En salle

13 juillet 2024

Le retour des blogs socialistes ?

 


On va résumer l’actualité politique récente : la gauche (le NFP) n’arrive pas à se mettre d’accord pour une personne à proposer comme premier ministre et gueule parce que le président de la République ne se dépêche pas de nommer une personne issue de ses rangs, au NFP, comme premier ministre. Je me moque de la gauche parce c’est mon camp (qui aime bien, châtie bien, n’est-ce pas ?) mais, à droite, ils sont encore plus grotesques, il faut le reconnaître. J’entendais, par exemple, Gérard Larcher, déclarer qu’il appelait ses amis à censurer le gouvernement si le chef de l’Etat désignait un type de gauche à sa tête. C’est de bonne guerre. Mais la justification est grotesque. Le gros Gégé a dit que c’était parce que les Français n’avaient pas choisi cela.

Il faut quand même rappeler que les Français ont choisi de mettre en tête la gauche pour ce qui concerne le nombre de sièges et l’extrême droite en pourcentage des voix. Les autres partis subissent des défaites : la « macronnerie » et les descendants des gaullistes ont largement perdu (ces deux camps « cumulés » – ce qui n’a aucun sens, tout de même, on n’est plus à l’époque du RPR et de l’UDF – n’arrivent pas à la majorité et ont perdu un tiers de leurs élus).

J’entendais aussi François Ruffin (que j’aime bien) expliquer que les partis officiellement à gauche ne menaient plus de politique de gauche depuis 83 ou 84 ce qui expliquait la désertion des ouvriers. Je vais quand même lui rappeler que c’est sa formation politique (ou, du moins, l’ancienne) que les ouvriers ont désertée et qu’un peu d’humilité ne nuit pas (il n’en manque pas mais n’est pas avare, non plus, d’incantations diverses).

Depuis le début de cette séquence électorale, je suis en mode popcorn geek : le regarde ce qui se passe et lance des conneries dans les réseaux sociaux et surtout les blogs (si vous me lisez, vous savez ce que j’attends…).

 

Ce qui m’a fait plaisir, récemment, c’est que deux copains blogueurs proches du PS (à la grande époque…) ont repris leurs plumes et exprimé leurs avis : CC et
Stéphane. Ce qui m’étonnera toujours est nos différences de point de vue alors que nous espérons tous qu’une majorité de centre gauche dirige le pays. Enfin, je crois…

A part pour le premier point, si je les cite, ici, ce n’est pas pour les « montrer du doigt » mais pour s’interroger sur les désaccords.

 

Alors, je commence par Stéphane. Au sujet du projet du NFP, il dit : « si les gens retrouvent le chemin de la consommation, ça génèrera de la croissance, même un élève de première sait ça ». On est d’accord mais, avec la fin de sa phrase, il montre qu’il prend les gens pour des cons. Ca me gêne franchement, sans même rappeler que le PS est allié avec des gens qui ne prônent pas franchement la croissance (comment peut-on soutenir la défense de l’environnement et vouloir favoriser la consommation ?). Le problème est dans le « si », au départ. Un type de droite pourrait dire la même chose. Et continuer : l’augmentation du SMIC va générer de l’inflation, d’une part, parce que les patrons seront obligés d’augmenter les prix pour faire face à l’accroissement de la masse salariale et, d’autre part, parce que l’augmentation des revenus disponibles permet aux entreprises d’augmenter les tarifs. En outre, rien ne garantit que le surcroit de pognon touché par les pue-la-sueur ne sera pas dépensé en cochonneries importées.

Le « même un gamin » sait ça a tout de même des limites…

 


Revenons au reste. Je commence par le billet de CC. Rien à dire sur l’introduction. Macron a voulu jouer à Jupiter, il ne finit même pas en Bacchus. C’est un petit président. Comme l’ont été Sarkozy et Hollande. Et Chirac, tiens ! Avec ses faibles scores aux premiers tours, ses « pschitt » et « abracadantesques ». Et Mitterrand avec ses avions renifleurs et ses diamants. Et Giscard avec ses écoutes, son Rainbow Warrior, son carrefour du développement, les suicides de ses proches.

