François Hollande n’était pas assez à
gauche. Le fait qu’ils soient partis
plus à droite parce qu’Hollande n’était pas assez à gauche m’a toujours bien
fait rigoler.
Au fond, c’est évident, mais vu sous cet angle, c’est aussi
la connerie de la gauche qui a permis à Macron d’émerger. Et à nos orphelins d’exister.
Reprenons les éléments de ma théorie.
En 2012, environ 44% des électeurs avaient choisi un
candidat de gauche. Si on y ajoute les voix obtenues par Bayrou, on monte à 53%.
En 2017, le cumul des candidats de gauche plus Macron obtient à peu près le
même score. Comme vous aimez les chiffres, le même « périmètre »
couvrait 54% en 2007 (alors qu’il montait à 58% en 2022 mais j’y reviendrai,
oublions cela pour l’instant ; notons aussi qu’il était aussi un peu
supérieur à 46% en 2002 ce qui semble montrer que la dispersion des voix n’explique
pas, à elle seule, la défaite).
J’espère que vous voyez toujours où je veux en venir… Désolé
de vous titiller le paradigme en cumulant les voix de la gauche et du centre.
Je veux en venir aussi au fait que, si on prend en compte ce fait, les équilibres
entre la droite et le reste n’ont pas tellement changé. Mais j’en étais à la
recherche de mes orphelins.
Je dois donc poursuivre l’exposé évidemment passionnant de ma
théorie.
En 2022, il y a une grosse fuite à droite, environ 8% des
électeurs mais aussi une augmentation à gauche, environ 4%. Macron a donc
augmenté son score de 4 points… C’est mathématique.
4 de mes 14% d’électeurs Hollandistes de 2012 à être devenus
Macronistes en 2017 étant partis, il reste 10% des électeurs à aller pêcher… si
l’on considère que le fond de l’électorat du parti centriste est maintenant
issu de l’ancien électorat plutôt centriste (n’allons pas jusqu’aux 18% de Bayrou
en 2007…) et de réfugiés de la droite vers un parti qui, en fin de compte, a
fini par se révéler plutôt à droite.
J’ai fini ma théorie et je vais en livrer le résumé devant
vos yeux émerveillés : il y a 10% des électeurs
qui sont prêts à passer du centre à gauche (et vice versa…) selon la tête du
candidat, sa personnalité et le projet qu’il porte. Vous me direz
que j’ai usé des pixels pour démontrer une évidence mais encore faut-il le
rappeler.
Car il y a une conclusion : ces 10% peuvent
évidemment faire basculer la majorité (la gauche est donnée
à 32% alors que la droite est à 47, dont 36 à l’extrême) en permettant à la
gauche d’avoir une majorité absolue sans bouger les oreilles. En conséquence, nos ferions mieux de travailler sur le projet et la personne
qui le porte que sur des alliances d’autant plus délirantes qu’elles vont faire
fuir une partie de ces 10%.
Ne me dites pas que ma démonstration (j’aurais dû mettre des
guillemets à ce mot) a des limites : je le sais. D’abord, je parle de taux
d’électeurs au niveau national alors que ce qu’il nous faut est une majorité d’élus
à l’occasion de 577 élections (une par circonscription). En outre, elle est
basée sur le fait que le transfert des voix d’une année à l’autre serait
binaire, ce qui n’est évidemment pas le cas.
Toujours est-il que le conglomérat n’a pas de chef pour le
porter. Jean-Luc Mélenchon est tellement haï par une partie de la population
que ses partisans ont intérêt à ce qu’il ferme sa gueule. Il y a François
Ruffin mais, malgré toute la sympathie que je peux avoir pour lui, je ne pense
pas que mes orphelins puissent le retenir. Et il reste un type à très forte
notoriété (pas nécessairement popularité) : François Hollande. Et je me
demande s’il n’a pas quelque chose derrière la tête.
Et il faut étudier le programme.
Vous avez le droit de comparer le
programme d’Hollande en 2012 (et pas en 2011, je ne trouve pas de document
avec Google) et ce
que propose le Nouveau Front Populaire. Un projet de transformation de la
société s’oppose à un catalogue de décrets…
On ne va pas aller loin pour motiver les troupes.
Il fallait travailler avant. La Nupes a deux ans, maintenant…
Mes orphelins ne vont pas s’y retrouver. C'est le problème de la gauche depuis des années : rien n'y fait plus envie.
Débrouillez-vous.
Et n'oubliez pas les enjeux :
- augmenter le nombre de "nos" électeurs ne réside pas dans le fait de récupérer des voix au FN... Les vagabonds ne sont pas là... Mais les orphelins ne supporteront pas qu'on touche à leurs camps d'adoption.
- bâtir une majorité pour faire passer nos idées est la priorité, cela ne se fera pas nécessairement à la gauche de la gauche.
Un orphelin de la social-démocratie (sans e à social…), c'est un pauv' gamin qui n'a plus ni social-démocratie 1 ni social-démocratie 2, c'est bien ça ?
RépondreSupprimerBon, je remonte lire…
C’est justement pour l’étape après le Mariage pour tous qu’il faut mettre un e à socdem.
SupprimerNJ