 Elle dit « Après avoir décidé unilatéralement de dissoudre le parlement, ce qui a provoqué une période incertaine et dangereuse pour la République, pour les institutions, pour la stabilité du pays, pour l'économie, il revient maintenant sur les résultats pour finalement ne rien changer en demandant à ce qu'on ne prenne pas en compte ce qu'ont exprimé les Français. » Mitterrand et Chirac n’ont pas pris leurs décisions de dissolution unilatéralement ? Il est arrivé une fois, dans l’histoire, un cas où les français n’ont pas « exprimé » le fait de ne pas avoir une majorité franche au Parlement ?

Je répondais hier à un commentateur qui me traitait de macroniste, pour rigoler, que ce n’était pas le cas mais que j’aimais bien un tantinet d’objectivité.

« Tout le monde s'accorde à dire, pourtant, que nous sommes à un moment critique de notre histoire. Un moment de bascule durant lequel nos institutions ont vacillé, où l'on a évité que notre constitution fragile tombe aux mains de ceux qui veulent la modifier. » Faut-il rappeler qu’un des points du programme du NFP est de changer la Constitution ? J’y suis d’ailleurs opposé : l’actuelle, la cinquième, est supposée ne pas être fragile et garantir des institutions solides. Vous changez la Constitution et si vous n’y inscrivez pas que des blondasses quinquagénaires ne peut pas être présidente, le RN arrivera en tête la prochaine fois…

 


« Ce moment laisse forcément des cicatrices, profondes, ouvertes. Sanglantes encore. Les électeurs du RN se sentent trahis. Leur message est encore une fois ignoré. » Je suis le premier à dire qu’il faut écouter ces braves gens mais le message est quand même clair : les vieux partis nous cassent les burnes et les immigrés sont à l’origines de nos maux. En d’autres termes, en ne changeant pas de politique, en n’ayant pas de résultat, je ne vois pas comment on peut écouter leur message sans coller des basanés dans des charters…

« Et le président propose le néant, le mou, le centrisme consensuel, la gestion des affaires courantes, aucun changement, surtout. Ne changeons rien, ne faisons rien. » N’oublions pas que le lascar à provoquer la dissolution et que c’est ce qui est susceptible de créer du changement, que c’est bien cette gestion des affaires qui est importante parce que le moment n’est plus aux réformes emblématiques qui gonflent tout le monde. Et font le lit patati patata.

« La réponse d'Emmanuel Macron appelle clairement à la violence. Le sait-il ? En a t-il conscience ? Cherche-t-il, lui aussi, comme les électeurs d'extrême droite, le pire ? » Non, ce sont les forces de gauche qui appellent à la violence, comme les syndicats qui disaient, hier, souhaiter bloquer les Jeux Olympiques…

 

Revenons à Stéphane. Il rappelle que le NFP est le gagnant des élections et commence par sortir des chiffres. Le NFP étant composé de plusieurs partis, générera plusieurs groupes à l’Assemblée. C’est donc le RN qui aura le premier groupe. Vous pouvez reprendre sa démonstration avec ce fait.

Il en déduit que le NFP a gagné. Il n’a pas tort. Mais les « majorités » ont toujours été absolues sauf, à peu près, en 1988 alors que le président de gauche avait eu le plus haut score à un premier tour depuis longtemps. Et évidemment en 2022. Le groupe vainqueur était évident mais n’avait pas du tout la majorité absolue. Nous l’avons critiqué pour avoir gouverné dans ces conditions. Peut-être faire les marioles maintenant (sans avoir la majorité en voix) n’est-il que de la communication politique pour faire croire à une large victoire et revendiquer les plein-pouvoir.

 


« On entend çà et là des personnalités politiques de tous bords nier l’évidence : Gérard Larcher, Aurore Bergé […], Valérie Pécresse […], et une foultitude de personnalités de droite et macronistes (pardon c’est pareil) appellent à la constitution d’une coalition, chacun demandant que le futur Premier Ministre soit issu de son camp ? »  Ce n’est pas, un peu, ce que font les gens de gauche ? A des détails près : s’ils n’appellent pas à une coalition, ils appellent à ne pas être censurer par les autres… Des clowns.

« Et surtout, ils [les zozos cités] sortent tous la menace de la censure d’un gouvernement qui comporterait des membres issus de LFI : ces cons-là oublient, encore une fois, qu’ils ont été élus en partie grâce au désistement des candidats NFP arrivés 3ème dans leurs circos, et grâce au report massif des électeurs de gauche sur leurs candidatures. » Ah… Les gens de gauche n’ont pas gagné de putatives triangulaires grâce à des désistements ? En outre, soyons précis, ils menacent un gouvernement avec des membres sortis de LFI (en pensant surtout à un premier ministre sorti de LFI) pas du NFP.

Nommer un premier ministre issu du parti socialiste permettrait sans doute de faire exploser cette menace. Il faut le dire ! On appelle à gouverner au nom de notre camp politique, pas d’un conglomérat mis en œuvre de façons opportuniste pour avoir des élus.

 

Une bricole, maintenant, parce qu’on entend l’argument souvent : « Si la bérézina annoncée n’est pas arrivée dans le groupe centriste, c’est parce que les électeurs du NFP ont massivement appliqué, encore une fois, le barrage républicain (à 74%), alors que seuls 52 % des électeurs macronistes l’ont fait en faveur des candidats du NFP. » On peut prendre cela sous un autre angle : les électeurs ont voté pour les candidats les moins éloignés « d’eux ». Il est donc plus facile pour un mélenchoniste de choisir un attalien qu’un bardellonieur que pour un macroniste de faire un choix entre sa droite et sa gauche.

« Pour être clair, si on avait été dans une élection « normale », le camp macroniste compterait probablement moitié moins de députés que ce qu’il détient aujourd’hui. Admettre cette réalité devrait les amener à adopter une attitude des plus modestes. » Pour être clair, s’il n’y avait pas eu ces principes de désistements, les nfpien compterait moins de député que le RN compte tenu des différences en termes de pourcentage des scrutins.

 

Reprenons. « On aura donc une majorité de députés de gauche raisonnables, prêts à gouverner le pays et en capacité de discuter, texte par texte, avec les autres groupes parlementaires pour créer des majorités de circonstance. » Je pense qu’il n’a pas tort mais je ne veux pas de discussion au cas par cas, d’autant que l’essentiel tient dans les budgets. Il faut que la gauche arrête de dire « tout le programme, rien que le programme ». Le reste est simple. Il y a les sujets sociétaux, comme « la fin de vie », qui feront l’objet d’un consensus, et les sujets économiques, comme l’abrogation de la réforme des retraites, qui ne trouveront pas de majorité !

Stéphane conclut qu’on aura « un gouvernement issu du camp vainqueur des élections [qui] aura toute latitude pour gouverner, et – espérons-le – éviter qu’on rejoue à se faire peur dans 3 ans (sans garantie que cette fois le front républicain fonctionnera encore). »

Il n’aura aucune latitude, on se fera peur à chaque fois, avec des 49.3 et des motions de censure. Comment croire que le camp macronistalien votera tout ce qu’on souhaite sans mais céder sur rien ? On ne se fera pas peur dans trois ans : le bordel qu’on aura semé garantira la victoire du RN.

 

Je vais arrêter là. J’ai atteint ma taille limite pour un billet et j’ai un risotto de saucisses aux poivrons et oignons à préparer.

C’est maintenant qu’il faut négocier un accord, pour garantir la stabilité pendant les prochaines années, quitte à ne fasse pas tout ce que l’on souhaite. N’oublions pas que les deux précédents quinquennats ont tourné en eau de boudin (ou tout comme) avec des frondeurs et des gilets jaunes refusant de reconnaitre la légitimité des zélus.

CC parlait d’un moment spécifique de notre histoire. Nous y sommes. Ne le gâchons pas nos réflexes militants qui, au fond, consistent à dire : nous on est bien et les autres c’est du caca.

18 commentaires:

  1. Un moment critique de notre histoire ? C'est l'évidence, mais dans un sens plus profond, plus dramatique aussi, que ne le voit votre amie blogueuse. (Il me semble bien, à moi, que nous sommes à la fin de notre histoire, mais c'est trop long à développer...)

    D'un point de vue étroitement politique, je ne vois pas ce qu'a de "critique" le fait de n'avoir pas de majorité claire : ce fut le cas durant une bonne partie de la IIIe République, et le lot presque quotidien de la IVe.

    Encore une fois, il faudrait développer, nuancer, approfondir tout cela : la flemme...

    DG

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    1. Pas besoin de développer vu que je crois qu’on est d’accord.
      NJ

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    2. Cela fut effectivement le lot des première, seconde, troisième et quatrième républiques ... qui se sont terminées de façon assez peu républicaines. Pensez-vous la Vème meilleure ou le problème est-il intrasèque à la république elle même ?

      La Dive

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    3. Pas à la République mais à la démocratie. Même si ça ne change pas grand chose.

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    4. Tout le monde compare l'époque actuelle à la IVème république, mais finalement, je trouve qu'elle ressemble plus à la IIème: La gauche est divisée entre des révolutionaires et des libéraux qui n'arrivent pas à se mettre d'accord. La droite a une aile bonapartiste qui monte. Les Orléanistes, dont notre président actuel est une sorte de descendant, viennent de se prendre une avoinée, Paris vote à l'opposé des campagnes ... Quel progrès en presque deux siècles!

      La Dive

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    5. Je ne connais pas assez l'histoire pour me livrer à des comparaisons... Mais vous avez sans doute raison : on est bien loin de la quatrième...

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  2. ”Et Mitterrand avec ses avions renifleurs et ses diamants. Et Giscard avec ses écoutes, son Rainbow Warrior, son carrefour du développement, les suicides de ses proches.”

    Agaga mon Nicolas ? 🥳🤭
    Hélène

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    1. il a fait une "biden" , il devait avoir soif , je ne vois que cette explication pour cette erreur.

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    2. J’ai tout simplement fait une vanne dans mon billet.

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    3. Wesh une BIDEN il est bien trop jeune, mais l'expression est rigolote. Moi qui commence à en faire des méli-mélo, pour jacter la France et ne pas se faire ouspiller par didier, je me la stocke l'expression, à gauche forcément 😆

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    4. Nicolas, on sait bien que c’était une vanne, nous aussi on en fais !
      Hélène

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  3. si les gens retrouvent le chemin de la consommation, ça génèrera de la croissance, ah oui ça va partir en produit importés, coucou TEMU et autres aliexpress.. et en bouffe avec un peu de chance dans les services ou tourisme.

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    1. Arrête ! On va dire que tu es de droite car tu dis que la politique de la demande ne fonctionne pas !

      Ces ânes sont resté à l’époque Keynes…

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    2. oui mais ils sont en tête vont ils dire... donc doivent TOUT décider. Ca promet du LOL à l'assemblée avec 370 députés contre eux.

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    3. bah le centre c'est la droite... donc c'est déjà fait.

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  4. J'ai répondu : https://stephgauthier06.fr/blog/2024/07/13/discussion-de-comptoir/

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    1. Tu. Tu progresses mais il reste de la marge…

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    2. « Lu » pas « tu ». Connerie d’iPhone.

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